N°425

SENAT

SESSION ORDINAIRE DE 1997-1998

Annexe au procès-verbal de la séance du 12 mai 1998.

PROPOSITION DE LOI

tendant à compléter la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 en matière de communication audiovisuelle extérieure de la France,

PRÉSENTÉE

Par MM. Charles de CUTTOLI, Paul d'ORNANO et Mme Paulette BRISEPIERRE,

Sénateurs.

(Renvoyée à la commission des Affaires culturelles, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement.)

Audiovisuel. - Conseil supérieur des Français de r et ranger.

EXPOSÉ DES MOTIFS

MESDAMES, MESSIEURS,

Dans le contexte de la mondialisation des échanges et de la construction de l'Union européenne, la politique radiophonique et audiovisuelle extérieure de la France prend une importance capitale.

Notre pays a besoin de l'imagination, de l'esprit d'entreprise et d'innovation des Français de l'étranger pour développer notre civilisation, notre culture et notre économie tant dans les pays où la France a une influence résultant de l'Histoire comme en Afrique ou au Proche-Orient, que sur les nouveaux marchés asiatiques. Ce développement passe par une adaptation et un renouveau continu de nos moyens de communication extérieurs. Les pays anglo-saxons, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis d'Amérique et notre voisin allemand ne s'y trompent pas qui ont accru sensiblement leurs moyens de diffusion et de programmation radiophoniques et audiovisuels ces dernières années, comme des vecteurs de progrès économique.

Le monde n'en est plus seulement à l'ère de l'écrit, ni même des ondes courtes dont certains affirment qu'elles seraient en voie de dépérissement, mais à celui du satellite, du numérique et d'Internet. Notre pays doit sans cesse s'adapter à cette nouvelle donne de la communication et des échanges pour rester à la fois compétitif et attractif.

C'est la raison pour laquelle les sénateurs représentant les Français établis hors de France et le Conseil supérieur des Français de l'étranger (CSFE) se sont toujours souciés de notre réseau radiophonique et audiovisuel à l'étranger. Rappelons que le Conseil supérieur des Français de l'étranger est élu au suffrage universel direct par nos compatriotes résidant hors de France. L'article 1 er A de la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 l'institue «Assemblée représentative des Français établis hors de France».

Les sénateurs des Français de l'étranger et le CSFE ont toujours soutenu les efforts de redressement et de développement de Radio-France Internationale. A leur initiative, tant dans la loi du 29 juillet 1982 que dans celle du 30 septembre 1986, des dispositions spécifiques ont prévu l'intervention des Français de l'étranger en matière de communication et la satisfaction de leurs besoins d'information.

L'article 44-5° prévoit la consécration législative de RFI et sa double mission :

- la diffusion internationale et la production d'oeuvres et documents radiophoniques destinés à la distribution internationale. Ces émissions ou productions ne s'adressent pas spécifiquement aux Français de l'étranger mais sont plus généralement destinées aux pays étrangers dans lesquels ils vivent ;

- la programmation d'émissions spécialement destinées aux Français de l'étranger.

Le Sénat a, d'ailleurs, toujours désigné un sénateur représentant les Français établis hors de France pour le représenter et exercer son contrôle au sein du conseil d'administration de RFI.

La réforme de la politique audiovisuelle extérieure de la France est en discussion depuis plusieurs années. Pas moins de cinq rapports lui ont été récemment consacrés et le précédent projet de loi sur la réforme de l'audiovisuel dont la discussion a été interrompue par la dissolution de l'Assemblée nationale comportait plusieurs dispositions réformatrices. Le Gouvernement vient d'arrêter ses orientations dans ce domaine, à la suite d'une communication du ministre des Affaires étrangères au Conseil des ministres du 30 avril 1998.

Le développement de l'action de RFI comme celui de TV5, CFI, suppose que l'Etat dégage les moyens nécessaires à leur fonctionnement et à leurs investissements indispensables pour un élargissement d'audience.

C'est précisément sur ce point que les précédentes tentatives de réforme ont achoppé, ces dernières années, RFI notamment faisant l'objet d'une réduction annuelle des crédits votés dans le cadre de plusieurs mesures dites de « régulation budgétaire ».

On veut espérer que l'abondement annoncé de 130 millions de francs apportera à notre système audiovisuel extérieur la «respiration » dont il a besoin. La restructuration du « pôle radiophonique » avec le rattachement partiel de la Somera à RFI a permis une rationalisation des moyens et des efforts de diffusion. Les orientations prévues en ce qui concerne le pôle audiovisuel prévoyant un renforcement de TV5 et la redéfinition des missions de CFI auront un impact positif, de même la redéfinition des aides de l'Etat et du dispositif envisagé en matière d'aide au commerce extérieur pour les productions audiovisuelles.

La réforme de la politique audiovisuelle ne doit pas rester qu'une oeuvre administrative ni dépendre du seul pouvoir exécutif. La réforme doit s'inspirer des principes démocratiques : les Français de l'étranger qui sont «acteurs» sur le terrain, doivent y être associés, par l'intermédiaire de leurs représentants élus.

Des informations de presse indiquaient récemment que le futur projet de loi sur l'audiovisuel ne comporterait aucune disposition sur l'audiovisuel extérieur. Il serait inenvisageable que la réforme de l'audiovisuel extérieur se fasse exclusivement par voie administrative ou par de simples négociations entre « techniciens ». C'est, en effet, la loi qui fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens par l'exercice des libertés publiques. Il a été rappelé à plusieurs reprises par le Conseil constitutionnel, que le régime de la communication audiovisuelle entrait bien dans cette définition des libertés publiques à organiser et à garantir par la loi.

C'est pour favoriser ce débat démocratique et parlementaire sur la réforme de l'audiovisuel extérieur de la France que nous avons déposé la présente proposition.

Elle complète la loi du 30 septembre 1986 par un article 56-1 (nouveau) qui prendrait place dans le chapitre de cette loi consacré au secteur public de l'audiovisuel et donc aux sociétés nationales de programme, pour fixer les modalités de leur organisation, ainsi que leurs droits et obligations.

Le premier alinéa de l'article 56-1 nouveau proposé est d'ordre général. Comme de nombreuses lois récentes, il pose le principe selon lequel «le développement de la communication radiophonique et audiovisuelle extérieure de la France est un objectif d'intérêt national ». Cet alinéa fixe une orientation qu'il appartient au législateur de préciser par des dispositions concrètes, notamment par les alinéas suivants de notre proposition.

Le deuxième alinéa de la proposition rappelle l'obligation qu'ont les sociétés de programme appartenant au secteur public audiovisuel de concourir au développement de la communication audiovisuelle extérieure de la France. Il s'agit d'un principe général dont les modalités sont fixées par les cahiers des charges des différentes sociétés parmi lesquelles celles de RFI auront un contenu plus direct et concret.

Le troisième alinéa crée un lien institutionnel entre RFI et l'Assemblée représentative des Français à l'étranger qu'est le CSFE en faisant obligation à RFI de présenter chaque année un rapport sur l'évolution de la communication radiophonique extérieure. Cette obligation légale est particulièrement opportune pour l'information des représentants élus des Français de l'étranger, pour la préparation des avis, voeux ou motions que le CSFE peut être amené à présenter aux pouvoirs publics dans ce domaine. Cette obligation facilitera les rapports et un dialogue opportun, insuffisant actuellement faute de structures appropriées, entre RFI et les représentants des usagers que sont les membres du CSFE, d'ailleurs usagers eux-mêmes. Pour favoriser cette interaction, et éviter de confiner l'élaboration de la politique audiovisuelle extérieure de la France à un univers de « techniciens », parfois détachés des réalités concrètes, nous proposons que toute révision du cahier des charges de RFI soit soumise à l'avis préalable du CSFE ou de son bureau permanent dans l'intervalle des sessions ; une telle mesure avait déjà été adoptée par le Sénat à l'unanimité, lors des travaux préparatoires de la loi du 30 septembre 1986 mais l'amendement n'avait pas été retenu en commission mixte paritaire.

Le dernier alinéa de notre proposition rappelle enfin la compétence consultative générale du CSFE, telle qu'elle a été consacrée par l'article 1 er A de la loi n° 82-471 modifiée le 7 juin 1982, inséré dans cette loi par l'article 1 er de la loi n° 90-384 du 10 mai 1990. Cette compétence auprès des pouvoirs publics s'exerce évidemment dans le domaine de l'audiovisuel. Pour éviter tout doute à ce sujet, le dernier alinéa de notre proposition inclut spécifiquement cette matière dans la compétence consultative du Conseil supérieur. En outre, il a paru utile d'instaurer des liens institutionnels entre le CSFE et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA). Nous proposons que le CSA puisse consulter le CSFE ou son bureau permanent en matière audiovisuelle et qu'à l'inverse, le CSFE se voie expressément reconnaître le droit de saisir le CSA de tout avis, voeu ou réclamation concernant l'audiovisuel extérieur de la France. Rappelons que c'est la loi du 30 septembre 1986 qui détaille les personnes habilitées à saisir le CSA de réclamations.

Ces orientations sont conformes aux voeux réitérés du Conseil supérieur des Français de l'étranger, qui depuis plusieurs années a toujours demandé une meilleure association des représentants élus des Français de l'étranger à l'élaboration de la politique de communication audiovisuelle extérieure de la France.

Tels sont les motifs de la présente proposition que nous vous demandons, Mesdames et Messieurs, de bien vouloir adopter.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après l'article 56 de la loi n° 86-1067 du 3 septembre 1986, il est inséré un article 56-1 (nouveau) rédigé comme suit :

« Art. 56-1 . - Le développement de la communication radiophonique et audiovisuelle extérieure de la France est un objectif d'intérêt national.

« Les sociétés nationales de programme et la société visée à l'article 45 participent à l'effort de développement de la culture et de l'économie françaises à l'étranger dans les conditions prévues par leur cahier des charges.

« Le Conseil supérieur des Français de l'étranger ou son bureau permanent dans l'intervalle des sessions est obligatoirement consulté sur les dispositions du cahier des charges de la société nationale de radiodiffusion mentionnée au sixième alinéa (5°) de l'article 44. Cette société présente chaque année au Conseil supérieur des Français de l'étranger un rapport sur l'évolution de la communication radiophonique extérieur de la France et sur les émissions à destination des Français à l'étranger.

« Conformément à l'article 1 er A de la loi n° 82-471 du 7 juin 1982 modifiée, le Conseil supérieur des Français de l'étranger adopte des avis, des voeux ou des motions sur la communication audiovisuelle extérieure de la France et sur les émissions destinées aux Français de l'étranger. Il peut être également consulté par le Conseil supérieur de l'audiovisuel ou présenter à ce dernier tous avis, voeux ou réclamations dans ce domaine. »

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