Question de M. SOUFFRIN Paul (Moselle - C) publiée le 24/01/1991

M. Paul Souffrin attire l'attention de M. le Premier ministre sur la politique de la direction du groupe nationalisé Usinor-Sacilor se caractérisant en 1990 par une accentuation de la " croissance externe " du groupe, qui a racheté ou pris des participations majoritaires dans une vingtaine d'entreprises étrangères importantes, américaines, allemandes, italiennes et espagnoles. Le président du groupe a précisé que ces rachats, motivés " par les opportunités qu'il faut savoir saisir ", avaient coûté 6 milliards de francs, le double de ce qui avait été prévu en début d'exercice. Ainsi, le groupe se structure progressivement en un ensemble pyramidal multinational dans lequel, en aval, la première transformation et le négoce dispersés en France et à l'étranger prennent une place dominante par rapport à la filière fonte et acier implantée en France, en amont. Les capacités françaises sont adaptées au niveau le plus bas du marché. Selon M. Mer (Francis), " nous devrons diminuer nos effectifs de 3 p. 100 par an pendant 10 ans d'après les prévisions pour continuer à faire une productivité indispensable à notre survie économique ". Dans le retournement de conjoncture, cette stratégie de la direction d'Usinor-Sacilor aggrave toutes les contradictions et fragilise un peu plus la sidérurgie française : peu d'investissement de capacité, diminution des effectifs qui vieillissent, endettement persistant, importations qui croissent plus vite que les exportations. En conséquence, il lui demande une nouvelle fois de bien vouloir prendre en compte sa proposition d'ouvrir un débat au Parlement sur la situation et l'avenir de ce secteur d'activité, qui compte pour l'économie de notre pays.

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 28/02/1991

Réponse. - Usinor-Sacilor, après les restructurations menées au cours des dix dernières années, est désormais un groupe bénéficiant d'une structure industrielle et financière compétitive, apte à lui garantir un maintien de ses positions concurrentielles dans un environnement de marché devenu sensiblement moins favorable depuis le début du deuxième semestre 1990. L'année 1990 s'est traduite par un retour à un résultat net (3,7 milliards de francs) assez largement comparable à celui de 1988 (4,6 milliards de francs), après une année exceptionnelle en 1989 (7,6 milliards de francs). En dépit de la baisse caractérisée de la demande et des prix sur l'ensemble de ses segments de marché, Usinor-Sacilor a stabilisé sa marge brute d'autofinancement en 1990 au niveau de 1988 (10,2 milliards de francs contre 10,7 milliards de francs), ce qui traduit bien la compétitivité durablement restaurée du groupe et la qualité de sa structure d'exploitation. Le groupe met en oeuvre depuis trois ans des orientations stratégiques qui ont pour objet d'asseoir durablement sa position de deuxième groupe sidérurgique mondial : maintenir en amont un outil industriel hautement productif dans tous les segments d'activité par un flux d'investissement élevé et une réduction constante des coûts de production ; développer les activités de première transformation à plus haute valeur ajoutée afin de mieux répondre aux exigences de plus en plus marquées des secteurs clients (en particulier dans l'automobile) ; sécuriser la base européenne et française du groupe et affirmer dans le même temps une présence internationale plus équilibrée afin de réduire la dépendance par rapport à certains marchés. Ainsi la politique de croissance externe menée depuis 1989 s'est-elle traduite par : un renforcement de la présence industrielle et commerciale en France : (Allevard Industries, Carnaud) ; en Europe une politique sélective de filières cherchant à réduire la vulnérabilité sur certaines lignes de produits, en particulier dans le domaine des produits longs où l'alliance d'Unimétal et Saarstahl, complétée par les accords avec Arbed, crée un ensemble européen de tout premier ordre ; renforcement très significatif de la présence dans la distribution en Europe afin de limiter les fluctuations des débouchés ; une implantation industrielle significative aux Etats-Unis, dans l'inox notamment (J & L, Edgcomb...). Cette politique de présence internationale, de croissance externe sélective et d'intégration vers l'aval est un impératif stratégique, qui s'impose à Usinor-Sacilor comme à ses concurrents. Elle est un facteur essentiel de renforcement du groupe. Le groupe a ainsi été conduit à freiner en 1990 sa politique de désendettement afin de pouvoir financer les acquisitions coïncidant avec ses choix stratégiques. Toutefois, même si la structure actuelle du groupe n'est pas fondamentalement déséquilibrée compte tenu de la forte augmentation desfonds propres intervenue des deux dernières années (30 milliards de francs de fonds propres pour 27 milliards de francs d'endettement à fin 1990), le désendettement reste une priorité dans les années à venir. Enfin, le niveau constaté de la demande et les projections faites sur l'évolution des marchés ne pouvaient en aucun cas conduire, ces dernières années, à décider des investissements de capacité, alors que la sidérurgie européenne reste globalement surcapacitaire. A la suite de plans sociaux mis en oeuvre depuis 1975, et conduisant à l'arrêt de l'embauche, la structure actuelle de la pyramide des âges du groupe est effectivement défavorable. C'est pourquoi, dans le cadre de la convention pour l'emploi dans la sidérurgie qui a été conclue en octobre 1990 avec les partenaires sociaux, la priorité a été accordée à l'embauche de jeunes (1 000/an pour les dix prochaines années) complétée par un dispositif tout à fait novateur de gestion individualisée des carrières. Le groupe Usinor-Sacilor dispose donc désormais, grâce à la mobilisation d'un potentiel humain, technique et industriel de haut niveau de tous atouts pour se maintenir aux tous premiers rangs mondiaux, en dépit d'une conjoncture sidérurgique qui s'annonce sensiblement moins favorable. Un débat au Parlement sur la situation et l'avenir de ce secteur se résumerait sans doute à détailler ce constat. Aussi bien une telle perspective n'entre-t-elle pas actuellement dans les intentions du Premier ministre. ; défavorable. C'est pourquoi, dans le cadre de la convention pour l'emploi dans la sidérurgie qui a été conclue en octobre 1990 avec les partenaires sociaux, la priorité a été accordée à l'embauche de jeunes (1 000/an pour les dix prochaines années) complétée par un dispositif tout à fait novateur de gestion individualisée des carrières. Le groupe Usinor-Sacilor dispose donc désormais, grâce à la mobilisation d'un potentiel humain, technique et industriel de haut niveau de tous atouts pour se maintenir aux tous premiers rangs mondiaux, en dépit d'une conjoncture sidérurgique qui s'annonce sensiblement moins favorable. Un débat au Parlement sur la situation et l'avenir de ce secteur se résumerait sans doute à détailler ce constat. Aussi bien une telle perspective n'entre-t-elle pas actuellement dans les intentions du Premier ministre.

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