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N° 110

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès-verbal de la séance du 5 décembre 1995.

PROPOSITION DE LOI

tendant à créer une commission départementale d'appel

pour les décisions des architectes des bâtiments de France,

PRÉSENTÉE

Par M. Joseph OSTERMANN,

Sénateur.

(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Urbanisme. - Architectes des bâtiments de France - Monuments historiques - Patrimoine Permis de construire .

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

La proposition de création d'une commission d'appel des décisions des architectes des bâtiments de France, en application de la loi de 1913 sur les monuments historiques et de la loi de 1990 sur la protection des sites, répond à une nécessité d'ordre pratique et à un besoin d'amélioration de l'état de droit.

L'idée n'est pas de mettre en cause l'utilité des architectes des bâtiments de France dont la grande compétence et l'indépendance est reconnue par tous. Cependant, ce corps de fonctionnaires se trouve dans une situation particulière et sans équivalent dans la fonction publique : ses décisions sont sans appel.

En effet, l'architecte des bâtiments de France dispose d'un large pouvoir pour apprécier la compatibilité de tout projet avec l'objectif de protection et de mise en valeur des monuments historiques et de leurs abords dont il a la charge.

Ce pouvoir n'est certes pas arbitraire puisqu'il s'exerce sous le contrôle du juge administratif. Cependant, en raison de la subjectivité que présente l'appréciation de la situation fort diversifiée des monuments classés, il semble indispensable, avant de saisir le juge, d'avoir la possibilité de former un recours amiable contre les avis négatifs émis localement par les architectes des bâtiments de France devant une commission d'appel, d'autant que la décision du juge ne porte pas sur le fond mais uniquement sur la forme.

Il est, en effet, très difficile de contester les avis émis par les architectes des bâtiments de France. Ainsi, le maire, s'il est en désaccord avec cet avis, peut uniquement demander au ministre chargé de l'urbanisme d'exercer son pouvoir d'évocation. Quant au simple particulier, dont le permis de construire a été refusé, il ne peut que saisir le juge administratif qui contrôlera alors la décision de l'architecte et là encore le juge ne pourra se prononcer que sur la forme sans aborder le problème sur le fond. De plus, dans une zone de protection du patrimoine architectural et urbain, le propriétaire demeure privé de tout recours administratif contre une décision de refus du permis de construire.

Cette situation n'est donc pas satisfaisante. Les décisions des architectes des bâtiments de France comme n'importe quelle décision administrative, doivent pouvoir faire l'objet d'un recours amiable, le recours contentieux ne devant intervenir qu'en dernier lieu.

La possibilité de faire appel devant une instance collégiale permettrait d'obtenir un arbitrage en cas de conflit et surtout favoriserait l'instauration d'« un dialogue qui fait actuellement bien souvent défaut entre les élus et les architectes des bâtiments de France. En outre, elle améliorerait la qualité du service rendu et comblerait une lacune de notre système juridique.

La composition de cette commission d'appel donnerait l'assurance d'une réelle impartialité. Son avis pourrait se substituer à celui des architectes des bâtiments de France.

Le coût des procédures étant financé par les auteurs des recours évitera les appels abusifs et de nouvelles charges pour le budget de l'État.

Tel est l'objet de la proposition de loi, que nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article premier.

II est inséré, après l'article 72 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État, un nouvel article ainsi rédigé :

« Art. 72-1. -Il est institué dans le ressort de chaque département, une commission départementale d'appel pour les décisions des architectes des bâtiments de France. »

Art. 2.

Cette commission, créée par arrêté préfectoral, est composée de huit membres : trois maires, deux personnes particulièrement qualifiées en matière d'urbanisme, de protection des paysages et de conservation des monuments, un architecte désigné par l'Ordre, l'architecte des bâtiments de France et le directeur départemental des affaires culturelles.

La présidence est assurée par le préfet, membre de droit, ou son représentant.

Art. 3.

Cette commission peut être saisie par le maire ou l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire qui conteste l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France concernant les travaux situés dans une zone de protection du patrimoine architectural et urbain ou dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit aux termes de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques.

Elle peut également être saisie par le maire, l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire ou l'autorisation de démolir, ou le propriétaire concerné, lorsque l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France constate la non-conformité d'une demande de permis de construire ou d'autorisation spéciale de travaux, à un plan de sauvegarde et de mise en valeur du type visé à l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme.

Elle émet alors un avis qui se substitue à celui de l'architecte des bâtiments de France.

Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État.

Art. 4.

Les dépenses induites par le fonctionnement de cette commission seront financées par un droit perçu sur chaque recours d'un montant de deux mille cinq cents francs, à déposer au Trésor, au moment du recours.

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