La commission des lois du Sénat a donné, le 20 novembre dernier, un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission "Sécurités" du projet de loi de finances pour 2020.

S’agissant du budget des forces de sécurité, en dépit d’une nouvelle progression à hauteur de 3,7 % en autorisations d’engagement et de 3,9 % en crédits de paiement à périmètre constant, la commission a regretté les choix du Gouvernement, qui poursuit le renforcement des effectifs mais néglige l’amélioration des conditions de travail et d’action opérationnelle des policiers et gendarmes.

Selon Henri Leroy, rapporteur pour avis, la forte augmentation des dépenses de masse salariale, liée à la création de 1 888 emplois supplémentaires et au financement de mesures catégorielles nouvelles, est mal maîtrisée et génère des déséquilibres importants dans l’allocation des moyens budgétaires. Manifestement sous-budgétées, les dotations de fonctionnement et d’investissement sont en effet devenues de véritables variables d’ajustement. Selon le rapporteur, "l’efficacité des forces de sécurité ne dépend pas uniquement de leur nombre, mais également de la qualité de leur équipement. Il est illusoire de penser que l’accent mis sur le recrutement, sans augmentation suffisante des crédits de fonctionnement et d’intervention, suffira à préserver leur capacité d’action au bénéfice de la sécurité de nos concitoyens".

En outre, la forte hausse des effectifs risque d’amener les dispositifs de recrutement et de formation des forces de l’ordre, déjà fortement mobilisés depuis 2015, à saturation. Outre l’insuffisance des moyens alloués aux écoles, il y a lieu de s’inquiéter de l’appauvrissement des viviers de recrutement et de la difficulté à maintenir des niveaux de sélectivité élevés dans les concours de la police et de la gendarmerie.

Catherine Troendlé, rapporteur pour avis des crédits de la sécurité civile, a pour sa part déploré "un budget qui stagne, alors que les crédits budgétaires consacrés à la sécurité civile représentent moins de 2,5 % des crédits alloués à la mission "Sécurités"".

Les attentes et les besoins de la sécurité civile sont, eux, bien présents : les investissements des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) sont toujours en souffrance et la disparition progressive de la dotation de soutien aux investissements structurants des SDIS constitue un véritable "hold-up".

La commission a marqué son inquiétude quant aux incidences de la décision "Matzak" rendue par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), reconnaissant la qualité de travailleur à un sapeur-pompier volontaire belge. Comme l’a indiqué Catherine Troendlé, "le statut du sapeur-pompier volontaire est au cœur du modèle français de sécurité civile. Il doit urgemment être sauvegardé. Or, plus d’un an et demi après ce jugement, aucune solution n’a été mise en œuvre et l’ombre mortifère de cette jurisprudence plane toujours sur le volontariat français".

Selon Philippe Bas, président de la commission : "Le Gouvernement doit donner des réponses précises sur les actions qu’il entend mener au niveau européen, afin que cette jurisprudence ne remette pas en cause un modèle spécifique à la France en matière de sécurité civile, qui a fait la preuve de son efficacité".

Ces crédits seront examinés par le Sénat en séance publique le jeudi 28 novembre 2019.

Philippe Bas (Les Républicains - Manche) est président de la commission des lois./senateur/leroy_henri19729f.html

Henri Leroy (Les Républicains - Alpes-Maritimes) est rapporteur pour avis des crédits de la mission "Sécurités", hors sécurité civile.

Mme Catherine Troendlé (Les Républicains - Haut-Rhin) est rapporteur pour avis des crédits relatifs à la sécurité civile de la mission "Sécurités".

Mathilde Dubourg
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