Question de M. TRÉGOUËT René (Rhône - RPR) publiée le 10/07/1997

M. René Trégouët appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur la nécessité d'instaurer rapidement un véritable statut du réalisateur afin d'apporter à cette profession un minimum de garanties et de protections. Il convient en effet de souligner que la situation des réalisateurs ne cesse de se dégrader et que chaque année plus de 6 000 heures de programmes régionaux sont réalisées sans réalisateurs, qui sont remplacés par des techniciens commutateurs. Le résultat de cette évolution est que, aujourd'hui, alors que le volume d'heures de programmes diffusées par voie hertzienne est passé de 6 500 heures en 1973 à 50 000 heures en 1996, 80 % des réalisateurs se trouvent sans emploi. Dans la mesure où la convention collective des réalisateurs de télévision n'est plus appliquée dans les faits, il lui demande quelles mesures entend prendre le Gouvernement pour instaurer un statut législatif du réalisateur qui assure, à l'instar du statut du journaliste, une réelle protection de cette profession. Un tel statut pourrait être élaboré dans le cadre de la loi no 82-652 du 29 juillet 1982 et de la loi no 89-1069 du 30 septembre 1986 ; il devrait notamment garantir que tout travail de réalisation doit donner lieu à un contrat salarial de réalisateur, rappeller que pour ce qui concerne son caractère de co-auteur le réalisateur relève de la loi sur la propriété littéraire et artistique de 1957, modifiée en 1985, et enfin jeter les bases d'une convention collective nationale des réalisateurs. Il souligne enfin que, dans la perspective du développement rapide de la production et de la diffusion de programmes multimédia, il est indispensable d'assurer à la profession de réalisateur une protection et une reconnaissance accrues, en raison du rôle irremplaçable que remplit le réalisateur en matière artistique et culturelle.

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Réponse du ministère : Culture publiée le 25/09/1997

Réponse. - L'édiction d'un statut législatif en faveur d'une catégorie professionnelle déterminée est une procédure exceptionnelle, qui ne peut être motivée que par la prise en considération de conditions très particulières d'emploi et de travail et/ou de raison d'intérêt général. Dans le cas des journalistes, cité par l'honorable parlementaire, le législateur est ainsi intervenu pour apporter des garanties d'indépendance dans l'exercice de cette profession, car elle participe d'une liberté publique essentielle, la liberté de l'information. En ce qui concerne les réalisateurs, depuis une dizaine d'années que la revendication d'un statut législatif est posée par le syndicat des réalisateurs et créateurs du cinéma, de la télévision et de l'audiovisuel (SRCTA), tous les gouvernements qui se sont succédé durant cette période ont estimé que les conditions n'étaient pas réunies pour y satisfaire. Il convient d'observer que la situation des réalisateurs est déjà prise en compte par le droit positif, même s'il s'agit de dispositions qui ne leur sont pas spécifiques. C'est ainsi, notamment, qu'ils bénéficient de la présomption de salariat édictée par l'article L. 762-1 du code du travail en faveur des artistes du spectacle, au titre de leurs prestations de travail, et, en ce qui concerne les fruits de ces prestations, des dispositions du code de la propriété intellectuelle relatives au droit d'auteur. Lorsqu'ils sont engagés sous le régime de l'intermittence, ce qui est le cas général, ils bénéficient des institutions sociales qui sont propres aux intermitents du spectacle (congés payés, formation professionnelle, annexes 8 et 10 au règlement général de l'assurance-chômage, retraite complémentaire). La revendication essentielle du SRCTA, à travers celle d'un statut législatif, est l'instauration d'une obligation d'emploi d'un réalisateur pour la création de tout " produit " audiovisuel. Le Gouvernement estime, comme ceux qui l'ont précédé, qu'il n'existe aucune considération particulière qui puisse justifier que les réalisateurs se voient conférer un monopole de droit, contrairement à ce qui existe dans les professions qui bénéficient d'un tel monopole (journalistes, médecins...) Il revient donc aux opérateurs (responsables des chaînes et producteurs) d'apprécier quelles sont les émissions qui justifient la valeur ajoutée propre du travail de réalisateur, dans un contexte d'évolution accélérée des moyens techniques. Un éventuel " encadrement " de ce pouvoir d'appréciation ne saurait résulter que de la négociation collective entre les parties intéressées, au sein de la commission mixte réunie à l'initiative du ministre chargé du travail. S'il appartient en effet au législateur de déterminer les règles de la négociation collective et le régime juridique des textes qui en sont issus, il ne saurait " jeter les bases " d'une convention collective, au mépris du principe de la liberté contractuelle qui régit les relations entre partenaires sociaux en matière de négociation collective, pour quelque profession que ce soit.

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