Communiqué de presse

Paris, le 14 janvier 2004

CP 04/03

Projet de loi portant adaptation de la justice

aux évolutions de la criminalité

examen en deuxième lecture

Consulter le dossier législatif sur le projet de loi grande criminalité :

/dossierleg/pjl02-314.html

Le Sénat est appelé à examiner en deuxième lecture le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. Ce projet de loi, qui tend à modifier profondément notre procédure pénale, afin notamment de définir un cadre spécifique pour lutter contre la criminalité organisée, a été substantiellement modifié et enrichi au cours des travaux parlementaires.

Tandis que l'Assemblée nationale prenait l'initiative d'une importante réforme de l'application des peines, le Sénat a complété le projet de loi pour renforcer la prévention et la répression des infractions sexuelles et a transposé dans notre droit les dispositions de la décision-cadre de l'Union européenne relative au mandat d'arrêt européen.

Le projet de loi initial comportait 87 articles. Après deux lectures à l'Assemblée nationale et une lecture au Sénat, compte tenu des ajouts opérés par chaque assemblée, 101 articles restent en discussion, dont 32 insérés par l'Assemblée nationale lors de la deuxième lecture.

Alors que le processus législatif parvient à son terme, la commission des Lois souhaite que tout soit dès à présent mis en œuvre pour permettre l'entrée en vigueur dans de bonnes conditions du projet de loi. Il convient en particulier que des moyens suffisants soient prévus pour mettre en œuvre la réforme et que celle-ci fasse l'objet d'une information approfondie en direction des acteurs de la procédure pénale.

I. une réforme profonde de la procédure pénale complétée et améliorée par les travaux parlementaires

Le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité à un double objet : il tend en effet d'une part à apporter des réponses spécifiques aux nouvelles formes de délinquance et de criminalité, d'autre part à moderniser la procédure pénale. Les travaux parlementaires ont permis de conforter ces objectifs.

A. le projet de loi initial : la définition attendue d'un cadre spécifique de lutte contre la criminalité et la délinquance organisées

1. La lutte contre les nouvelles formes de délinquance et de criminalité

Pour la première fois, un projet de loi tend à appréhender globalement la criminalité organisée sans se focaliser sur l'une ou l'autre de ses manifestations. Ainsi, l'article premier du projet de loi tend à permettre la mise en œuvre de nouveaux moyens d'investigation pour répondre à la criminalité et à la délinquance organisées. Parmi ces instruments nouveaux figurent :

l'infiltration, dont l'utilisation serait étendue ;

- un régime spécifique de garde à vue, caractérisé pour la possibilité de prolonger la mesure pendant quatre-vingt seize heures ;

- un régime spécifique de perquisitions ;

- la possibilité d'installer des micros et des caméras dans certains véhicules ou lieux d'habitation pour les nécessités d'une instruction ;

- l'extension des dispositions permettant aux personnes coopérant avec la justice d'obtenir des exemptions ou des réductions de peine (article 3).

Le projet de loi prévoit par ailleurs la création de juridictions interrégionales spécialisées en matière de criminalité et de délinquance organisées, appelées à bénéficier d'une compétence concurrente de celle des juridictions de droit commun.

Pour faciliter la coopération judiciaire internationale, l'article 6 du texte tend notamment à clarifier et simplifier les conditions de transmission et d'exécution des commissions rogatoires internationales et à consacrer dans le code de procédure pénale l'existence d'Eurojust.

La lutte contre les infractions économiques et financières, de santé publique et de pollution maritime serait également renforcée (articles 7 à 10). Ainsi, des juridictions interrégionales seraient créées pour connaître des infractions économiques d'une très grande complexité. La compétence des juridictions spécialisées en matière de pollution maritime serait étendue à de nouvelles infractions tandis que les peines encourues en cas de rejets polluants des navires seraient aggravées.

Enfin, le projet de loi vise à renforcer la lutte contre les discriminations, notamment en aggravant les peines encourues pour ces délits et en instituant une circonstance aggravante lorsque la discrimination est commise à l'occasion de l'exploitation d'un lieu accueillant du public (article 14).

2. La mise à jour de la procédure pénale

Si la criminalité organisée constitue un objet important du projet de loi, ce dernier tend par ailleurs à apporter des modifications substantielles au droit pénal et à la procédure pénale.

Il prévoit ainsi la création d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, permettant au procureur de la République de proposer une peine à une personne qui reconnaît les faits qui lui sont reprochés. En cas d'acceptation, aucun procès n'aurait lieu devant le tribunal correctionnel, mais la peine devrait faire l'objet d'une homologation par le président du tribunal (article 61).

Le projet de loi tend en outre à consacrer le rôle du ministre de la justice en matière de politique d'action publique et à clarifier les relations entre le ministre, les procureurs généraux et les procureurs de la République (articles 17 à 19).

De nombreuses règles relatives aux enquêtes et aux instructions seraient également modifiées. Ainsi, la durée de l'enquête de flagrance pourrait être étendue de huit à quinze jours (article 26) ; un cadre général serait en outre défini en matière de réquisitions judiciaires pour permettre aux officiers de police judiciaire de solliciter la remise de documents intéressant une enquête (article 28).

Enfin, le projet de loi tend également à moderniser les règles relatives aux jugements des crimes et délits, par exemple en supprimant la procédure de contumace, régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme (article 66).

B. Un texte enrichi par les travaux parlementaires

La première lecture du projet de loi à l'Assemblée nationale et au Sénat a permis d'enrichir ce texte de nombreuses dispositions importantes.

1. Une profonde réforme de l'application des peines

A l'initiative de M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des Lois et auteur d'un rapport au garde des Sceaux sur les courtes peines d'emprisonnement et les alternatives à l'incarcération, l'Assemblée nationale a complété le projet de loi pour réformer  en profondeur les règles relatives à l'application des peines.

Elle a notamment prévu de définir dans le code de procédure pénale les principes généraux de l'application des peines, de renforcer les dispositions permettant l'aménagement des courtes peines d'emprisonnement et de transformer le système des réductions de peine en un crédit de réductions de peine attribué dès l'entrée en détention et pouvant être remis en cause en cas de mauvaise conduite du condamné.

Le Sénat a complété ces évolutions en améliorant la cohérence de l'organisation juridictionnelle en matière d'application des peines. Il a ainsi prévu la création d'un tribunal de l'application des peines, dont les décisions pourraient être contestées devant une chambre de l'application des peines de la cour d'appel.

Il a également prévu que la création du crédit de réduction de peine serait accompagné de la possibilité de remettre en cause les réductions de peine en cas de nouvelle condamnation pour une infraction commise pendant une période correspondant à la durée de ces réductions de peine.

2. Le renforcement de la lutte contre les infractions sexuelles

Lors de l'examen en première lecture du projet de loi, le Sénat a souhaité améliorer les dispositions relatives à la lutte contre les infractions sexuelles. Il a ainsi prévu l'allongement de la durée du suivi socio-judiciaire pouvant être ordonné à l'égard de condamnés pour crime ou délit sexuel (article 16 bis B).

Il a surtout complété le projet de loi pour prévoir la création d'un fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS) permettant de conserver les coordonnées des personnes condamnées pour infractions sexuelles et de leur imposer de déclarer leurs changements d'adresse (article 16 bis C).

3. La mise en œuvre du mandat d'arrêt européen

A l'initiative de notre excellent collègue, M. Pierre Fauchon, le Sénat a complété le projet de loi pour transposer dans le code de procédure pénale la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne relative au mandat d'arrêt européen, qui devait être introduite dans notre droit avant le 31 décembre 2003 (article 6).

Le mandat d'arrêt européen, concrétisant pour la première fois le principe de reconnaissance mutuelle des décisions de justice rendues en matière pénale, tend à substituer au mécanisme traditionnel et contraignant de l'extradition un dispositif exclusivement judiciaire, souple et rapide, plus adapté au fonctionnement de l'espace judiciaire européen.

Le Sénat a également décidé d'introduire dans notre droit les dispositions de la convention adoptée en 1995 dans le cadre de l'Union européenne et créant une procédure d'extradition simplifiée. Il a enfin codifié la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition au sein du code de procédure pénale.

4. De nombreux autres compléments

A l'initiative de l'une ou l'autre assemblée, d'autres dispositions importantes ont été ajoutées au projet de loi :

- l'Assemblée nationale a souhaité donner un fondement légal à la rémunération des indicateurs ; elle a également prévu d'encadrer les règles relatives au défèrement des suspects à l'issue de leur garde à vue. Le Sénat a ensuite amélioré ces dispositifs ;

- le Sénat, à l'initiative de M. Jean‑Claude Carle et de plusieurs de ses collègues a renforcé les dispositions répressives en matière d'incendies de forêt (articles 10 bis et 10 ter) ;

- à l'initiative de M. Pierre Fauchon, il a souhaité mettre fin au principe de spécialité de la responsabilité pénale des personnes morales en généralisant cette responsabilité pénale (article 16 quater).

II. les travaux de l'Assemblée nationale en deuxième lecture

En deuxième lecture, l'Assemblée nationale a apporté de nouveaux compléments au projet de loi et a modifié substantiellement certaines dispositions.

A. De nouveaux compléments au projet de loi

L'Assemblée nationale a apporté de nouveaux compléments importants au projet de loi :

- à l'initiative de M. Alain Marsaud, elle a prévu une modification des règles de placement en détention provisoire en permettant au procureur de la République, pour certaines infractions et sous certaines conditions, de saisir directement le juge des libertés et de la détention de réquisitions de placement en détention provisoire lorsque le juge d'instruction ne saisit pas lui‑même le juge des libertés à cette fin (article 53 bis) ;

- à l'initiative du rapporteur de la commission des Lois, elle a adopté de nouvelles dispositions relatives à l'application des peines, en particulier pour éviter les sorties de prison sans aucun aménagement de peine préalable. Elle a ainsi prévu que le directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation devrait élaborer des propositions d'aménagement de peine pour les condamnés en fin de peine, ces propositions devant être homologuées par le juge de l'application des peines. L'absence de réponse de ce juge dans un délai de trois semaines vaudrait homologation de la proposition (article 68 septdecies) ;

- à l'initiative de M. Jean‑Paul Garraud, l'Assemblée nationale a créé un délit d'interruption involontaire de grossesse pour punir d'un an d'emprisonnement et de 15.000 euros d'amende le fait de causer involontairement l'interruption de la grossesse d'une femme enceinte (article 16 sexies) ;

- enfin, l'Assemblée nationale a apporté d'autres compléments au projet de loi, afin notamment de prévoir une procédure amiable d'indemnisation devant le fonds de garantie des victimes d'infractions (article 68 bis B), de sanctionner les sévices de nature sexuelle contre les animaux (article 16 bis E), de transformer en délits les contraventions de conduite sans être titulaire du permis de conduire ou sans assurance (articles 16 octies et 16 decies).

B. Le rétablissement de dispositions supprimées par le Sénat

En première lecture, le Sénat avait supprimé plusieurs dispositions du projet de loi introduites par l'Assemblée nationale ou figurant dans le projet de loi initial. En deuxième lecture, l'Assemblée nationale les a le plus souvent rétablies. Il en est ainsi :

- de l'allongement à vingt ou trente ans du délai de prescription en matière d'infractions sexuelles (article 24 A) ;

- de la possibilité de remplacer, en cas d'empêchement, le juge des libertés et de la détention (qui doit actuellement avoir au moins rang de vice-président) par un magistrat du siège désigné par le tribunal de grande instance (article 53) ;

- de l'extension de la procédure de l'ordonnance pénale à l'ensemble des délits punis d'une peine inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement (article 60) ;

- de la possibilité pour la cour d'appel de statuer à juge unique en matière d'appel des contraventions de police (article 62 ter).

C. D'importantes modifications des principales dispositions du projet de loi

Dans chacun des principaux chapitres du projet de loi, l'Assemblée nationale a apporté des modifications, parfois importantes, au texte issu des travaux du Sénat :

· En ce qui concerne la criminalité et la délinquance organisées (articles 1er à 5), l'Assemblée nationale a :

- rétabli la possibilité pour un officier de police judiciaire d'étendre sa compétence à l'ensemble du territoire national dans le cadre d'une opération de surveillance, après en avoir informé par tout moyen le procureur de la République (le Sénat souhaitait que l'extension de compétence soit subordonnée à une autorisation du procureur de la République donnée par tout moyen) ;

- prévu qu'une condamnation pourrait être fondée sur les seules déclarations d'un officier de police judiciaire infiltré gardant l'anonymat, à condition que celui-ci ait été confronté au prévenu ou à l'accusé par l'intermédiaire d'un système de communication garantissant l'anonymat du policier infiltré (le Sénat souhaitait que la possibilité de condamner une personne sur le seul fondement de déclarations de policiers infiltrés soit limitée au cas dans lequel les policiers acceptant de lever leur anonymat) ;

- étendu aux mineurs de seize à dix-huit ans le régime de garde à vue prévu par le projet de loi pour les majeurs en matière de criminalité et de délinquance organisées ;

- reporté à la quarante-huitième heure l'entretien avec un avocat au cours de la garde à vue dans certaines matières pour lesquelles cet entretien intervient aujourd'hui à la trente-sixième heure (en première lecture, l'Assemblée nationale avait reporté à la soixante-douzième heure cet entretien, mais le Sénat avait souhaité maintenir le droit actuel) ;

- écarté la possibilité de placer des micros ou des caméras, pour les nécessités d'une instruction, dans une entreprise de presse, un cabinet d'avocat, de médecin, de notaire ou les bureaux et domiciles des parlementaires.

· L'Assemblée nationale a également apporté plusieurs modifications aux dispositions relatives au fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles (article 16 bis C), notamment pour :

- moduler la durée de conservation des informations en fonction de la gravité des infractions commises ;

- prévoir une obligation pour les condamnés pour crime ou délit puni de dix ans d'emprisonnement de justifier de leur adresse deux fois par an ;

- préciser les conditions dans lesquelles les informations peuvent être retirées du fichier avant l'expiration du délai légal de conservation ;

- définir les conditions dans lesquelles les mentions relatives aux condamnations antérieures à la publication de la loi pourront être inscrites au fichier (article 81 sexies).

· L'Assemblée nationale a apporté d'importantes modifications aux dispositions relatives à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, rétablissant pour l'essentiel le texte qu'elle avait adopté en première lecture. Elle a en particulier :

- supprimé tout plafond au montant de l'amende pouvant être proposée par le procureur de la République ;

- prévu que le président du tribunal entendrait la personne poursuivie et son avocat en chambre du conseil et non en audience publique ;

- supprimé la mention ajoutée par le Sénat selon laquelle la personne serait obligatoirement assistée par un avocat.

· Dans toutes les dispositions du projet de loi prévoyant l'information d'un magistrat sur une situation donnée, l'Assemblée nationale a prévu que cette information serait donnée « dans les meilleurs délais » et non « sans délai » comme l'a souhaité le Sénat.

· Enfin, en ce qui concerne les règles relatives à l'application des peines, l'Assemblée nationale est revenue sur plusieurs modifications apportées par le Sénat. Elle a ainsi limité à douze mois le délai d'exécution d'un travail d'intérêt général (actuellement fixé à dix-huit mois), modifié la durée des réductions de peine pouvant être accordées aux condamnés, supprimé la possibilité de retirer à un condamné ses réductions de peine en cas de nouvelle condamnation pour une infraction commise pendant une période égale à la durée de ces réductions de peine.

L'Assemblée nationale a par ailleurs adopté 67 articles sans modification.

III. les propositions de la commission des lois : continuer à œuvrer pour une procédure pénale équilibrée

La commission se félicite qu'un grand nombre des propositions formulées par le Sénat en première lecture aient reçu un accueil favorable de la part de l'Assemblée nationale, qu'il s'agisse de la transposition dans notre droit des règles relatives au mandat d'arrêt européen, de la création d'un fichier judiciaire automatisé des infractions sexuelles ou de la création d'une procédure de défaut criminel pour remplacer la procédure de contumace.

Elle propose à ce stade d'améliorer les dispositions du projet de loi afin de veiller au plein respect de l'équilibre nécessaire entre les droits de la défense et l'efficacité de la procédure pénale.

1. Les nouvelles formes de criminalité

En ce qui concerne la criminalité et la délinquance organisées (articles 1er à 5), la commission propose de :

- prévoir que l'extension à l'ensemble du territoire de la compétence d'un officier de police judiciaire dans le cadre d'une opération de surveillance ne peut se faire que sur autorisation du procureur de la République donnée par tout moyen ;

- rétablir l'interdiction de condamner une personne sur le seul fondement des déclarations de policiers infiltrés sauf dans le cas où ces policiers acceptent de lever leur anonymat ;

- exclure l'application aux mineurs du régime de garde à vue défini par le projet de loi en matière de criminalité organisée. Le texte adopté par l'Assemblée nationale aurait pour effet non seulement de permettre des gardes à vue de quatre jours pour les mineurs, mais aussi de retarder le moment de leur entretien avec un avocat alors qu'il n'existe aucune exception au droit d'un mineur de demander à s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue. La commission propose que la garde à vue de quatre jours ne soit applicable aux mineurs de seize à dix-huit ans que lorsque des majeurs sont également mis en cause. Elle souhaite ne prévoir aucune dérogation au droit du mineur de s'entretenir avec un avocat dès le début de la garde à vue ;

- rétablir le droit pour les personnes gardées à vue pour certains crimes et délits de s'entretenir avec un avocat après trente-six heures de garde à vue alors que l'Assemblée nationale a reporté cet entretien à la quarante-huitième heure de garde à vue.

La commission des Lois propose également de modifier les dispositions relatives à la pollution maritime (article 10). En première lecture, le Sénat a supprimé les peines complémentaires encourues en cas de pollution volontaire, observant que ces peines, conformément à la convention de Montego Bay, ne pourraient s'appliquer qu'aux armateurs français et non aux armateurs étrangers. L'Assemblée nationale a accepté cette suppression, mais a prévu en contrepartie des peines d'amende pouvant atteindre la valeur du navire ou cinq fois la valeur de la cargaison transportée.

L'utilisation de la valeur d'un navire comme critère de fixation du montant des amendes pourrait s'avérer contre-productive et encourager la circulation sur les mers de « navires-poubelles » dépourvus de toute valeur. La commission propose en conséquence de prévoir des amendes fixes tout en les augmentant pour tenir compte de la nécessité de réprimer efficacement des comportements qui causent des dommages irréversibles à l'environnement.

2. Les dispositions relatives à la prévention et la répression des infractions sexuelles

La commission propose de parfaire les dispositions relatives au fichier judiciaire automatisé des infractions sexuelles (article 16 bis C), afin de :

- préciser que le fichier sera tenu par les services du casier judiciaire, cette précision ayant disparu lors de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale ;

- prévoir deux durées de conservation des informations : trente ans pour les crimes et les délits punis de dix ans, vingt ans dans les autres cas. La durée de dix ans prévue par l'Assemblée nationale pour les informations relatives à des délits punis d'une peine inférieure ou égale à cinq ans d'emprisonnement n'apparaît pas suffisante, en ce qui concerne notamment les atteintes sexuelles sur mineur de moins de quinze ans ;

- supprimer l'allongement du délai de prescription en matière d'infractions sexuelles, la spécificité des infractions commises contre les mineurs étant déjà prise en compte par le report à la majorité du point de départ de la prescription et la réforme des délais de prescription devant être engagée de manière globale (article 24 A).

3. Les dispositions relatives à l'enquête et à l'instruction

Comme en première lecture, la commission des Lois propose de maintenir l'obligation d'informer le procureur de la République dès le début d'une mesure de garde à vue et non « dans les meilleurs délais, sauf circonstances insurmontables » comme le souhaite l'Assemblée nationale.

Il est essentiel que le procureur de la République puisse contrôler le déroulement des mesures de garde à vue dans les meilleures conditions possibles. En outre, aucun élément concret n'a été apporté à la commission pour démontrer que les termes actuels du code de procédure pénale ont soulevé des difficultés d'application.

4. Les dispositions relatives au jugement

La commission des Lois propose d'apporter plusieurs modifications aux dispositions relatives à la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (article 61), notamment pour :

- limiter à la moitié de l'amende encourue le montant de l'amende pouvant être proposée par le procureur de la République ;

- prévoir que le président du tribunal entend la personne poursuivie et son avocat en audience publique, mais qu'il peut décider, d'office ou à la demande des parties, de les entendre en chambre du conseil ;

- rétablir la mention précisant que la personne poursuivie ne peut renoncer à son droit d'être assistée par un avocat ;

- clarifier les conséquences d'un échec de la procédure.

Elle propose également de supprimer deux dispositions déjà écartées par le Sénat en première lecture, mais rétablies par l'Assemblée nationale. Il en est ainsi :

- de l'allongement de deux à trois jours du délai pendant lequel une personne peut être placée en détention provisoire avant d'être jugée selon la procédure de comparution immédiate (article 57) ;

- de la possibilité d'appliquer la procédure de l'ordonnance pénale à l'ensemble des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans (article 60).

5. Les dispositions relatives à l'application des peines

Afin de veiller à l'applicabilité des dispositions du projet de loi relatives à l'application des peines, la commission propose :

- de rétablir la possibilité de retirer ses réductions de peine à une personne condamnée pour une infraction commise pendant une période correspondant à la durée des réductions de peine obtenues (article 69 quater) ;

- de maintenir à dix-huit mois le délai maximal d'exécution d'un travail d'intérêt général, que l'Assemblée nationale a ramené à douze mois (article 68 septies) ;

- d'aménager le dispositif prévoyant que le directeur des services pénitentiaires d'insertion et de probation propose des mesures d'aménagement de peine pour les condamnés en fin de peine aux fins d'homologation par le juge de l'application des peines, afin de prévoir que l'absence de réponse de la part du juge de l'application des peines vaut rejet de la proposition. S'il est tout à fait opportun d'associer davantage les services d'insertion et de probation à la préparation des mesures d'aménagement de peines, il paraît souhaitable que le juge décide explicitement d'accorder la mesure proposée (article 68 septdecies).

6. Le délit d'interruption involontaire de grossesse

Cet article ajouté en deuxième lecture par l'Assemblée nationale tendait à sanctionner pénalement des fautes graves à l'origine de l'interruption de la grossesse d'une femme enceinte. Après un large débat, la commission des Lois a estimé que le dispositif n'était pas pleinement satisfaisant et avait suscité trop de divergences d'interprétation pour pouvoir être adopté en l'état. Elle a en conséquence décidé sa suppression (article 16 sexies).

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Le projet de loi sera examiné en séance publique mardi 20 et mercredi 21 janvier 2004.

Contact : Service de presse du Sénat

Bruno LEHNISCH : 01.42.34.25.93/25.13

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