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N° 702

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 31 juillet 2018

PROPOSITION DE LOI

visant à sécuriser le statut juridique des préparations magistrales dont la réalisation est sous-traitée à un établissement pharmaceutique ,

PRÉSENTÉE

Par Mme Catherine TROENDLÉ, MM. Alain MILON, Philippe BAS, Arnaud BAZIN, Mme Martine BERTHET, M. Jean BIZET, Mmes Christine BONFANTI-DOSSAT, Pascale BORIES, MM. Max BRISSON, Jean-Noël CARDOUX, Patrick CHAIZE, René DANESI, Marc-Philippe DAUBRESSE, Gérard DÉRIOT, Mmes Jacky DEROMEDI, Chantal DESEYNE, M. Alain DUFAUT, Mmes Catherine DUMAS, Nicole DURANTON, MM. Michel FORISSIER, Bernard FOURNIER, Mme Frédérique GERBAUD, MM. Bruno GILLES, Daniel GREMILLET, Alain HOUPERT, Mme Corinne IMBERT, M. Guy-Dominique KENNEL, Mme Florence LASSARADE, M. Antoine LEFÈVRE, Mmes Viviane MALET, Marie MERCIER, Brigitte MICOULEAU, MM. Jean-Marie MORISSET, Philippe MOUILLER, Olivier PACCAUD, Philippe PAUL, Stéphane PIEDNOIR, Jackie PIERRE, François PILLET, Ladislas PONIATOWSKI, Mmes Sophie PRIMAS, Catherine PROCACCIA, MM. Charles REVET, René-Paul SAVARY et Michel SAVIN,

Sénateurs

(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Tous les besoins en médicaments ne peuvent être couverts par une offre industrielle (dosage, forme, etc. en dermatologie, pédiatrie, gériatrie, homéopathie etc.), et n'appellent pas nécessairement de réponse hospitalière, du fait des cas cliniques et des coûts.

Aux besoins spécifiques non couverts par une offre industrielle, la loi française répond par le concept de « préparation magistrale », c'est-à-dire un médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé. En 2008 puis en 2011, le législateur en a restreint le champ d'application et organisé la sous-traitance de la préparation magistrale assurée par une pharmacie ou un établissement pharmaceutique , afin de garantir la sécurité, la qualité et l'efficience de cette activité 1 ( * ) .

Mais la méconnaissance de la nature et de la récurrence de ces besoins spécifiques conduit la jurisprudence à une interprétation restrictive de cet article : elle juge que l'expression « malade déterminé » y postule l'indivisibilité du lot préparé, donc non « préparable » à l'avance.

C'était historiquement et rationnellement le cas avant la sous-traitance, mais ne vaut plus en France depuis l'organisation de celle-ci et surtout depuis la modification législative de 2011 2 ( * ) : les malades concernés sont en effet essentiellement déterminés par la condition objective, nécessairement constatée par le médecin, de « l'absence de spécialité disponible ».

En outre, les bonnes pratiques applicables (L. 5121-5 CSP) et pénalement sanctionnées (L. 5421-1 CSP) ont acté que ces besoins insatisfaits pouvaient être partagés et/ou récurrents.

Les « bonnes pratiques de préparation » au plan national, comme la « pharmacopée européenne » au plan européen, prévoient ainsi la possibilité d'une préparation commune et/ou à l'avance, dès lors que cette activité n'a ni pour objet, ni pour effet d'éluder l'obligation d'autorisation de mise sur le marché (AMM) qui s'impose pour les médicaments fabriqués industriellement.

En conséquence, afin de répondre aux besoins de nos concitoyens, réaliser les buts de santé publique et maintenir la cohérence des textes, il y a lieu de préciser que la préparation magistrale peut, lorsqu'elle est sous-traitée, répondre à des besoins identiques ou récurrents par division d'un lot préparé à l'avance en due application des bonnes pratiques, pour des séries d'échelle non industrielle, motivées par l'absence d'offre industrielle dûment constatée par le prescripteur.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi qui modifie le 1° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique en précisant que :

- la préparation magistrale en officine est exécutée extemporanément selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé ;

- la préparation magistrale sous-traitée peut être exécutée à l'avance pour un ou plusieurs malades présentant des besoins identiques ou récurrents.

Cette clarification législative :

- n'a pas d'impact compétitif : en premier lieu, elle ne concerne que l'hypothèse de sous-traitance. En second lieu, cette sous-traitance éventuelle par un fabricant fait déjà l'objet de restrictions importantes (L. 5121-1 CSP ; R. 5125-33-3 CSP) : seules les préparations à risques, dangereuses ou homéopathiques peuvent faire l'objet d'une demande de sous-traitance par une officine à un établissement pharmaceutique. Enfin et au surplus, la préparation « pouvant présenter des risques pour la santé » peut donner lieu à régulation additionnelle et sélective, par les bonnes pratiques, des volumes autorisés.

- ne saurait induire de dépenses immodérées : le remboursement des préparations magistrales est en effet aisément modulable et modulé par la voie réglementaire (L. 162-17 et R. 163-1 code de la sécurité sociale, et circulaire CNAMTS 3 ( * ) sur les modalités de prise en charge des préparations magistrales et officinales - CIR-58/2008).

- n'affecte en rien le droit applicable aux préparations magistrales , en ce qui concerne notamment la réglementation des substances, de leurs mélanges, et de l'origine des matières premières.

Dès lors, toutes les préparations magistrales, qu'elles soient réalisées en pharmacie ou par des établissements pharmaceutiques seront dotées d'un statut juridique incontestable.

Proposition de loi visant à sécuriser le statut juridique
des préparations magistrales dont la réalisation est sous-traitée
à un établissement pharmaceutique

Article unique

I. - Le 1° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le mot : « préparé », les mots : « selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé » sont supprimés ;

2° Après le mot : « soit extemporanément en pharmacie », sont insérés les mots : « selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé » ;

3° À la fin, les mots : « soit dans les conditions prévues à l'article L. 5125-1 ou à l'article L. 5126-6 » sont remplacés par les mots : « soit le cas échéant à l'avance dans les conditions prévues à l'article L. 5125-1 ou à l'article L. 5126-2 pour un ou plusieurs malades aux besoins identiques ou récurrents ».

II. - Les éventuelles conséquences financières résultant pour les organismes de sécurité sociale de la présente loi sont compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


* 1 1° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique (CSP)

* 2 Loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé

* 3 Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés

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