Question de Mme BIDARD-REYDET Danielle (Seine-Saint-Denis - CRC) publiée le 21/12/1995

Mme Danielle Bidard-Reydet attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur le décret émanant du gouvernement de la République de Croatie le 31 août 1995, relatif à la prise en charge et à l'administration provisoire de certains biens. Ce décret prévoit que les biens des personnes qui ne résident plus, à ce jour, en Croatie sont mis sous l'administration provisoire de la République de Croatie. Il concerne donc les biens mobiliers et immobiliers des personnes qui viennent de quitter les zones anciennement occupées et récupérées par la Croatie, celles qui ont quitté la Croatie après le 17 août 1990, ainsi que les citoyens de la République fédérale de Yougoslavie. Ce décret, d'une portée extrêmement vaste, empêche le retour des populations serbes chez elles, puisqu'elles ne pourront pas reprendre possession de leurs biens, et, dans le même temps, les autorités croates décident d'expulser des dizaines de milliers de réfugiés musulmans. Il contribue concrètement à la légalisation de la purification ethnique et viole tous les instruments internationaux de lutte contre les discriminations fondées sur l'origine nationale ou ethnique. Il est à l'encontre de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui stipule dans son article 17 que toute personne a droit à la propriété et que nul ne peut en être arbitrairement privé. Le 7 octobre dernier, le Conseil de sécurité des Nations Unies se déclarait " sérieusement préoccupé par la situation des réfugiés de la République de la Croatie qui souhaitent rentrer chez eux, ainsi que par celle des personnes d'origine serbe qui ont choisi de rester en République de Croatie ". Il demandait au gouvernement croate d'" abroger toute disposition fixant un délai avant l'expiration duquel les réfugiés devraient rentrer en Croatie afin de récupérer leurs biens ". Compte tenu des relations diplomatiques et commerciales que la France entretient avec la République de Croatie, elle lui demande quelles mesures il compte prendre en usant de son influence afin que les droits des réfugiés soient respectés par les autorités croates et que le décret du 31 août 1995 soit annulé.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 08/02/1996

Réponse. - Comme le sait l'honorable parlementaire, la France a apporté son soutien à l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations Unies, le 8 janvier, d'une déclaration présidentielle condamnant sans équivoque les exactions croates perpétrées contre la population serbe des Krajina et enjoignant Zagreb de revoir son attitude sur les questions relatives au respect des droits de la communauté serbe. Auparavant, dès l'automne 1995, l'Union européenne avait décidé de geler l'application du programme PHARE à la Croatie et de suspendre les négociations sur la signature d'un accord de commerce et de coopération avec Zagreb en raison de l'attitude croate à l'égard des Serbes de Croatie. Le décret cité par l'honorable parlementaire a toujours été directement désigné comme inacceptable. La Croatie en avait déjà atténué la portée (allongement de la période au cours de laquelle les Serbes pouvaient reprendre possession de leurs propriétés). L'ambassadeur de Croatie en France, reçu au ministère des affaires étrangères le 4 janvier, a fait état de la volonté du gouvernement de Zagreb de soumettre au parlement croate un projet de loi destinée à garantir la propriété des biens de la minorité serbe ayant quitté la Croatie. La France continue de suivre cette question avec attention.

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