Question de M. BIZET Jean (Manche - RPR) publiée le 10/10/1997

M. Jean Bizet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la pêche sur l'organisation mondiale du commerce de la filière laitière. Les propositions contenues dans le cadre du " paquet SANTER " font état d'une réduction progressive des prix de soutien de 10 % et parallèlement d'une prime à la vache laitière de 145 écus. Cette approche ne semble guère satisfaisante pour trois raisons : les prix pratiqués au niveau de cette filière sont actuellement supportés par le consommateur et font l'objet d'une certaine stabilité, ce qui n'entrave nullement la progression annuelle de la consommation ; il semble donc logique de ne pas provoquer de baisse de prix sur le marché intérieur, ce qui aurait pour conséquence un accroissement du budget, même transitoire, du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) ; l'accroissement de la demande de consommation sur le plan mondial est estimée à 2 % par an. Si l'on veut gagner des parts de marché à l'exportation, objectif fondamental de nos entreprises de transformation, principalement au travers de la production de fromages, ce n'est pas 10 % de baisse du prix du lait qui permettront de positionner l'Union européenne favorablement ; l'Union européenne détenant 45 % du marché mondial, est la seule à ne pas pratiquer un prix différencié et sur le marché intérieur et sur le marché à l'export ; seule opportunité pour maintenir le revenu des producteurs et le dynamisme de l'ensemble de la filière. Ces trois considérations plaident précisément pour la mise en place d'un système de prix différencié au sein de l'Union européenne. Il souhaite savoir s'il a la ferme intention de soumettre cette proposition, souhaitée par l'ensemble des acteurs de la filière, près de ses collègues européens.

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Réponse du ministère : Agriculture publiée le 14/01/1998

Réponse apportée en séance publique le 13/01/1998

M. Jean Bizet. Monsieur le ministre, je tiens à attirer votre attention sur l'organisation mondiale du commerce de la filière
laitière.
Les propositions contenues dans le cadre du « paquet Santer » font état d'une réduction progressive des prix de soutien
de 10 % et, parallèlement, d'une prime à la vache laitière de 145 écus. Cette approche ne semble guère satisfaisante pour
trois raisons.
Tout d'abord, les prix pratiqués dans cette filière sont actuellement supportés par le consommateur et font l'objet d'une
certaine stabilité, ce qui n'entrave nullement la progression annuelle de la consommation. Il semble donc logique de ne pas
provoquer de baisse de prix sur le marché intérieur, ce qui aurait pour conséquence un accroissement du budget, même
transitoire, du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, le FEOGA.
Ensuite, l'accroissement de la demande de consommation sur le plan mondial est estimée à 2 % par an. Si l'on veut gagner
des parts de marché à l'exportation, objectif fondamental de nos entreprises de transformation, principalement au travers
de la production de fromages, ce n'est pas une baisse de 10 % du prix du lait qui permettra de positionner l'Union
européenne favorablement.
Enfin, l'Union européenne, détenant 45 % du marché mondial, est la seule à ne pas pratiquer un prix différencié sur le
marché intérieur et sur le marché à l'exportation, seul moyen de maintenir le revenu des producteurs et le dynamisme de
l'ensemble de la filière.
Ces trois considérations plaident donc pour la mise en place d'un système de prix différencié au sein de l'Union
européenne.
Je désirerais savoir si vous avez la ferme intention de soumettre cette proposition, à laquelle adhère l'ensemble des acteurs
de la filière, à vos collègues européens.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Monsieur le sénateur, ainsi que j'ai eu l'occasion de le
dire devant la Haute Assemblée, les perspectives de réforme de l'organisation commune du marché du lait et des produits
laitiers font l'objet de discussions approfondies à l'échelon européen depuis six mois et probablement pour de long mois
encore.
Dans le cadre du « paquet Santer », la Commission européenne a proposé, d'une part, de reconduire le régime des
quotas laitiers jusqu'en 2006 et, d'autre part, de réduire progressivement les prix de soutien de 10 %. Par ailleurs, la
Commission propose d'introduire une aide compensatoire sous la forme d'une prime à la vache laitière d'un montant de
215 écus par animal.
Lors des premières discussions qui ont eu lieu sur ces propositions, j'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, en conseil des
ministres de l'agriculture, de clairement réaffirmer la nécessité de maintenir le régime des quotas laitiers pour garantir
l'équilibre des marchés, mais aussi pour assurer une répartition harmonieuse de la production laitière sur l'ensemble du
territoire.
En revanche, je considère, tout comme vous, monsieur le sénateur, que la méthode consistant à baisser les prix et à
compenser cette baisse par des aides spécifiques, ce que préconise la Commission européenne, n'est pas adaptée au
secteur laitier. Une telle mesure est en effet de nature à fragiliser le dispositif des quotas.
De plus, une baisse des prix de 10 % ne permettrait pas à l'Union européenne d'améliorer de façon significative sa
position coucurrentielle sur le marché mondial, où ce que l'on pourrait appeler le « cours » du lait est à un niveau encore
très inférieur : de l'ordre de un franc le litre.
Ainsi, la contrainte sur les volumes exportés avec restitutions découlant des accords de Marrakech serait toujours aussi
forte, notamment pour les fromages et pour la catégorie des « autres produits laitiers », qui regroupe les poudres de lait
entier et les laits concentrés.
Pour autant, des adaptations de l'organisation commune de marché sont nécessaires pour que la filière laitière puisse faire
face aux conséquences de la mise en oeuvre des accords de Marrakech et, ultérieurement, à l'intégration des pays
d'Europe centrale et orientale, vers 2005.
En particulier, il convient d'examiner toutes les souplesses qu'il serait nécessaire d'introduire dans la réglementation de
manière à garantir le maintien d'un prix intérieur élevé et, en même temps, à conforter la présence de l'Union européenne
sur le marché international.
Il m'apparaît qu'aujourd'hui il n'y a pas d'alternative au maintien des quotas laitiers et que la proposition qui nous est faite
par la Commission est incohérente et inutilement coûteuse.
Plutôt que de baisser les prix sur tout ou partie de la production et de compenser cette baisse par une aide à la vache
laitière, il vaut mieux maintenir les prix actuels et ne pas accorder d'aide spécifique. Voilà ce que, à la fin de 1997, j'ai dit
une nouvelle fois au commissaire européen lorsqu'il est venu à Paris. Nous ne manquerons pas de maintenir cette ligne de
plaidoirie et de réaffirmer avec force cette position, qui rejoint, pour une bonne part, celle que vous défendez, monsieur le
sénateur.
M. Jean Bizet. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Bizet.
M. Jean Bizet. Monsieur le ministre, je me félicite des propos que vous venez de tenir et de la quasi-concordance de
nos analyses sur ce sujet.

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