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N° 9

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2015-2016

Enregistré à la Présidence du Sénat le 5 octobre 2015

PROPOSITION DE LOI

instaurant le vote obligatoire , l' inscription d' office sur les listes électorales et la reconnaissance du vote blanc ,

PRÉSENTÉE

Par M. Jean-Pierre GRAND,

Sénateur

(Envoyée à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le vote est un droit et un devoir citoyen.

La participation des citoyens français aux consultations électorales chute sans cesse d'élection en élection. Les élections cantonales de mars 2011 ont connu un taux d'abstention record de plus de 55 %. La présente proposition de loi constitutionnelle vise à faire reculer cette tendance, en faisant du vote une condition de la citoyenneté et en permettant la reconnaissance du vote blanc.

Nos représentants politiques doivent être élus par une majorité de citoyens. Dans l'idéal républicain le taux est de plus de 50 % de la population en âge de voter. C'est une nécessité pour la démocratie et pour une incontestable représentativité des élus.

La présente proposition de loi vise trois objectifs principaux:

Premier objectif : l'effectivité de l'obligation d'inscription sur les listes électorales.

L'inscription sur les listes électorales est obligatoire (article L 9 du code électoral). Si cette obligation est inscrite dans la loi, aucun mécanisme d'encadrement ni aucune sanction ne sont prévus. Ainsi 2,5 millions de personnes en âge de voter ne sont pas inscrites sur les listes. Peu de propositions de loi ont tenté de mettre en oeuvre cette obligation d'inscription. La présente proposition de loi vise à mettre en place un mécanisme d'inscription automatique sur les listes électorales. Le principe est simple: regrouper les fichiers du ministère de l'intérieur (personnes ayant la nationalité française) avec le fichier des électeurs. Le dispositif créé en 1997 au bénéfice des jeunes majeurs serait ainsi étendu à l'ensemble des non-inscrits (article 3).

Second objectif : rendre le vote obligatoire.

Pour renforcer ce dispositif, le vote doit être rendu obligatoire (articles 1 er et 2). De nombreux pays européens, tels que l'Autriche, la Belgique et le Luxembourg ont d'ores et déjà fait ce choix. Nous proposons deux mesures: premièrement, inscrire l'obligation de voter dans la loi et prévoir le principe d'un mécanisme de sanction (articles 7 et 8). En second lieu, il faut faciliter les accès aux urnes en simplifiant le vote par procuration (articles 5 et 6).

Les étrangers pouvant voter aux élections municipales conformément à la directive européenne de 1994, ne sont pas concernés par cette obligation.

Troisième objectif : reconnaissance du vote blanc.

Le vote obligatoire a pour contrepartie la prise en compte réelle du vote blanc. Un électeur doit pouvoir voter blanc, voir son vote reconnu et proclamé. Les votes blancs seront comptabilisés et annoncés distinctement des bulletins nuls (article 4).

De ce fait, l'élection au 1er tour n'est acquise qu'au bénéfice de plus de 50 % des suffrages exprimés, vote blanc compris.

La loi n° 2014-172 du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections n'a pas permis de prendre réellement en compte les bulletins blancs pour la détermination des suffrages exprimés. Elle permet uniquement de distinguer les bulletins blancs des nuls.

PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

À la fin de l'article L. 1 du code électoral, les mots : « et universel » sont remplacés par les mots : « , universel et obligatoire ».

Article 2

Après le même article L. 1, il est inséré un article L. 1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1-1. - Les motifs d'exemption de vote doivent être liés à une obligation soudaine et incontournable.

« Un décret en Conseil d'État en précise les modalités d'application du présent article. ».

Article 3

À l'article L. 11-1 du même code, les mots : « depuis la dernière clôture définitive des listes électorales » sont supprimés.

Article 4

Le troisième alinéa de l'article L. 65 du même code est ainsi modifié :

1° Les mots : « n'entrent pas » sont remplacés par le mot : « entrent » ;

2° Les mots : « , mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins » sont remplacés par les mots : « et leur nombre est mentionné lors de la proclamation des résultats ».

Article 5

À l'article L. 72 du même code, les mots : « la même commune » sont remplacés par les mots : « le même département ».

Article 6

Avant le premier alinéa de l'article L. 73 du même code, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les procurations peuvent être établies à la mairie du lieu de résidence, dans un commissariat de police ou dans une brigade de gendarmerie par un acte dressé devant un officier de police judiciaire ou un officier d'état civil.

« Le juge d'instance du lieu de résidence de l'électeur désigne des officiers de police judiciaire ou d'état civil, qui peuvent se rendre auprès des personnes dans l'incapacité de se déplacer pour établir une procuration. »

Article 7

La section 5 du chapitre VI du titre I er du livre I er est complété par un article L. 85-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 85-2. - À l'issue de chaque tour de scrutin, le président du bureau de vote ou, dans les communes de plus de 20 000 habitants, la commission de contrôle des opérations de vote dresse la liste des électeurs n'ayant pas voté et la transmet au représentant de l'État dans le département, qui vérifie si les motifs d'exemption prévus à l'article L. 1-1 sont satisfaits. À défaut, la sanction prévue à l'article L. 117-2 est encourue. »

Article 8

Le chapitre VII du titre I er du livre I er du même code est complété par un article L. 117-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 117-2. - Tout électeur qui, sans motif prévu à l'article L. 1-1, n'exerce pas son obligation de voter, est passible d'une amende prévue pour les contraventions de la deuxième classe. »

Article 9

Les charges qui pourraient résulter pour les communes de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement pour l'État par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Les charges qui pourraient résulter pour l'État de l'application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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