Question de M. DELEVOYE Jean-Paul (Pas-de-Calais - RPR) publiée le 05/08/1993

M. Jean-Paul Delevoye remercie M. le ministre de l'équipement, des transports et du tourisme de lui indiquer les mesures qu'il entend promouvoir pour lutter contre les conséquences néfastes de l'inflation du contentieux en matière d'urbanisme. Si chacun peut se louer des progrès de l'Etat de droit accomplis ces dernières années, notamment du fait d'une meilleure information du citoyen sur ses droits, la multiplication des litiges met parfois en danger des projets d'aménagement pourtant indispensables. La suspension des travaux entraîne souvent de lourds surcoûts pour les collectivités locales et menace parfois l'avenir même d'entreprises de travaux publics. Il serait donc heureux de réfléchir aux moyens de limiter ceux de ces recours qui présentent un caractère manifestement abusif. Il aimerait connaître en particulier sa position quant à un éventuel relèvement du montant des amendes imposé par les tribunaux dans ces situations et à l'amélioration de leur recouvrement.

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Réponse du ministère : Équipement publiée le 05/05/1994

Réponse. - L'augmentation significative du contentieux administratif dans le domaine de l'urbanisme est un problème sérieux sur lequel l'attention du ministère de l'équipement, des transports et du tourisme a été appelée à de nombreuses reprises. Cette situation, coûteuse aussi bien pour les collectivités locales que pour les particuliers lorsqu'elle conduit notamment à une suspension des travaux, peut s'expliquer, en partie, par des recours engagés abusivement devant la juridiction administrative. Toutefois le droit d'agir en justice, en cette matière comme dans les autres, est compté au nombre des libertés publiques. Afin de concilier ce droit et le devoir général de ne pas nuire volontairement à autrui, les tribunaux administratifs, les cours administratives d'appel et le Conseil d'Etat peuvent condamner la partie dont la requête est jugée abusive à une amende. Le décret no 89-641 du 7 septembre 1989 portant code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, dans son article R-88, fixe à 20 000 francs le plafond de cette amende ; le même plafond est applicable devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux en vertu de l'article 57-2 du décret no 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret no 90-400 du 15 mai 1990. L'institution d'un telle amende est destinée à dissuader, dans l'intérêt notamment d'une bonne administration, ceux qui agiraient par désinvolture et à sanctionner ceux qui abuseraient du service public. Il n'a pas, jusqu'à présent, été envisagé de relever le taux de ces amendes qui sont perçues au profit du Trésor public et dont le recouvrement s'effectue sans difficultés notables. En outre, le défendeur en matière de plein contentieux peut former une demande reconventionnelle en dommages-intérêts pour abus du droit d'agir en justice. Par ailleurs, et bien que les objectifs poursuivis en soient différents, la possibilité ouverte au juge administratif de condamner la partie perdante à des frais irrépétibles est de nature à exercer un effet dissuasif sur les requérants qui sont enclins à plaider systématiquement sans véritable fondement juridique. Mais l'amélioration de la sécurité juridique des acteurs de l'urbanisme passe aussi et surtout par une adaptation des procédures contentieuses aux enjeux en cause. C'est la raison pour laquelle la loi no 94-112 du 9 février 1994 comporte à cet égard deux dispositions innovantes : d'une part, l'article L. 300-3 nouveau du code de l'urbanisme oblige désormais à ce que, sous peine d'irrecevabilité, toute requête dirigée contre une autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol soit notifiée à son auteur et à son bénéficiaire ; d'autre part, réserve faite des vices que le législateur a considérés comme substantiels, cette loi dispose que les vices de forme et de procédure d'un document d'urbanisme ne peuvent plus être invoqués par voie d'exception au-delà d'un délai de six mois. Cette mesure nouvelle ne porte pas atteinte au droit des intéressés d'exercer des recours, mais doit permettre de limiter les risques d'instabilité juridique qui affectent les documents d'urbanisme. Des moyens de lutte contre des recours abusifs sont enfin offerts par des règles de procédure spécifiques comme la procédure préalable d'admission des recours en cassation devant le Conseil d'Etat ; le refus d'admission peut être décidé si le recours paraît irrecevable ou en l'absence de tout moyen sérieux.

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