Question de M. ROBERT Jean-Jacques (Essonne - RPR) publiée le 23/07/1992

M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de Mme le ministre de la jeunesse et des sports sur le litige qui a opposé une célèbre championne cycliste et sa fédération sportive. Le combat qu'a mené cette championne risque de se renouveler pour d'autres dans le cadre d'un sport professionnalisé en opposant l'individu au pouvoir sportif. Cette cycliste exceptionnelle a mené des recherches afin de découvrir, puis adapter le matériel le plus performant possible. La contraindre à user d'un autre matériel est, au pire, un danger et, en tout cas, un risque d'amoindrissement de ses performances, et plus encore une atteinte à sa liberté. Le tribunal administratif de Paris a annulé la décision qui subordonnait sa sélection en équipe nationale à l'utilisation d'une pédale automatique dont la fédération française de cyclisme s'était attachée l'exclusivité. Ainsi sous couvert de règlements internes, la FFC a enfreint le droit. En effet, un acte réglementaire dont la formulation retient des critères commerciaux est totalement étranger à la mission pour laquelle une fédération a reçu délégation de pouvoir et dont l'objet ne peut être que sportif. Bien qu'elle ait remporté la compétition qualificative pour les jeux Olympiques de Barcelone 1992 et que le temps n'était pas suffisant pour engager une procédure, elle a été contrainte par le Comité national olympique de se soumettre à utiliser le matériel agréé par la fédération afin de pouvoir participer à ces jeux. Devant cette atteinte à la liberté individuelle, il lui demande d'une part si la FFC ne devrait pas s'en tenir aux règlements internationaux et n'interdire à ses athlètes que ce que le règlement olympique interdit à tous. Dès lors que l'emploi de matériel performant n'est pas prohibé, pourquoi par souci d'égalitarisme et de préoccupations vraisemblablement financières, en priver ses meilleurs éléments ? et d'autre part, il lui demande les mesures qu'il compte prendre afin que les sportifs aient les mêmes droits que les citoyens ordinaires.

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Réponse du ministère : Jeunesse et sports publiée le 03/09/1992

Réponse. - Les fédérations qui ont reçu délégation du ministre chargé de la jeunesse et des sports procèdent, en application de l'article 17 de la loi du 16 juillet 1984, aux sélections internationales. Elles pourvoient, dans le cadre du règlement des équipes de France, à la préparation, aux déplacements et à l'équipement de leurs sélections. A cet effet, elles sont amenées à conclure des contrats avec des fournisseurs. Ces contrats peuvent avoir le même objet que les conventions qui lient chaque athlète à un fabricant particulier. Deux types de considérations peuvent permettre d'asseoir pour certains points et lors des épreuves pour lesquelles des sélections ont été effectuées la primauté du contrat conclu par la fédération : la nécessaire identification des sélections nationales implique le port d'un équipement vestimentaire uniforme, fourni par la fédération ; des impératifs techniques peuvent conduire une fédération à imposer un équipement déterminé. Tel est lecas du cyclisme, pour lequel, afin de permettre lors des épreuves courues par les sélectionnés français un dépannage efficace en course, deux systèmes de pédales seulement sont autorisés. Dès lors qu'un sélectionné doit adopter un matériel technique déterminé, ce changement imposé est susceptible d'apparaître comme une contrainte incompatible avec le libre exercice du sport consacré par la loi du 16 juillet 1984. Toutefois, l'affirmation de cette liberté ne constitue pas un principe absolu. A plusieurs reprises, le Conseil d'Etat a eu l'occasion d'affirmer que, dans leur pouvoir de réglementation, " les fédérations pouvaient la limiter mais seulement dans la mesure où ces atteintes n'étaient pas excessives au regard des objectifs poursuivis ". Il entre bien dans les objectifs légitimes de la fédération française de cyclisme de gérer dans les meilleures conditions possibles les sélections nationales qu'elle constitue. Les fédérations exercent cette mission sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir. Il appartient à ce dernier, saisi en appel de cette question de principe, de déterminer si l'obligation réglementaire définie par la fédération française de cyclisme n'est pas excessive au regard des objectifs poursuivis. On ne peut que se féliciter de l'accord intervenu entre la fédération française de cyclisme et la championne concernée ainsi que des résultats obtenus par cette dernière au jeux Olympiques de Barcelone.

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