Question de M. TAITTINGER Pierre-Christian (Paris - RI) publiée le 06/10/1994

M. Pierre-Christian Taittinger demande à M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, suite à différentes procédures qui ont été récemment engagées, quelle difinition il est possible de donner de l'autorité de la chose jugée.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 08/12/1994

Réponse. - Le principe de l'autorité de la chose jugée exprimé par l'adage " non bis in idem " est consacré par l'article 6 du code de procédure pénale qui cite la chose jugée comme étant l'une des causes d'extinction de l'action publique. Il y a autorité de la chose jugée quand la décision répressive n'est plus susceptible d'aucune voie de recours. Par l'effet d'une présomption irréfragable de la loi, la décision est considérée comme l'expression de la vérité " res judicata pro veritate habetur ". Le condamné ne peut plus être poursuivi et jugé pour les faits visés dans la décision. L'exception de la chose jugée, qui est d'ordre public, peut être opposée en tout état de cause et à tout moment de la procédure. Mais, pour ce faire, trois conditions doivent être réunies, quant à l'identité des parties ; l'identité d'objet ; l'identité de cause. Les deux premières conditions ne soulèvent aucune difficulté. En revanche, la notion d'identité de cause a donné lieu à des interprétations doctrinale et jurisprudentielle divergentes. Le code de procédure pénale a consacré l'interprétation doctrinale en son article 368, qui dispose qu'après acquittement la poursuite des mêmes faits autrement qualifiés est interdite. L'identité de cause s'entend donc de l'identité du fait matériel indépendamment de sa qualification juridique. En d'autres termes, un même fait ne peut donner lieu à des actions pénales distinctes et un même fait autrement qualifié ne peut entraîner une double déclaration de culpabilité. En revanche, deux infractions distinctes en leurs éléments, de fait aussi bien que de droit, ne font pas obstacle à de nouvelles poursuites. Il en va ainsi de l'action engagée à l'encontre d'un individu déjà condamné pour homicide par imprudence quand postérieurement à la décision des juges correctionnels la mort apparaît être la conséquence d'un acte intentionnel de l'auteur. Rien ne s'oppose non plus à ce qu'une infraction réprimée par une première condamnation fasse l'objet d'une seconde poursuite et d'une seconde condamnation quand elle s'est renouvelée et présente par sa nature un caractère successif. La chose jugée au criminel ne fait nullement obstacle à ce que le juge civil statue sur l'action civile. Toutefois, en vertu du principe de l'autorité de la chose jugée au criminel sur le civil, il ne pourra méconnaître ce qui a nécessairement et certainement été décidé par le juge criminel sur l'existence du fait incriminé qui constitue la base commune de l'action civile et l'action pénale.

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