Choix de fin de vie (PPL) - Texte déposé - Sénat

N° 518

SÉNAT


SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

                                                                                                                                             

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 avril 2024

PROPOSITION DE LOI


visant à assurer aux patients le respect de leur choix de fin de vie,


présentée

Par Mme Anne SOUYRIS, MM. Guy BENARROCHE, Grégory BLANC, Ronan DANTEC, Thomas DOSSUS, Jacques FERNIQUE, Guillaume GONTARD, Mme Antoinette GUHL, M. Yannick JADOT, Mme Monique de MARCO, M. Akli MELLOULI, Mmes Mathilde OLLIVIER, Raymonde PONCET MONGE, M. Daniel SALMON, Mmes Ghislaine SENÉE et Mélanie VOGEL,

Sénatrices et Sénateurs


(Envoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)




Proposition de loi visant à assurer aux patients le respect de leur choix de fin de vie


TITRE Ier

Améliorer la compréhension et la mise en œuvre des dispositions de la loi  2016-87 du 2 février 2016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie


Article 1er

Le titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le chapitre préliminaire est ainsi modifié :

a) Est insérée une section 1 intitulée : « Principes généraux » comprenant les articles L. 1110-1, L. 1110-1-1, L. 1110-2, L. 1110-2-1, L. 1110-3, L. 1110-3-1, L. 1110-4, L. 1110-4-1, L. 1110-5, L. 1110-6, L. 1110-7, L. 1110-8, L. 1110-12 et L. 1110-13 ;

b) Est insérée une section 2 intitulée : « Soins palliatifs et accompagnement » comprenant les articles L. 1110-5-3, L. 1110-9, L. 1110-10 et L. 1110-11 ;

c) Est insérée une section 3 intitulée : « Fin de vie », qui comporte :

– une sous-section 1 intitulée : « Expression de la volonté des malades en fin de vie » comprenant les articles L. 1111-11 et L. 1111-12 ;

– une sous-section 2 intitulée : « Obstination déraisonnable et dignité du mourant » comprenant les articles L. 1110-5-1 et L. 1110-5-2 ;

d) Les articles L. 1110-5-1, L. 1110-5-2, L. 1110-5-3, L. 1110-12, L. 1110-13, L. 1111-11 et L. 1111-12 deviennent respectivement les articles L. 1110-16, L. 1110-17, L. 1110-8-3, L. 1110-8-1, L. 1110-8-2, L. 1110-14 et L. 1110-15 ;

2° La section 2 du chapitre Ier est abrogée.


Article 2

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 1110-5-1, devenu l’article L. 1110-16, le mot : « définie » est remplacé par le mot : « précisée » ;

2° L’article 1110-5-2, devenu l’article L. 1110-17, est ainsi modifié :

a) Le quatrième alinéa est ainsi modifié :

– la référence : « L. 1110-5-1 » est remplacée par la référence : « L. 1110-16 » ;

– sont ajoutées trois phrases ainsi rédigées : « La décision de limitation ou d’arrêt de traitement respecte la volonté du patient antérieurement exprimée dans des directives anticipées. La décision est motivée. Dans tous les cas, la personne de confiance ou, à défaut, la famille ou l’un des proches est informé, sans délai, de la décision de mettre en œuvre la procédure collégiale, ainsi que de la nature et des motifs de la décision de limitation ou d’arrêt de traitement. » ;

b) Après le même quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le médecin en charge du patient peut engager la procédure collégiale de sa propre initiative. Il est tenu de le faire à la demande de la personne de confiance, ou, à défaut, de la famille ou de l’un des proches. » ;

c) Au cinquième alinéa, le mot : « définie » est remplacé par le mot : « précisée » ;



d) Après le même cinquième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :



« La procédure collégiale prend la forme d’une concertation avec les membres présents de l’équipe de soins, si elle existe, et d’un avis motivé d’au moins un médecin, appelé en qualité de consultant. Il ne doit exister aucun lien de nature hiérarchique entre le médecin en charge du patient et le consultant. L’avis motivé d’un second consultant est recueilli par ces médecins si l’un d’eux l’estime utile.



« Lorsque la décision de limitation ou d’arrêt de traitement concerne un mineur ou une personne faisant l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, le médecin recueille en outre l’avis des titulaires de l’autorité parentale ou de la personne chargée de la mesure, selon les cas, hormis les situations où l’urgence rend impossible cette consultation. »


Article 3

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 1111-11, devenu l’article L. 1110-14, est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, le mot : « majeure » est remplacé par le mot : « capable » ;

b) Après le même premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :

« En cas de diagnostic ou de pronostic grave, le médecin informe le patient de la possibilité d’établir des directives anticipées et de désigner une personne de confiance. Le médecin renouvelle régulièrement cette information lors du traitement de la pathologie.

« Les directives anticipées peuvent également mentionner une personne de confiance désignée par le patient, en application de l’article L. 1111-6 du présent code.

« Les directives anticipées s’appliquent sans limitation de durée. Le document comprenant les directives anticipées est daté. En cas de pluralité de rédactions, seul le dernier document en date est reconnu comme exprimant la volonté de la personne. » ;

c) Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il est fait mention des directives anticipées ainsi que du nom de la personne de confiance dans le volet d’urgence de la carte électronique individuelle inter-régimes mentionnée à l’article L. 161-31 du code de la sécurité sociale. » ;



2° L’article L. 1111-12, devenu l’article L. 1110-15, est ainsi modifié :



a) À la seconde phrase, la référence : « L. 1111-11 » est remplacée par la référence : « L. 1110-14 » ;



b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :



« La personne de confiance a le même droit d’accès au dossier médical que le titulaire lorsque ce dernier n’est plus capable d’exprimer sa volonté. » ;



3° Le premier alinéa de l’article L. 1411-6-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces rendez-vous de prévention donnent lieu à une séance d’information sur la possibilité d’établir des directives anticipées et de désigner une personne de confiance. »


Article 4

Après le cinquième alinéa de l’article L. 1110-5-2 du code de la santé publique, devenu l’article L. 1110-17, sont insérés neuf alinéas ainsi rédigés :

« Lorsque le patient n’est plus en état d’exprimer une demande libre et éclairée, en l’absence de directives anticipées, et en l’absence de désignation d’une personne de confiance, pour établir et respecter sa volonté, le témoignage de la famille est demandé.

« L’ordre de primauté à respecter est le suivant :

« a) Le partenaire de vie ;

« b) Les enfants majeurs, conjointement ;

« c) Les parents, conjointement ;

« d) Les frères et sœurs, conjointement ;

« e) Les neveux et nièces, conjointement ;

« f) Les oncles et tantes, conjointement ;



« g) Les cousins et cousines, conjointement. »


TITRE II

Établir le droit à l’aide active à mourir


Article 5

La section 3 du chapitre préliminaire du titre Ier du livre Ier de la première partie du code de la santé publique est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :

« Sous-section 3

« Aide active à mourir

« Art. L. 1110-18. – Toute personne capable, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, peut demander à bénéficier, dans les conditions prévues au présent code, d’une aide active à mourir.

« L’aide active à mourir est entendue comme d’une part l’euthanasie, qui est le fait par un médecin de mettre fin intentionnellement à la vie d’une personne à la demande expresse de celle-ci, et d’autre part le suicide médicalement assisté, qui est la prescription par un médecin à une personne, à la demande expresse de celle-ci, d’un produit létal et l’assistance à l’administration de ce produit par un médecin ou une personne agréée.

« Art. L. 1110-19. – Lorsqu’une personne capable, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, demande à son médecin le bénéfice d’une aide active à mourir, celui-ci doit s’assurer de la situation dans laquelle se trouve la personne concernée.

« Après examen du patient, étude de son dossier médical et, s’il y a lieu, consultation de l’équipe soignante, le médecin fait appel, pour l’éclairer, dans un délai maximum de quarante-huit heures, à un autre médecin accepté par la personne concernée ou sa personne de confiance.

« Les médecins vérifient le caractère libre, éclairé, réfléchi et explicite de la demande présentée, lors d’un entretien au cours duquel ils informent l’intéressé des possibilités thérapeutiques ainsi que des solutions alternatives en matière d’accompagnement définies notamment à l’article L. 1110-9.

« Les médecins peuvent, s’ils le jugent souhaitable, renouveler l’entretien dans les quarante-huit heures.



« Les médecins rendent leurs conclusions sur l’état de l’intéressé dans un délai de quatre jours ouvrés à compter de la demande initiale du patient.



« Lorsque les médecins constatent la réalité de la situation médicale, l’impasse thérapeutique dans laquelle se trouve la personne ainsi que le caractère libre, éclairé, réfléchi et explicite de sa demande, l’intéressé doit, s’il persiste, confirmer sa volonté de bénéficier d’une aide active à mourir, le cas échéant, en présence de la personne de confiance qu’il a désignée.



« Le médecin est tenu de respecter cette volonté.



« L’aide active à mourir ne peut avoir lieu avant l’expiration d’un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande, sauf si le médecin estime que le respect de ce délai est incompatible avec la préservation de la dignité du patient et que ce dernier demande d’abréger ce délai.



« L’intéressé peut, à tout moment, et par tout moyen, révoquer sa demande.



« Art. L. 1110-20. – Lorsqu’une personne majeure, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, infligeant une souffrance physique ou psychique inapaisable ou qu’elle juge insupportable, se trouve dans l’incapacité d’exprimer une demande libre et éclairée, elle peut bénéficier d’une aide active à mourir, à la condition que cette volonté résulte de ses directives anticipées.



« Après examen du patient, étude de son dossier médical et, éventuellement, consultation de l’équipe médicale soignante, le médecin fait appel pour l’éclairer à un autre praticien de son choix. Le médecin établit, dans un délai de quatre jours à compter de leur saisine pour avis, un rapport indiquant si la situation médicale de la personne concernée correspond aux conditions exprimées dans ses directives anticipées, auquel cas elles doivent impérativement être respectées.



« Lorsque le rapport conclut à la possibilité d’une aide active à mourir, la personne de confiance désignée dans les conditions prévues à l’article L. 1111-6, si elle existe, doit confirmer la volonté du patient. En cas de confirmation, le médecin est tenu de respecter cette volonté. L’acte d’aide active à mourir ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de deux jours à compter de la date de confirmation de la demande.



« Art. L. 1110-21. – Aucun professionnel de santé n’est tenu d’apporter son concours à la mise en œuvre de l’aide active à mourir. En cas de refus, le professionnel de santé doit informer sans délai le patient de ce refus et, dans un délai de deux jours à compter de la demande, s’être assuré de l’accord d’un autre praticien, lui avoir transmis le dossier médical et avoir communiqué son nom au patient.



« Art. L. 1110-22. – Il est institué auprès du ministre chargé de la justice et du ministre chargé de la santé une Commission nationale de contrôle des pratiques en matière d’aide médicale à mourir. Il est institué dans chaque région une commission régionale de contrôle des pratiques en matière d’aide médicale à mourir, présidée par le représentant de l’État dans la région ou par son représentant.



« La commission régionale est chargée de contrôler, chaque fois qu’elle est rendue destinataire d’un rapport d’aide médicale à mourir, le respect des exigences légales. Si ces exigences ont été respectées, aucune poursuite ne peut être exercée sur les fondements de l’article 221-3, du 3° de l’article 221-4 et de l’article 221-5 du code pénal à l’encontre des personnes ayant apporté leur concours à une aide médicale à mourir.



« Lorsqu’elle estime que ces exigences n’ont pas été respectées ou en cas de doute, la commission régionale transmet le dossier à la Commission nationale et peut transmettre le dossier au procureur de la République.



« Les règles relatives à la composition ainsi qu’à l’organisation et au fonctionnement des commissions mentionnées au premier alinéa du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. Les membres de ces commissions ne peuvent recevoir aucune rémunération en raison de leur appartenance à ces commissions.



« Art. L. 1110-23. – Dans un délai de huit jours ouvrables à compter du décès, le médecin qui a apporté son concours à l’euthanasie ou au suicide médicalement assisté adresse à la commission régionale de contrôle des pratiques en matière d’aide médicale à mourir un rapport exposant les conditions du décès. À ce rapport sont annexés les documents qui ont été versés au dossier médical ainsi que les directives anticipées ; la commission régionale contrôle la validité de la procédure. Le cas échéant, elle transmet le dossier à l’autorité judiciaire compétente.



« En cas de pronostic vital engagé à très brève échéance, le médecin peut, après en avoir informé la commission régionale, qui peut dépêcher auprès de lui un médecin-conseiller, ramener l’ensemble de la procédure à quatre jours.



« Art. L. 1110-24. – Est réputée décédée de mort naturelle la personne dont la mort résulte d’une aide active à mourir mise en œuvre selon les conditions et procédures prescrites par le présent code. »


TITRE III

Garantir un accès universel aux soins palliatifs et d’accompagnement


Article 6

L’article L. 1110-9 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Après le mot : « droit », il est inséré le mot : « universel » ;

2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Chaque département, région et collectivité d’outre-mer est pourvu d’unités de soins palliatifs en proportion du nombre de ses habitants.

« Les établissements de santé publics, privés d’intérêt collectif et privés assurent l’accès à des soins palliatifs. »

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