Question de M. HURIET Claude (Meurthe-et-Moselle - UC) publiée le 26/06/1997

M. Claude Huriet appelle l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur la situation préoccupante de l'environnement au Tibet. Depuis 1959, le système tibétain traditionnel de protection de l'environnement a cédé la place à des pratiques entraînant de graves atteintes à l'écosystème. Leurs effets sont particulièrement notables dans les régions de prairies, les régions de récoltes, les forêts, les ressources en eau et la vie sauvage. C'est ainsi que la reconversion des terres marginales à l'agriculture pour nourrir les colons chinois est devenue la plus grande menace pour les prairies du Tibet. Elle a conduit à une désertification étendue, rendant les terres inutilisables à la fois pour l'agriculture et le pâturage, notamment dans l'Amdo. Cette situation est d'autant plus critique que le clôturage des prairies a désorganisé la pratique traditionnelle de migrations au sein d'une économie agricole dominée à l'origine par l'élevage. En ce qui concerne les forêts, elles sont passées, entre 1949 et 1985, de 221 000 kilomètres carrés à 134 000 kilomètres carrés, 40 % des ressources ayant ainsi été exploitées contribuant à une désertification souvent irréversible. Avec la destruction de leur habitat, beaucoup d'animaux sauvages ont disparu ou ont fait l'objet de chasses aveugles. Une trentaine d'espèces menacées risquent, aujourd'hui, une disparition totale, ce que les autorités chinoises reconnaissent elles-mêmes. Pour ce qui est de la situation hydrographique, les fleuves du Tibet ont accumulé des couches de sédiment extrêmement élevées et semblent connaître une pollution importante. De nombreux projets chinois sont en outre conçus pour capter l'énorme potentiel hydraulique du Tibet avec des coûts culturels, environnementaux et humains supportés par les seules populations locales. Enfin, des quantités inconnues de déchets radioactifs ont été déchargées au Tibet, de façon souvent négligente, e t de nombreuses ogives nucléaires y seraient stockées. Le Tibet possédant parmi les plus grandes réserves d'uranium du monde, ainsi que des gisements de 126 minéraux différents, on peut craindre que leur exploitation incontrôlée ne continue d'aggraver une situation déjà inquiétante. Il lui rappelle que le plateau tibétain, unique au monde, constitue la région de haute altitude la plus étendue de la planète et que cette région exerce une influence sur la circulation atmosphérique des courants aériens au-dessus de l'Asie et peut, selon les spécialistes, contribuer à la déstabilisation des tendances du climat sur tout l'hémisphère Nord. Il lui rappelle également que le Tibet est le principal bassin hydrographique de l'Asie, que quatre grands fleuves parmi les plus importants y prennent leur source (le fleuve Jaune, le Yangzé Kiang, l'Indus et le Brahmapoutre) et qu'ainsi la moitié ou presque de la population mondiale dépend des fleuves du Tibet. En conséquence, alors que l'an dernier 343 députés et sénateurs français ont lancé un appel témoignant de leur souci extrême de la situation au Tibet, il lui demande ce que la France compte faire concrètement au sein des organisations internationales dont elle est partie, d'abord pour obtenir des autorités responsables une information précise sur la situation de l'environnement au Tibet et, ensuite, pour que ces atteintes graves puissent cesser dans les délais les meilleurs.

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Transmise au ministère : Affaires étrangères


Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 28/08/1997

Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu attirer l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, qui a transmis cette question au ministre des affaires étrangères sur l'aggravation de la situation de l'environnement au Tibet depuis l'entrée des troupes de l'armée populaire de libération chinoise au Tibet oriental en 1950. Depuis la reconnaissance du Gouvernement de la République populaire de Chine en 1964, dans ses frontières actuelles, la France a attiré à de nombreuses reprises l'attention de ses interlocuteurs sur la préservation de l'identité culturelle et religieuse tibétaine, le respect du patrimoine historique et naturel du haut-plateau, mais aussi sur le retard du développement économique et social de la région autonome du Tibet par rapport aux provinces orientales de la République populaire de Chine. Les informations évoquées par l'honorable parlementaire sont effectivement préoccupantes et ont fait l'objet de nombreuses publications tibétaines, indiennes ou américaines. Bassin des plus grands fleuves asiatiques, le plateau tibétain constitue en effet un espace naturel unique au monde. La collectivisation des terres entreprise sous la révolution culturelle et l'exploitation systématique des ressources naturelles ont grandement contribué à mettre en péril cet écosystème jusque-là préservé. Concernant plus généralement la question tibétaine, le Gouvernement français a pris note de l'appel lancé en faveur du respect des droits fondamentaux du peuple tibétain, par 350 parlementaires français, soit près de 40 % de la représentation nationale. La France a constamment marqué son attachement à ce que des discussions s'ouvrent entre les autorités chinoises et le Dalaï-Lama. Lors de la mission qu'il a effectuée en mars dernier au Tibet, l'ambassadeur de France en Chine a pu rencontrer les autorités de la région autonome le 16 mai 1997. Le Président de la République a par ailleurs fait part au président Jiang Zemin, des préoccupations qu'inspirait la question du Tibet. Le ministre des affaires étrangères ne manquera pas d'interroger de nouveau les autorités chinoises tandis que l'Union européenne devrait pouvoir aborder parallèlement cette question dans le cadre du dialogue qu'elle renouera à l'automne avec la Chine.

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