Question de M. DREYFUS-SCHMIDT Michel (Territoire de Belfort - SOC) publiée le 05/05/1994

M. Michel Dreyfus-Schmidt attire l'attention de M. le Premier ministre sur les conclusions du rapport de M. Alain Marsaud sur les formes civiles du service national. S'inscrivant dans la logique " de la satisfaction prioritaire des besoins de l'armée " et sous prétexte de restaurer l'égalité et l'universalité du service national, il préconise, en réalité, une aggravation des différences entre les jeunes gens face à la conscription. Il propose d'une part, en effet, un rééquilibrage des différentes formes du service national civil en faveur du service militaire au moyen d'un ensemble de contraintes à l'encontre du service civil : les contrôles renforcés de la " réalité de chaque emploi, son opportunité et son intérêt ", l'harmonisation de la rémunération et la suppression du choix de l'affectation. Mais, d'autre part, de nouvelles inégalités sont délibérément prônées par ce rapport. Ainsi, est-il proposé que l'appelé en uniforme soit affecté à un service " au plus près de son domicile " alors que l'appelé sans uniforme devrait l'être à un service " hors de son département "... " pour montrer que la défense militaire est prioritaire ". De même, les diverses durées des formes civiles du service national sont censées " mieux expliquer les différences ". Cette proposition pénalise en particulier l'objection de conscience dont la durée de service est de vingt mois. Or, le caractère punitif de cette mesure à l'égard des objecteurs de conscience va à l'encontre tant de l'égalité de tous les citoyens devant la loi que de la notion de liberté de pensée, de conscience et de religion telle qu'elle est sanctionnée par l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le Parlement européen, de son côté, dans sa résolution du 19 janvier 1994, considère que l'objecteur de conscience doit pouvoir bénéficier des mêmes droits que celui qui effectue un service militaire armé. Il lui demande s'il est dans ses intentions de réformer le service national en sorte que l'égalité des citoyens devant la loi et la liberté de conscience soient désormais respectées en matière de conscription et s'il envisage de tenir compte des recommandations du Parlement européen et du Conseil de l'Europe.

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Réponse du ministère : Premier ministre publiée le 08/09/1994

Réponse. - L'égalité et l'universalité du service national ne sauraient se concevoir sans une mise en valeur du service militaire qui constitue la raison d'être de la conscription. C'est pourquoi la revalorisation du service militaire doit être conjuguée avec une plus grande maîtrise des formes civiles du service national. Le Gouvernement a engagé en ce sens une vaste réflexion dont le rapport de M. 8lain Marsaud constitue l'un des aspects. De ce rapport, il ressort qu'une utilisation plus juste et plus efficace des appelés impose de mettre un terme aux inégalités les plus choquantes, notamment aux modes de sélection ainsi qu'aux conditions d'exécution de certaines formes de service. Ainsi, ce rapport propose une harmonisation de la rémunération en métropole pour les formes civiles du service national, le respect du principe de l'anonymat dans le choix des affectations ou la suppression des affectations dans le département lieu de résidence habituel. S'il apparaît prématuré de présager des suites qui seront réservées à ce rapport, dont les conclusions font actuellement l'objet d'un examen attentif de la part du département de la défense, il est d'ores et déjà possible de préciser certaines orientations. En ce qui concerne la durée des formes de service, elle ne devrait pas être modifiée de façon significative. Le Livre blanc sur la défense a en effet déjà admis l'équivalence de dix mois de service militaire (porté à douze mois pour les professions médicales et les scientifiques du contingent en contrepartie du report spécial d'incorporation dont ils bénéficient), de seize mois de service dans l'aide technique ou la coopération et de vingt mois pour les objecteurs de conscience. Cette équivalence de la durée des différentes formes de service participe même de la recherche d'une égalité entre tous. S'agissant plus particulièrement de la durée du service des objecteurs de conscience, la plupart des Etats européens, dont la France, voient dans ce service civil plus long un test sérieux de la sincérité des jeunes gens afin d'éviter que certains ne revendiquent le droit à l'objection de conscience uniquement pour des raisons de confort, de facilité, voire de sécurité. C'est dans cet esprit que la durée du service civil pour ces appelés a été fixée par le législateur en France, en dernier lieu à vingt mois.

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