Alors que la France, ainsi que plusieurs États européens, ont annoncé accompagner la levée du confinement par le lancement d’applications de traçage numérique des contacts, la commission des affaires européennes du Sénat a entendu par visioconférence, lundi 27 avril, M. Wojciech Wiewiórowski, Contrôleur européen de la protection des données (CEPD). Rappelant la croissance exponentielle du volume de données personnelles collectées dans le contexte exceptionnel de l’épidémie de Covid-19, le président de la commission, Jean Bizet, a souligné le rôle éminent du CEPD, autorité indépendante chargée de la protection des données au niveau de l’Union européenne (UE).

Le Contrôleur a précisé que le Règlement général de la protection des données (RGPD) en vigueur depuis deux ans dans l’UE ne s’opposait pas a priori, dans le contexte de gestion de crise, à l’utilisation des technologies numériques et à l’exploitation des données personnelles sous réserve de certaines garanties. Il a estimé que ces technologies ne constituaient pas une solution en elles-mêmes, mais pouvaient être utiles au sein d’une stratégie globale de lutte contre l’épidémie, à condition qu’elles soient un outil de responsabilisation et d’aide à la décision pour les citoyens, et non de stigmatisation, de répression ou de discrimination. C’est pourquoi le CEPD préconise d’écarter le recours à la géolocalisation et de prévoir que l’utilisation des applications de traçage par Bluetooth soit proportionnée, temporaire et réévaluée régulièrement au regard de son efficacité ; qu’elle minimise l’atteinte à la vie privée ; et enfin qu’elle soit volontaire, seule manière selon lui de générer la confiance envers les autorités publiques, qui est la condition nécessaire à la large diffusion de ces applications et donc à leur efficacité pour endiguer l’épidémie.

Tout en appelant à prendre en compte l’hétérogénéité des situations dans les différents pays de l’Union, le Contrôleur s’est félicité du cadre commun élaboré par la Commission européenne et de sa mobilisation pour assurer l’interopérabilité des diverses applications déployées : cette coopération entre États membres est, selon lui, la seule manière de rendre aux citoyens l’Europe qui leur a été "volée" par la fermeture des frontières consécutive à l’épidémie.

Il s’est félicité du contrôle exercé par les sénateurs, ce contrôle parlementaire constituant, avec celui exercé par les autorités de protection des données et celui de la société civile et des ONG, l’un des trois piliers du modèle européen de supervision de la protection des données personnelles. Jean Bizet a conclu : "Seuls des garde-fous communs et une interopérabilité européenne feront du traçage numérique un outil efficace pour sortir l’Union européenne de l’épidémie, tout en assurant la protection des données personnelles de chacun".

M. Jean Bizet (Les Républicains - Manche) est président de la commission des affaires européennes du Sénat.

 L’activité du Sénat se déroule dans le strict respect des conditions sanitaires dictées
par la nécessité d’enrayer la pandémie du Covid 19.

Clothilde LABATIE
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