Question de M. PLASAIT Bernard (Paris - RI) publiée le 11/07/1996

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur l'interprétation de l'article 1er, alinéas 1 et 2, du décret no 93-471 du 24 mars 1993 portant application de l'article 38 de la loi no 93-122 du 29 janvier 1993 relatif à la publication des délégations de service public. En effet, l'article 38 de la loi no 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption de la vie économique et des procédures publiques (dite " Loi Sapin ") dispose en son premier alinéa que " les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l'autorité délégant à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat ". L'article 1er, alinéas 1 et 2, de ce décret (décret no 93-471 du 24 mars 1993 portant application de l'article 38 de la loi no 93-122 du 29 janvier 1993 relatif à la publicité des délégations de service public) prévoit que " l'autorité responsable de la personne publique délégante doit satisfaire à l'exigence de publicité prévue à l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 (...) par une insertion dans une publication habilitée à recevoir des annonces légales et dans une publication spécialisée correspondant au secteur économique concerné. Cette insertion précise la date limite de présentation des offres de candidatures, qui doit être fixée un mois au moins après la date de la première publication ". La jurisprudence administrative la plus récente ne fait pas état d'un seul cas qui ait déjà tranché la question de savoir si le non-respect du délai d'un mois prévu par le décret de 1993 provoque irrémédiablement une sanction susceptible d'annuler le contrat de délégation de service public. En revanche, la question a déjà été jugée pour un marché public (TA Grenoble, 17 mars 1993, Société Polytec, MP 1993, no 276, p. 64). Dans cette affaire, le juge (ordonnance du président du TA intervenant dans le cadre de l'article L. 22 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel) a tiré de la brièveté du délai de réception des offres, notamment, que le moyen visant à suspendre la passation du marché était fondé. Cependant, il n'est pas possible de raisonner par analogie à partir des règles applicables aux marchés pour en déduire celles applicables aux délégations de service public. En effet, ces deux catégories de contrats sont de natures juridiques trop différentes pour être amalgamées. De sorte que l'on ne peut affirmer ni infirmer, pour le moment, en droit positif, que le non-respect du délai d'un mois prévu par le décret de 1993 entre la date de la dernière publication d'avis et la date limite de dépôt des candidatures entraîne un vice de procédure substantiel susceptible de provoquer l'annulation de la convention devant le juge. Cette incertitude est très inconfortable pour l'ensemble des collectivités publiques susceptibles de conclure des contrats de service public. Elle nuit en effet à la sécurité de leurs rapports contractuels. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer la portée exacte de l'exigence d'un délai minimum d'un mois entre la date de la dernière publication d'un avis et la date limite de présentation des offres, ainsi qu'au regard de l'intention de législateur quelle devrait être la sanction infligée par le juge administratif du fait du non-respect du délai. En outre, il souhaiterait savoir s'il est possible d'imputer à une collectivité publique délégant la gestion ; d'un service public à une personne privée le non-respect d'un délai dont elle ne contrôle pas le point de départ. En effet, cette collectivité ne connaissant pas à l'avance la date de parution du dernier avis de publicité, il lui est difficile de prévoir qu'il s'écoulera bien un mois plein entre la date de parution de cet avis - qu'elle ignore - et la date limite de réception des candidatures. La personne publique n'étant pas totalement maître du respect de cette disposition réglementaire, on pourrait contester, de ce fait, qu'il soit possible de lui en faire grief devant la justice. En somme, le non-respect du délai d'un mois entre la date de la dernière publication d'avis et la date limite de dépôt des candidatures prévu par le décret sus-mentionné, entraîne-t-il un vice de procédure substantiel provoquant l'annulation de la convention de délégation de service public devant le juge ?

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Réponse du ministère : Économie publiée le 19/09/1996

Réponse. - Les collectivités publiques en leur qualité d'autorités délégantes doivent en effet, conformément à l'article 38 de la loi no 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, codifié à l'article L. 1411-1 de code général des collectivités territoriales, se soumettre à la procédure de publicité régie par le décret no 93-471 du 24 mars 1993 afin de permettre la présentation de plusieurs offres concurrentes. Ce dernier texte fixe les conditions de publicité des conventions de délégation dont le montant total des sommes dues au délégataire est supérieur à 700 000 francs pour toute la durée de la convention ou à 450 000 francs par an pour une convention n'excédant pas trois ans. L'exigence de publicité est satisfaite par une insertion dans une publication habilitée à recevoir des annonces légales et dans une publication spécialisée correspondant au secteur économique concerné par la délégation. L'insertion mentionne la date limite de présentation des offres de candidatures qui, comme le rappelle le parlementaire, doit être fixée un mois après la date de la dernière publication. S'agissant de contrat de longue durée aux enjeux économiques parfois importants, il est en effet nécessaire que le plus grand nombre d'entreprises susceptibles d'être candidates soit informées de la délégation du service public envisagée. Il importe par conséquent que la computation des délais de remise des candidatures par la collectivité publique délégante soit exactement appréciée en tenant compte pour les organes autres que d'annonces judiciaires et légales, qui doivent publier au moins une fois par semaine, de leur périodicité, laquelle est généralement connue, et en s'assurant, quel que soit l'organe de publication, du délai adminsitratif nécessaire à la publication. Il convient enfin de rappeler que le délai réglementaire de trente jours à compter de la dérnière publication fixé par le décret du 24 mars 1993 précité est un délai minimum, qui peut être utilement prolongé. Le non-respect du délai réglementaire pourrait être constitutif d'un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence prévues par l'article L. 1411-1 du code des collectivités territoriales et à ce titre susceptible d'entraîner la suspension de la procédure de passation de la convention, voire l'annulation de la convention, par le juge administratif. Mais dans le cas où la collectivité publique aurait procédé aux publications exigées dans un délai utile et que par suite d'un retard imputable à l'un des organes de publication les candidats ne disposeraient pas, malgré tout, du délai réglementaire pour présenter leur candidature, la responsabilité de la collectivité pourrait, sous réserve de l'interprétation souveraine du juge administratif, être dégagée.

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