Question de M. LAURIOL Marc (Yvelines - RPR) publiée le 01/11/1990

M. Marc Lauriol expose à M. le garde des sceaux, ministre de la justice, le cas d'une femme née à Londres en 1945, française par ses père et mère, veuve d'un officier supérieur français décédé le 21 septembre 1990 qui, pour percevoir la pension militaire à laquelle elle a droit, ne parvient pas à prouver sa nationalité française. La nationalité française de son père n'étant pas contestée, la difficulté résulte du fait que le grand-père paternel était Français par naturalisation obtenue en 1922. La preuve de cette naturalisation, dûment administrée, eut été suffisante si ledit grand-père était né hors de France, mais en raison de sa naissance à Paris en 1888 le tribunal d'instance du 17e arrondissement (lieu du domicile de la demanderesse) exige d'ajouter à la preuve de la naturalisation la production d'un extrait d'acte de naissance " avec copie conforme " dudit grand-père et pour l'obtenir de s'adresser au greffe central, bureau de l'état civil. Après avoir suivi cette directive, la demanderesse s'est entendu répondre que " ce service ne fait plus de recherches car il ne dispose que de deux personnes au lieu de vingt ". L'intéressée a néanmoins été invitée à déposer une demande écrite avec enveloppe timbrée pour la réponse, sans précision de délai quant à cette dernière. En l'état de cette situation, il lui demande : 1° Pourquoi on complique à l'infini la preuve de la nationalité des Français d'origine, alors qu'un étranger marié à un Français peut, après six mois, devenir Français sans autre formalité qu'une déclaration facile à produire. 2° Pourquoi la preuve de la nationalité française du père n'étant pas contestée, la preuve de la nationalité du grand-père est exigée alors que la loi (art. 17 du code de la nationalité) déclare qu'est Français l'enfant dont l'un des parents est Français. 3° Pourquoi les services de l'état civil exigent, contrairement à un précédent en 1964 dans le 1er arrondissement, un extrait d'acte de naissance à Paris du grand-père alors que la naturalisation de celui-ci est prouvée et que s'il était né hors de France la preuve de la naturalisation française eut suffi. 4° Comment il peut tolérer que des services relevant de son autorité exigent des pièces qui dépendent d'eux et que, dans le même temps, ils se déclarent incapables de les délivrer par suite d'une carence inadmissible du service. 5° S'il mesure les graves conséquences de cette surprenante incohérence administrative pour les usagers contraints à des démarches innombrables et à des retards fort préjudiciables aux personnes ayant un besoin urgent des sommes auxquelles elles ont droit et qu'elles ne peuvent percevoir en raison de l'incapacité de secrétaires sans aucune compétence juridique et manifestement inaptes à prendre la moindre responsabilité. 6° Comment il peut se faire que sur un dossier compliqué par l'administration elle-même, il soit impossible d'être reçu directement par les juges d'instance qui, pour leur tranquillité, font faire le barrage par leurs services, alors que seuls ils ont compétence pour trancher les cas complexes avec un minimum d'intelligence.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 20/12/1990

Réponse. - Dans le cas particulier soumis par l'honorable parlementaire, et sous réserve d'une étude approfondie du dossier particulier qu'il est invité à soumettre directement aux services de la Chancellerie, au vu des indications fournies, il apparaît que la requérante est susceptible d'être française par filiation, pour être née d'un père possédant lui-même la nationalité française à la suite de la naturalisation de son propre père. Si la production de la copie intégrale de l'acte de naissance du grand-père de l'intéressée n'apparaît pas nécessaire à la solution de ce cas, la preuve de la nationalité française du père de l'intéressée doit toutefois être rapportée, en dehors de toute contestation, conformément à l'article 138 du code de la nationalité française aux termes duquel " la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause ". Née à l'étranger, l'intéressée n'a pu en effet se voir attribuer la nationalité française que par filiation et il lui appartient d'établir à quel titre son père est lui-même français. Cette recherche impose l'examen de la situation de son grand-père. Soucieux des intérêts des demandeurs, les juges d'instance s'efforcent d'instruire avec tout le soin et la diligence nécessaires les nombreuses requêtes qui leur sont soumises. La complexité de la situation de certains intéressés au regard du droit français de la nationalité rend cependant parfois délicate la détermination des preuves à produire. Il est certain qu'à cette occasion des difficultés peuvent surgir.

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