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N° 435

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 6 mai 2010

PROPOSITION DE LOI

tendant à préserver l' intégrit é des retraites complémentaires AGIRC et ARRCO des salariés du secteur privé ,

PRÉSENTÉE

Par M. Jean Louis MASSON,

Sénateur

(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le problème général du déséquilibre financier des caisses de retraite est aggravé par la multiplicité des régimes, ce qui conduit à des distorsions profondément injustes. Pour cette raison, il est souhaitable d'unifier l'ensemble des régimes de retraite en instaurant un système unique de retraite par points applicable à tout le monde.

Quoi qu'il en soit, les salariés du secteur privé sont actuellement beaucoup moins bien traités que les fonctionnaires ou que ceux des régimes spéciaux (SNCF, EDF...). Ce constat est vrai, à la fois pour les retraites proprement dites et pour les retraites complémentaires.

Ainsi, les régimes complémentaires des salariés du privé (AGIRC et ARRCO) sont nettement moins avantageux que le régime complémentaire servi par l'IRCANTEC aux fonctionnaires non titulaires et aux élus locaux :

- Le taux de cotisation IRCANTEC est de seulement 5,63 % de la rémunération alors qu'il est de 9,50 % à l'AGIRC-ARRCO ;

- Les prestations accordées par l'IRCANTEC ont un taux de rendement de 11,40 % ; ce taux n'est que de 6,75 % à l'AGIRC et de 6,64 % à l'ARRCO.

Il est donc tout à fait inadmissible que la loi n° 2010-123 du 9 février 2010, qui a transformé La Poste en société anonyme, en ait profité pour renflouer l'IRCANTEC au détriment de l'AGIRC-ARRCO.

Devenue société anonyme le 1 er mars 2010, « La Poste » devait dans la foulée modifier les règles du jeu pour ses agents contractuels, c'est-à-dire ceux qui ne sont pas fonctionnaires. Ils représentent près de la moitié des effectifs et cotisaient jusqu'alors pour leur retraite complémentaire, à l'IRCANTEC. En devenant une société de droit privé, La Poste aurait dû théoriquement faire passer ces salariés de l'IRCANTEC à l'AGIRC-ARRCO.

Toutefois, ce changement était refusé par les syndicats de La Poste car les conditions de l'AGIRC-ARRCO sont considérablement moins avantageuses que celles de l'IRCANTEC. Comme l'indique le journal les Echos du 9 mars 2010, « les cotisations sociales versées par les salariés et les employeurs auraient été plus importantes et les pensions moins élevées ». Un compromis fut finalement trouvé fin 2009 selon lequel les salariés actuels de La Poste resteraient affiliés à l'IRCANTEC, les nouveaux embauchés, à compter de mars 2010 relevant, eux, de l'AGIRC-ARRCO.

Bien que les nouveaux embauchés de La Poste n'aient absolument rien à voir avec l'IRCANTEC, le Gouvernement a prétendu que leur non affiliation aurait pénalisé cet organisme en lui faisant perdre des cotisants potentiels pour remplir ses caisses. En fait, c'est inexact car l'origine des problèmes financiers de l'IRCANTEC se trouve dans le niveau insuffisant des cotisations par rapport aux prestations fournies. Au lieu d'agir à ce niveau, la loi a obligé l'AGIRC-ARRCO à verser une soi-disant compensation prenant la forme, soit d'une soulte, soit d'un versement annuel pendant une longue période.

En fait, le projet de loi initial ne prévoyait pas que l'AGIRC-ARRCO indemnise l'IRCANTEC d'un hypothétique et virtuel manque à gagner. Ce projet de loi a tout d'abord été voté après déclaration d'urgence à l'Assemblée nationale, mais un amendement a été présenté en dernière minute au Sénat pour imposer la compensation. Ce tour de passe-passe a été tout d'abord passé sous silence car certains dirigeants de l'AGIRC-ARRCO étaient tacitement complices de l'opération. Finalement le pot aux roses a été mis sur la place publique à l'occasion des tractations début mars 2010 pour fixer le montant de la soulte.

Les ayants droit de l'AGIRC-ARRCO ont alors exprimé leur profonde indignation. Ils ont raison car la compensation est totalement injustifiée. En effet, le principe des régimes de retraite complémentaire consiste à redistribuer a posteriori les cotisations versées par chaque affilié. Les nouveaux salariés de La Poste n'auront jamais été affiliés à l'IRCANTEC, n'y auront jamais cotisé et n'en percevront aucune prestation. Ces nouveaux salariés de La Poste auront pour seul interlocuteur de retraite complémentaire l'AGIRC-ARRCO. N'ayant strictement rien à voir avec eux, l'IRCANTEC n'est pas fondé à réclamer quoi que ce soit.

Les affiliés de l'AGIRC-ARRCO sont déjà nettement défavorisés par rapport à ceux de l'IRCANTEC. C'est donc un comble que de vouloir en plus leur faire supporter le prix du déficit financier de l'IRCANTEC. Pour cette raison, il convient d'abroger l'article susvisé de la loi transformant La Poste en société anonyme. Au besoin, si les pouvoirs publics souhaitent renflouer les caisses de l'IRCANTEC, ils n'ont qu'à trouver d'autres solutions. Par exemple, un plafonnement radical du bouclier fiscal.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Dans l'article 11 de la loi n° 2010-123 du 9 février 2010 relative à l'entreprise publique La Poste et aux activités postales, les deux phrases suivantes sont supprimées : « Une convention entre les fédérations d'institutions de retraite complémentaire visées à l'article L. 922-4 du code de la sécurité sociale et l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques organise les transferts financiers entre ces organismes en tenant compte des charges et des recettes respectives. À défaut de signature de la convention au 30 juin 2010, un décret en Conseil d'Etat organise ces transferts financiers . »

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