Question de M. LE JEUNE Edouard (Finistère - UC) publiée le 02/02/1995

M. Edouard Le Jeune attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la situation des droits de l'homme en Indonésie et au Timor oriental, dénoncée notamment par Amnesty International. Depuis près de trente ans, les autorités indonésiennes sont responsables d'un nombre terrifiant de violations des droits de l'homme dans tout l'archipel et au Timor oriental : assassinats politiques, " disparitions ", arrestations et détentions arbitraires, procès politiques inéquitables, tortures, liberté d'opinion bafouée, peine de mort. L'Indonésie assure actuellement la présidence du Mouvement des pays non alignés et prône, avec d'autres puissances asiatiques, une vision des droits de l'homme très éloignée de celle qui découle de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Cette conception " asiatique " place l'Etat, la société et le développement économique au-dessus des droits individuels. Par ailleurs, la France fait partie du groupe consultatif pour l'Indonésie - un consortium international d'aide au développement - et a augmenté l'année dernière son aide à l'Indonésie. Des liens très étroits se sont renforcés entre les deux Etats, en particulier dans les secteurs du tourisme, des télécommunications et du bâtiment. Les multiples projets de construction menés par la France sur le territoire indonésien témoignent de l'importance économique de ce pays. C'est pourquoi, il lui demande s'il ne lui paraît pas souhaitable que le Gouvernement français prenne une position plus forte et plus nette au sujet des violations des droits de l'homme perpétrées par les forces de sécurité indonésiennes et qu'il use de son influence afin d'encourager le gouvernement indonésien à mettre en oeuvre une série de mesure visant à remédier à cette situation.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 02/03/1995

Réponse. - Le Gouvernement français reste préoccupé par la situation des droits de l'homme en Indonésie et à Timor oriental. La France, comme la plupart de la communauté internationale, n'a jmais reconnu l'annexion par l'Indonésie de Timor Oriental. Elle soutient les négociations qui ont repris depuis mai 1992 entre le Portugal et l'Indonésie sous l'égide du secrétaire général des Nations Unies pour aboutir à un règlement juste, global, et internationalement acceptable du statut du territoire. Le Gouvernement français se félicite que le Portugal et l'Indonésie se sont mis d'accord sur certaines mesures qui visent à amoindrir les tensions dans le territoire lors de la dernière session des discussion à Genève, le 9 janvier 1995. Sous la pression de la communauté internationale et plus particulièrement de l'Union européenne, qui est à l'origine des résolutions adoptées par la commission des droits de l'homme de l'ONU à Genève, le gouvernement indonésien a pris un certain nombre de mesures pour améliorer la situation : suppression du commandement militaire spécial, droit de visite accordé à la Croix-Rouge aux prisonniers timorais ; réduction à vingt ans de la peine à perpétuité qui avait été infligée au leader timorais indépendantiste, M. Gusmao, arrêté après les événements de Dili de novembre 1991 ; ouverture accrue du territoire aux journalistes. Ces mesures ont le mérite d'aller dans le sens recommandé par l'Union européenne. Force est pourtant de constater que les dernières manifestations à Dili et Jakarta, au moment du sommet de l'APEC, et les affrontements à Baucau au début de cette année, montrent que les tensions demeurent vives et que des progrès restent à faire. C'est pourquoi, la France continue d'inciter le gouvernement indonésien à oeuvrer en faveur de l'ouverture du territoire. Le gouvernement indonésien a pris des mesures ces dernières années en vue d'améliorer le respect des droits de l'homme, en particulier par la création de la Commission nationale des droits de l'homme. Le Gouvernement français reconnaît d'ailleurs que la liberté de religion et la tolérance religieuse y sont largement respectées et que la politique économique du gouvernement indonésien a assuré un développement économique remarquable ainsi qu'une réduction importante de la pauvreté dans l'archipel. Néanmoins, l'interdiction en juin 1994, de trois journaux et la condamnation, le 7 novembre, à trois ans de réclusion du dirigeant syndicaliste, M. Muchtar Pakpahan, à la suite d'un procès où les droits de défense n'ont guère été respectés, sont autant de sources d'inquiétudes. C'est pourquoi, la France a souhaité que l'Union européenne rende publique une déclaration, le 22 novembre, sur la condamnation de M. Pakpahan. Le Gouvernement français estime que l'un des moyens d'encourager les autorités indonésiennes à respecter leurs engagements internationaux en matière de droits de l'homme est de poursuivre et d'approfondir le dialogue politique bilatéral. Le ministre délégué pour les affaires européennes avait, dans cet esprit, saisi l'occasion de sa visite en Indonésie en juillet dernier pour les rappeler à leurs obligations. L'honorable parlementaire peut être assuré que la France continuera à rappeler, à titre bilatéral et multilatéral, leurs obligations aux autorités indonésiennes et à oeuvrer en faveur du respect des droits fondamentaux de la population de Timor et de l'amélioration de la condition de tous les habitants de l'archipel indonésien.

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