Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 08/12/1994

M. René Trégouët appelle l'attention de M. le Premier ministre sur les graves conséquences qui peuvent résulter de la manipulation des images photographiques ou vidéo grâce aux nouvelles technologies de traitement informatique et numérique. Le 12 octobre 1994, les téléspectateurs d'une émission de grande audience, diffusée par une chaîne de service public, ont été victimes d'une grave altération des faits présentés dans cette émission. Certaines personnes montrées dans un reportage inclus dans cette émission sont en effet apparues affublées de barbes et de moustaches qui ont été surajoutées à leur insu par traitement électronique de l'image. Ces attributs factices, mais perçus comme bien réels par les téléspectateurs, pouvaient laisser croire que les personnes présentées appartenaient à la mouvance fondamentale d'une communauté religieuse. Indépendamment du préjudice moral subi par les personnes concernées, dont l'image a été modifiée à leur insu, cette manipulation constitue une grave atteinte à l'objectivité et à la véracité de l'information, et peut, en outre, porter atteinte à l'ordre public, si l'on considère le sujet sensible abordé dans cette émission. C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui indiquer qu'elles mesurent envisage le Gouvernement pour alourdir sensiblement les sanctions pénales encourues par ceux qui se livrent à de telles manipulations malveillantes des images photographiques ou vidéo. Il conviendrait par ailleurs que les victimes de telles manipulations puissent disposer rapidement d'un droit de réponse, et que toute modification substantielle de l'image d'un individu par des procédés électroniques fasse l'objet d'un accord préalable de la personne concernée et soit de surcroît signalée de manière claire sur le document modifié.

- page 2862

Transmise au ministère : Communication


Réponse du ministère : Communication publiée le 02/02/1995

Réponse. - Il est rappelé à l'honorable parlementaire que, selon les termes de l'article 226-8 du code pénal, " est puni d'un an d'emprisonnement et de 100 000 francs d'amende le fait de publier par quelque voie que ce soit le montage réalisé avec les paroles ou l'image d'une personne sans son consentement, s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage ou s'il n'est est pas expressément fait mention (...) ". Les pouvoirs publics, à l'occasion de la récente réforme du code pénal, n'ont pas estimé nécessaire d'aggraver les peines liées à ce délit, considérant que, pour lutter contre la manipulation des images, les dispositions sus- rappelées sont suffisamment rigoureuses et dissuasives. Par ailleurs, les personnes victimes d'une manipulation de leur image dans les services de communication audiovisuelle peuvent bénéficier d'un droit de réponse dans ces mêmes services. En effet, le bénéfice de ce droit est ouvert suite à " des imputations susceptibles de porter atteinte à l'honneur ou à la réputation " d'une personne, y compris à " un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ". La demande doit être adressée au directeur de publication par lettre recommandée avec avis de réception, et présentée dans les huit jours suivant la diffusion du message incriminé. La réponse doit être diffusée dans des conditions techniques et d'audience équivalentes à celles du message incriminé. Si les victimes du montage diffusé au cours de l'émission visée par l'honorable parlementaire n'ont pas utilisé, comme elles en avaient le droit, leur droit de réponse, le responsable éditorial de l'émission a néanmoins fait une déclaration en s'excusant des conséquences de cette affaire. Quant à la nécessité d'un accord préalable sur l'utilisation de l'image d'une personne, celui-ci résulte des dispositions contenues dans les articles 9 du code civil et 226-1 du code pénal. Ainsi, toute personne a, sur son image et l'usage qui en est fait, un droit absolu. En conséquence, quiconque veut prendre et diffuser l'image d'une personne doit se faire préalablement autoriser par celle-ci. Enfin, il est de jurisprudence constante que cette autorisation doit être interprétée restrictivement et que la personne détermine seule les usages de son image auxquels elle consent.

- page 263

Page mise à jour le