Question de Mme BIDARD-REYDET Danielle (Seine-Saint-Denis - C) publiée le 27/07/1989

Mme Danielle Bidard-Reydet attire l'attention de M. le ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, sur la grande inquiétude des professeurs d'histoire et de géographie. Lorsque furent mises sur pied des commissions de réflexion sur les contenus, animées par MM. Bourdieu et Gros, des géographes ont été désignés pour faire partie des deux groupes : sciences de la terre et de l'univers d'un côté, histoire, géographie, sciences sociales de l'autre. On aurait pu croire qu'il s'agissait ainsi de favoriser des contacts interdisciplinaires. Mais il apparut très rapidement qu'un des buts recherchés était de disloquer la géographie en deux fragments : on voulait conduire la géographie physique à s'agréger aux sciences de la terre et de l'univers et le reste de la géographie à faire cause commune avec l'histoire et les sciences sociales, comme si la recomposition des champs disciplinaires devait passer par le démembrement de la géographie : les hommes et leurs activités d'un côté, la nature et ses ressources de l'autre. Etrange parodoxe : au moment crucial où elle est amenée à redéfinir son message culturel, la géographie, dont l'un des objectifs centraux est de faire comprendre les liens qui unissent les sociétés et les milieux, se trouve écartelée. Or, l'objet de la géographie est de faire découvrir à la jeunesse la planète humanisée dans sa double composante, naturelle, sociale. A l'avenir, les jeunes voyageront beaucoup, ils rencontreront d'autres paysages et d'autres sociétés. La géographie doit leur permettre de nourrir et de satisfaire leur légitime curiosité. Elle doit leur donner le désir et les capacités de comprendre le vaste monde ; elle doit participer à l'effort de décryptage de la diversité planétaire. Le poids croissant de la population mondiale, le développement des sociétés industrielles et l'urbanisation situent les relations entre l'homme et la nature dans une perspective nouvelle. La question de l'environnement est désormais posée partout et à toutes les échelles. La géographie qui, de tout temps, s'est située au point de rencontre des sciences humaines et des sciences de la nature, est particulièrement bien placée pour préparer le jeune public à une conscience renouvelée et réorientée des rapports entre l'homme et la planète terre. Elle lui demande d'apporter toutes les précisions utiles pour apaiser définitivement cette inquiétude légitime.

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Réponse du ministère : Éducation publiée le 09/11/1989

Réponse. - Le ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports a décidé d'engager une vaste réflexion sur les contenus des programmes pour tenter de déterminer à chaque niveau d'enseignement et pour chaque matière les connaissances exigibles des élèves en évitant toute surcharge inutile dans ce domaine et en insistant sur l'acquisition de méthodes de travail et de raisonnement. Dans ce but, un certain nombre de commissions de réflexion ont été mises en place notamment en histoire-géographie et en sciences de la terre et de l'univers, présidées respectivement par MM. Philippe Joutard, professeur à l'université d'Aix-Marseille et René Blanchet, professeur à l'université de Brest. Ces commissions sont composées d'universitaires, d'enseignants et d'inspecteurs généraux qui y participent à titre personnel et non en tant que représentants d'une quelconque institution. Il convient de préciser que les commissions disposent d'une entière liberté et que les pistes de réflexion qu'elles peuvent être amenées à suivre ne présentent aucun caractère officiel et ne préjugent pas des orientations qui seront arrêtées ultérieurement par le ministre. En tout état de cause, il va de soit que l'enseignement de la géographie n'est aucunement menacé. Le travail de l'ensemble des commissions est coordonné par MM. François Gros et Pierre Bourdieu, professeurs au Collège de France, qui ont élaboré un texte définissant les principes qui devraient à leur avis inspirer les manières de réformer les contenus et donc guider le travail des commissions thématiques. Les orientations contenues dans ce rapport et les conséquences à en tirer en matière d'organisation des filières d'enseignement et de modalité d'évaluation des élèves font actuellement l'objet d'une très large consultation au niveau national. Cette consultation prend la forme d'un questionnaire diffusé à un million d'exemplaires aux partenaires institutionnels du système éducatif, aux établissements scolaires et universitaires, aux élus locaux et à toute personne qui en fait la demande. Les questionnaires, dépouillés par les rectorats, nourriront les débats de colloques régionaux organisés au niveau de chaque académie les 25 novembre, 2 et 9 décembre 1989. Les propositions qui émaneront de ces colloques seront ensuite soumises courant janvier 1990 au Conseil national des programmes dont la création est prévue par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989. Ce conseil est chargé de donner des avis et faire des propositions sur la conception générale des enseignements, les grands objectifs à atteindre, l'adéquation des programmes à ces objectifs et leur adaptation au développement des connaissances. A partir des avis qui seront alors formulés par cette instance, un processus de décision sera mis en oeuvre progressivement en respectant les concertations habituelles.

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