Question de M. BARRAUX Bernard (Allier - UC) publiée le 10/10/1997

Question posée en séance publique le 09/10/1997

M. le président. La parole est à M. Barraux.
M. Bernard Barraux. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes
chers collègues, votre Gouvernement, en décidant de mettre les allocations familiales sous conditions de ressources
(Exclamations sur les travées socialistes.) vient de dénoncer un contrat qui existait pourtant entre l'Etat et l'ensemble
des familles de France depuis plus de cinquante ans. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR
et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean-Claude Carrère. Qu'est-ce que ça serait s'ils avaient des enfants !
M. Bernard Barraux. Permettez à un fils et à un père de famille nombreuse de s'en offusquer.
M. Yann Gaillard. Très bien !
M. Bernard Barraux. Mais, comme si cela ne suffisait pas, vous venez également de décider la suppression de la
demi-part du quotient familial pour les personnes ayant élevé seules leurs enfants. Franchement, est-ce cela le grand
projet familial de la gauche ? N'allez-vous pas disloquer un des rares fondements qui subsiste encore dans notre société
déjà si malade ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La famille ! Et le travail et la patrie ?
M. Jean Chérioux. Et alors, cela n'existe pas pour vous ?
M. Bernard Barraux. La suppression de la demi-part du quotient familial pour les personnes ayant élevé seules leurs
enfants est, selon moi, totalement inadmissible, tout autant que la mise sous condition de ressources des allocations
familiales. Ne confondez-vous pas, monsieur le Premier ministre, la politique familiale, dont le but n'est autre que de
compenser en partie les charges engendrées par un enfant, avec la politique sociale qui, elle, a pour but de mieux répartir
les richesses nationales entre les plus pauvres et les plus riches ?
Au point où en est la démographie française, les familles qui ont des enfants assurent aujourd'hui un véritable service
public. C'est l'avenir de la nation qui est en cause. (M. Jacques Nachet applaudit.)
M. Josselin de Rohan. Eh oui !
M. Bernard Barraux. Avec mes collègues du groupe de l'Union centriste, nous condamnons vigoureusement les
mesures prises par le Gouvernement et touchant à la politique familiale.
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Bernard Barraux. Nous vous demandons, en conséquence, monsieur le Premier ministre, madame le ministre, de
bien vouloir préciser, aujourd'hui, devant la Haute Assemblée, si vous avez l'intention de vous acharner à poursuivre dans
cette voie qui va totalement à l'encontre de l'intérêt des familles et de la France. (Bravo ! et applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, du RPR, des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Emploi publiée le 10/10/1997

Réponse apportée en séance publique le 09/10/1997

M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le sénateur, permettez-moi de vous dire que
ce qui va à l'encontre de l'intérêt des familles de France, c'est de faire voter des lois qui ne sont pas financées et de faire
des promesses aux familles que le Gouvernement n'est pas capable de tenir ! (Bravo ! et applaudissements sur les
travées socialistes et sur celles du groupe communiste républicain et citoyen. - Vives protestations sur les travées
du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Je ne reviens pas sur les chiffres dont j'ai parlé tout à l'heure et que personne ne conteste : 13 milliards de francs de déficit
de la branche famille aujourd'hui.
M. Jean Chérioux Vous déformez la réalité !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement n'a pas de leçon à recevoir sur l'aide
aux familles. (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.) Depuis trois mois que nous
sommes au gouvernement - le Premier ministre l'avait d'ailleurs annoncé dans sa déclaration de politique générale - nous
avons pris des mesures en faveur des familles à hauteur de 10,5 milliards de francs, que ce soit le quadruplement de
l'allocation de rentrée scolaire, l'augmentation de l'aide personnalisée au logement, l'APL, qui n'avait pas été revalorisée
depuis quatre ans (Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. - Voilà ! sur les
travées socialistes.) ou encore l'aide à la cantine scolaire.
M. René-Pierre Signé. Vous ne dites rien, là, messieurs !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Permettez-moi de vous le dire, ce ne sont pas 30 000
familles qui sont touchées ; ce sont des centaines de milliers de familles ...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. ... qui vont vivre mieux, avec des enfants qui vont vivre
mieux, grâce à ces aides. Voilà la réalité des choses ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Que répondez-vous à cela, messieurs ?
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Alors, un petit mot maintenant sur les allocations
familiales. Là encore, M. le Premier ministre vous en avait entretenu juste après sa déclaration de politique générale,
mesdames, messieurs les sénateurs.
Nous avons été disponibles tout l'été pour discuter avec les associations familiales et avec les organisations syndicales afin
de voir comment, dans notre pays, la politique familiale pourrait permettre non seulement une redistribution des
non-familles vers les familles, ce qui est souhaitable et ce qui est bien, mais aussi un équilibre entre les familles favorisées
et celles qui ne le sont pas. Et croyez bien que nous avons proposé d'autres systèmes que certaines familles souhaiteraient,
comme celui du quotient familial, par exemple.
Peut-être parce que c'était l'été et qu'il était difficile à ces organisations de prendre une décision, en tout cas elles n'ont pas
souhaité exprimer une préférence pour un autre système. C'est la raison pour laquelle M. le Premier ministre a annoncé
que nous travaillerions à nouveau avec elles, et elles le savent très bien.
Sachez que la plupart d'entre elles, que je reçois en permanence, n'emploient pas pour les discussions le ton sur lequel
vous parlez dans cet hémicycle ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées socialistes. - Exclamations sur les
travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
De plus, les associations familiales ne regroupent pas seulement les familles qui perçoivent l'allocation de garde d'enfant à
domicile, l'AGED, ou celles qui sont concernées par les allocations familiales. Elles recouvrent aujourd'hui les 16 millions
de familles qui, pour beaucoup, ont des problèmes, y compris pour payer la cantine scolaire de leurs enfants !
Elles n'ont donc pas le même discours que vous, et c'est dans un climat totalement apaisé que nous allons continuer à
travailler sur cette politique familiale qui, je dois le dire, ne touchera pas uniquement les prestations familiales. Elle
concernera aussi l'ensemble des aides à la famille, l'éducation, le logement que vous avez malheureusement laissé tomber
ces dernières années ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes. - Protestations sur les travées du
RPR et des Républicains et Indépendants.)

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