Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE) publiée le 11/10/1990

M. Rodolphe Désiré attire l'attention de M. le ministre des départements et territoires d'outre-mer sur l'intégration de ces régions à l'Europe, suite à la signature de l'Acte unique européen en 1986. Malgré les aides communautaires, dont bénéficient les départements d'outre-mer (D.O.M.) pour leur développement économique, que ce soit dans le cadre du programme d'option spécifique à l'éloignement et à l'insularité des départements d'outre-mer (P.O.S.E.I.D.O.M.) ou des programmes de développement régionaux, elles risquent malheureusement de ne pas compenser les conséquences économiques et sociales que subira inévitablement l'économie de ces régions si jamais la politique d'harmonisation, décidée par Bruxelles, conduit à remettre en cause systématiquement les mesures spécifiques accordées par le Gouvernement français aux D.O.M. Conscient des nombreuses difficultés auxquelles le Gouvernement se heurte pour régler au mieux ce problème, il se demande si la solution actuellement envisageable ne serait pas d'apporter les modifications statutaires nécessaires à la reconnaissance de la spécificité de ces régions ultrapériphériques, ce qui permettrait tout en préservant leur identité de garantir également leur développement économique. Cette demande se justifie d'autant plus aujourd'hui que les changements politiques intervenus en Europe orientale conduiront soit à la renégociation du traité de Rome soit à l'élaboration d'un nouveau traité, et ce à plus ou moins long terme. L'entrée, de facto, de la R.D.A. dans la Communauté économique européenne, suite à la réunification de l'Allemagne, suppose déjà l'adoption d'un régime d'adaptation pour cette partie de l'Europe. Compte tenu de ces nouvelles données, il lui demande si le moment n'est pas venu d'entreprendre des discussions afin d'obtenir des instances communautaires un régime particulier pour toutes les régions ultrapériphériques.

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Réponse du ministère : Départements et territoires d'Outre-mer (DOM-TOM) publiée le 07/02/1991

Réponse. - L'honorable parlementaire appelle l'attention du Gouvernement sur les risques éventuels d'une intégration des départements d'outre-mer à l'espace européen qui pourrait se traduire par une stricte application des textes communautaires ayant pour effet d'harmoniser les politiques nationales et de remettre ainsi en cause les avantages des D.O.M. Alors que la configuration géographique et économique de l'Europe se modifie, il demande si les régions ultrapériphériques de la Communauté, parmi lesquelles les D.O.M., ne doivent pas obtenir un statut particulier au sein de la Communauté qui prendrait mieux en considération leur identité. L'entrée en vigueur de l'Acte unique au 1er juillet 1987 suppose effectivement un approfondissement de l'unité européenne. Une politique d'harmonisation, de rapprochement des réglementations nationales est entreprise pour atteindre cet objectif. Cependant, la Communauté, consciente que les effets des politiques d'harmonisation risquaient d'être préjudiciables aux régions les moins préparées, a voulu compenser les écarts entre régions par des dotations financières importantes destinées au développement économique et social des régions les plus pauvres de l'Europe. Telle est la philosophie de la réforme des fonds structurels, dont la base juridique repose sur les nouveaux articles 130 A et 130 C du traité. Ainsi les départements d'outre-mer recevront, à ce titre, des compensations financières (environ 850 millions d'ECU de 1990 à 1993) afin de les aider à préparer l'échéance du marché unique de 1993. L'intervention massive des fonds structurels, à laquelle il conviendra d'ajouter les dispositions financières du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité des départements d'outre-mer, sera complétée par un volet juridique visant à adapter les réglementations communautaires aux spécificités des départements d'outre-mer. En effet, l'effort financier mis en oeuvre risqueraitde ne pas atteindre l'objectif de rattrapage des retards de développement, si d'un côté, la Communauté adoptait à l'encontre des D.O.M. des dispositions juridiques qui ne tiennent pas compte du fragile équilibre économique et social de ces régions. C'est le message que les autorités nationales ont transmis aux instances communautaires lors des différents memoranda, en insistant en particulier sur l'aspect " adaptation des politiques européennes en faveur des D.O.M. ". Les négociations avec la Communauté ont conduit à l'approbation par le Conseil des communautés européennes du Poseidom, qui comporte certes un volet financier, mais qui est avant tout un texte juridique d'une grande portée. Le Poseidom est la reconnaissance explicite d'un statut particulier des D.O.M. au sein de l'Europe. Il devrait permettre de ne pas tomber dans les travers d'une harmonisation des réglementations qui serait en effet préjudiciable pour les régions d'outre-mer comme le souligne l'honorable parlementaire. D'une certaine manière, le Poseidom est au droit communautaire ce que l'article 73 de la Constitution représente dans l'ordre juridique français. En effet, le Poseidom est la base juridique européenne permettant aux instances communautaires d'obtenir en faveur des D.O.M. des modifications au dispositif juridique européen, sous réserve que celles-ci ne soient pas contraires au Traité. Et à ce titre, Poseidom est le pendant de l'article 73 sur lequel les D.O.M. se fondent légitiment pour bénéficier d'adaptations législatives et réglementaires sous réserve également qu'elles ne soient pas contraires à la Constitution et à ses principes. Le Poseidom est venu conforter l'assise de l'arrêt Hansen-1978 de la Cour de justice des Communautés européennes dans le sens où il reconnaît l'appartenance des D.O.M. à l'Europe tout en indiquant que des dispositions spécifiques pourront être prises afin de prendre en considération leurs particularités. Ce statut qui n'est ni celui du " tout région ou du tout Europe " est très en avance par rapport à celui d'autres îles périphériques de la Communauté qui admet des dérogations au droit communautaire uniquement pour une période transitoire. Par conséquent, il n'est pas dans l'intention du Gouvernement de plaider auprès des instances européennes la mise en oeuvre d'un statut différent, commun à l'ensemble des îles ultrapériphériques et qui pourrait se traduire par un dispositif très en retrait par rapport au Poseidom. Toutefois sur un certain nombre de sujets et lorsque les intérêts desuns et des autres convergent, le Gouvernement compte bien s'appuyer sur les prétentions des régions insulaires pour faire aboutir les dossiers des D.O.M. lors des négociations avec la C.E.E. ; également qu'elles ne soient pas contraires à la Constitution et à ses principes. Le Poseidom est venu conforter l'assise de l'arrêt Hansen-1978 de la Cour de justice des Communautés européennes dans le sens où il reconnaît l'appartenance des D.O.M. à l'Europe tout en indiquant que des dispositions spécifiques pourront être prises afin de prendre en considération leurs particularités. Ce statut qui n'est ni celui du " tout région ou du tout Europe " est très en avance par rapport à celui d'autres îles périphériques de la Communauté qui admet des dérogations au droit communautaire uniquement pour une période transitoire. Par conséquent, il n'est pas dans l'intention du Gouvernement de plaider auprès des instances européennes la mise en oeuvre d'un statut différent, commun à l'ensemble des îles ultrapériphériques et qui pourrait se traduire par un dispositif très en retrait par rapport au Poseidom. Toutefois sur un certain nombre de sujets et lorsque les intérêts desuns et des autres convergent, le Gouvernement compte bien s'appuyer sur les prétentions des régions insulaires pour faire aboutir les dossiers des D.O.M. lors des négociations avec la C.E.E.

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