La commission des finances du sénat approuve et amende la proposition de loi organique relative aux lois de finances

Réunie le mardi 29 mai sous la présidence de M. Jacques Oudin (RPR – Vendée) puis de M. Bernard Angels (Soc. - Val d’Oise), la commission des finances du Sénat a adopté le rapport de son Président, Alain Lambert (UC – Orne), tendant à approuver la proposition de loi organique relative aux lois de finances adoptée par l’Assemblée nationale le 9 février dernier.

La commission des finances a approuvé les principes fondamentaux de la proposition de loi déposée par Didier Migaud (PS – Isère) : budgétisation par objectifs (orientée vers des résultats), passage à une comptabilité de l’Etat en droits constatés, renforcement des prérogatives du Parlement. Elle a néanmoins amendé le texte dans deux directions :

-  celle de l’exhaustivité et de la lisibilité des comptes publics

-  celle de la mise en place de mécanismes de nature à engager la réforme de l’Etat.

1. L’exhaustivité et la lisibilité des comptes publics

La commission a proposé à ce titre :

-  De renforcer l’universalité des lois de finances, en prévoyant de soumettre à conditions les affectations d’impôt de l’Etat à des tiers, afin que le législateur financier conserve en la matière ses compétences.

- De détailler davantage la nomenclature des titres, tout en maintenant leur caractère indicatif. Il ne s’agit pas de remettre en cause la fongibilité des crédits, mais que soient clairement énoncés les moyens des politiques publiques à des fins de lisibilité et de " traçabilité ".

-  D’évaluer les fonds de concours en loi de finances initiale. Ils financent en effet des dépenses qui doivent être autorisées par le Parlement.

-  D’insérer dans la loi organique un chapitre relatif aux comptes de l’Etat, consacrant notamment la mise en place d’une comptabilité d’exécution en droits constatés, et l’obligation pour les administrations de mettre en place une comptabilité destinée à l’analyse précise de leurs coûts.

La commission propose également de prévoir le principe de la mise en place d’une procédure d’établissement du référentiel comptable de l’Etat, dont le détail sera renvoyé à une loi de finances. Il est en effet important que toutes les parties intéressées – administrations, Parlement, experts-comptables- participent à cette élaboration.

-  De reconnaître l’existence des prélèvements sur recettes.

Certaines impositions transitent par le budget de l’Etat, alors qu’elles sont dues à d’autres personnes. Il en est ainsi d’une grande partie des ressources des collectivités locales et de l’Union européenne que l’Etat recouvre mais qu’il doit ensuite rétrocéder.

-  De demander la traduction de l’équilibre budgétaire selon les conventions de la comptabilité nationale. Celle-ci est en effet le langage comptable des engagements européens de la France au titre du pacte de stabilité et de croissance.

-  De créer un compte des pensions de l’Etat, qui fasse l’objet d’un vote au sein de la loi de finances, et qui devrait permettre d’identifier clairement le poids financier des pensions.

-  De créer un compte de la dette de l’Etat retraçant les effets de la gestion de la dette. Ce compte viendra compléter l’autorisation en loi de finances des opérations de trésorerie, et celle du financement de l’Etat. Sur ce sujet, la commission propose d’intégrer à la loi de finances un vote sur la variation de la dette de l’Etat entre le 1er janvier et le 31 décembre de l’année (" plafond de la dette "). Ce vote viendra compléter celui portant sur l’équilibre du budget. Des votes devront également intervenir pour autoriser les reprises de dette et les engagements en garantie.

-  La commission propose aussi la réhabilitation de la loi de règlement, qui doit devenir le moment fort de l’examen des comptes de l’Etat et de ses performances. Elle propose à ce titre de prévoir que la loi de règlement de l’année n – 1 devra être examinée avant la loi de finances de l’année n +1.

-  Enfin, la commission des finances propose d’affirmer plus solennellement la nécessité de mieux prendre en compte la pluriannualité. Cette pluriannualité doit simplifier la gestion de la dépense : les reports de crédits doivent être encadrés mais assouplis, à l’exception des crédits de personnel. La pluriannualité doit aussi être la dimension dans laquelle le Gouvernement doit présenter ses contraintes et orientations budgétaires.

2. Créer des mécanismes tendant à engager la réforme de l’Etat.

La commission des finances fait une série de propositions dans ce domaine :

-  Des missions pourront être interministérielles. Ce choix restera cependant à la discrétion du Gouvernement.

-  Afin que les programmes créés correspondent bien à la définition qui leur sera donnée par la loi, la commission propose la création d’une autre unité de spécialité, celle de dotation, regroupant des crédits ne pouvant faire l’objet d’un véritable programme, tels que les crédits pour dépenses accidentelles ou la provision pour majoration des salaires de la fonction publique.

-   L’architecture des missions, des programmes et des indicateurs de performances sera un élément important du débat d’orientation budgétaire, afin que le Parlement soit consulté, en amont, sur nomenclature de la prochaine loi de finances.

-  La deuxième partie de la loi de finances (les dépenses de l’année) donnera lieu à un débat et à un vote pour chaque mission. La commission propose d’éviter les votes par ministère, afin de se centrer sur les objectifs et résultats de chaque politique publique.

-  La commission propose également de voter en une seule fois le plafond du nombre d’emplois publics, détaillé par ministère pour introduire un débat sur les emplois rémunérés par l’Etat.

-  Enfin, la commission des finances du Sénat propose l’insertion dans la loi organique d’un titre relatif à l’information et au contrôle. L’information associée au débat d’orientation budgétaire et aux différents projets de loi de finances serait complétée de manière à ce que le Parlement ait une vue d’ensemble des finances publiques (Etat, sécurité sociale, collectivités locales) pour le présent et à moyen terme, exprimée en termes de comptabilité nationale. Le chapitre relatif au contrôle reprendrait pour l’essentiel le droit existant en l’érigeant au niveau organique. Ce droit serait complété de dispositions portant sur la mission d’assistance de la Cour des comptes au Parlement. Une obligation de réponse des administrations aux observations du Parlement serait instituée.