Question de M. ROBERT Jean-Jacques (Essonne - RPR) publiée le 28/01/1998

M. Jean-Jacques Robert attire l'attention de M. le ministre de la défense sur l'avenir du centre d'essais en vol (CEV) de Brétigny-sur-Orge. Ce centre, qui relève de la direction générale pour l'armement, envisage la délocalisation de la moitié de son personnel - près de six cents personnes - et le transfert des activités d'essais en vol sur les sites d'Istres et de Cazaux. Il s'inquiète des conséquences de ce projet : 1. Pour les personnels civils et militaires de la base, et leur famille habitant à proximité. 2. Pour les entreprises de la région qui, grâce à la sous-traitance, bénéficient du rayonnement et des retombées des activités économiques du CEV. 3. Pour les quatre communes de Leudeville, Vert-le-Grand, Le Plessis-Pâté et Brétigny-sur-Orge, qui sont regroupées en syndicat de communes, afin de partager les recettes fiscales provenant de la taxe professionnelle versée au titre des activités de l'Etat. Déjà, le 19 septembre 1996, un engagement écrit de son prédécesseur avait garanti aux salariés du CEV la poursuite des activités sur le site de Brétigny : " ni délocalisation, ni transfert de site, ni plan social " (extrait du courrier). Dans le climat économique actuel, peut-on imaginer que notre gouvernement veuille revenir sur la " parole donnée " ? C'est pourquoi il lui demande de bien vouloir lui faire connaître le projet de décision prévu à ce jour.

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Réponse du ministère : Défense publiée le 25/02/1998

Réponse apportée en séance publique le 24/02/1998

M. Jean-Jacques Robert. Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur le centre d'essais en vol de
Brétigny-sur-Orge, qui emploie 1 200 personnes, et à propos duquel reviennent périodiquement des projets de
délocalisation.
Dans le département de l'Essonne, terre où l'aviation a connu un développement considérable, depuis ses débuts jusqu'à
aujourd'hui nous avons du mal à comprendre que le centre d'essais en vol puisse être remis en cause.
En 1996, votre prédécesseur, à l'issue de nombreux entretiens, avait garanti au centre la poursuite de ses activités sur le
site de Brétigny-sur-Orge. Je citerai quatre extraits d'un courrier que j'avais reçu à l'époque : « ni délocalisation, ni
transfert du site, ni plan social, maintien en l'état ».
Peut-on imaginer, dans le climat économique actuel et dans un département où le pourcentage des jeunes est
considérable, que le Gouvernement revienne sur la parole donnée ? (M. le ministre marque son étonnement.) Je vous
serais donc reconnaissant de me faire connaître vos projets à ce jour.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, votre expérience et votre connaissance de la situation
de l'Ile-de-France vous permettent sans doute de savoir que rien n'est jamais figé...
La défense de notre pays a connu plusieurs réformes au cours du demi-siècle qui s'est écoulé : ses effectifs ne sont pas
ceux des années cinquante ; ses techniques ne sont plus celles des années soixante-dix. Nous devons donc, certes, être
attentifs aux intérêts du département que nous représentons, mais rester pour autant réceptifs à la nécessité de réformes et
d'adaptations. Je suis convaincu que nous convergeons sur ce point.
Le site de Brétigny-sur-Orge qui vous préoccupe est une emprise très vaste de 700 hectares, ce qui, du point de vue des
intérêts de la défense, est un élément très important. Sur ce site sont rassemblées de nombreuses activités relevant du
ministère de la défense mais aussi d'autres partenaires, notamment économiques.
Le centre d'essais en vol, qui constitue l'axe central du dispositif, est un employeur important puisqu'il compte plus de 900
agents. Il est l'opérateur unique de la plateforme aérienne, qui comprend deux pistes.
L'armée de l'air, de son côté, dispose de la base 217, dont les effectifs sont plus importants encore puisqu'ils dépassent le
millier. Ils comprennent, outre les effectifs opérationnels, ceux des services administratifs.
Le service de santé des armées est également présent sur ce site avec l'institut de médecine aérospatiale.
Des industriels ou des établissements publics profitent également des installations de ce site. Il s'agit de Thomson CSF, de
Sextant avionique, de la SAGEM, de Météo France et d'Eurocontrol.
De l'autre côté de la commune de Brétigny-sur-Orge, le groupement logistique du commissariat de l'armée de terre a un
effectif de près de 350 personnes.
Nous nous efforçons d'avoir une approche globale prenant en compte les potentialités de ce site et, comme j'ai déjà eu
l'occasion de l'indiquer à d'autres parlementaires qui s'en étaient préoccupés auprès de moi, je vous confirme qu'aucune
option affectant l'organisation du site de Brétigny-sur-Orge n'a été mise au point.
Une consultation des personnels a été entreprise au sein des établissements, notamment à la direction des centres
d'expertises et d'essais, que nous devons réformer et que le gouvernement précédent a choisi de restructurer en réduisant
substantiellement les effectifs.
Compte tenu des limites budgétaires dans lesquelles je dois agir, je devrai en effet poursuivre cette action de réduction
des effectifs de la direction des centres d'essais qui a été initiée par le gouvernement précédent. Il est certain que cette
action aura également des répercussions sur l'établissement de Brétigny-sur-Orge.
C'est la raison pour laquelle il a été vraisemblablement porté à votre connaissance que des études étaient faites sur
l'évolution de ce site. Cela est parfaitement exact.
Le rapport final de propositions pour l'ensemble des sites de la direction des centres d'essais va m'être adressé par le
délégué général pour l'armement. J'aurai à arrêter des décisions, qui seront soumises au Gouvernement dans le courant de
l'année 1998.
Je peux affirmer que, au-delà des évolutions qui seront certainement décidées en vertu du principe que je vous indiquais
tout à l'heure, il est à mes yeux impératif de conserver la présence de la défense sur ce site important. C'est une ligne de
conduite que je conserverai sur l'ensemble des choix de restructuration lorsque la défense détient auprès des grandes
villes des sites ayant un potentiel technique et une superficie importants. Dans la perspective d'un avenir éloigné, il relève à
mon avis d'une précaution élémentaire de conserver des sites et d'y maintenir une activité importante.
Par ailleurs, les capacités techniques très particulières du site de Brétigny-sur-Orge, dont beaucoup correspondent à des
investissements récents, doivent être mises en valeur. En poursuivant - comme c'est tout à fait naturel - la concertation
avec les partenaires locaux, je pense arrêter des décisions au cours du second semestre 1998 sur les réorganisations
devant toucher le site de Brétigny-sur-Orge sans aboutir à une réduction massive de son activité.
M. Jean-Jacques Robert. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Robert.
M. Jean-Jacques Robert. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse. Je vous ai vu « tiquer » quand j'ai
parlé de « parole donnée » ; je vois que vous souhaitez une évolution. Je partage votre sentiment, et ce n'est pas dans un
département comme le mien, dans la région d'Ile-de-France, que je pourrais ne pas accepter l'évolution, surtout s'agissant
d'une technique aussi pointue que celle de l'aviation.
Vous avez évoqué le rayonnement de notre centre ; il a aussi des effets sur la sous-traitance, nombreuse dans un
département qui, je l'ai dit, compte beaucoup de jeunes. Il est certain que, à partir du moment où il est envisagé une
modernisation des objectifs, on peut songer à l'important gisement d'emplois pour les jeunes que représente la
sous-traitance. Cela ne nécessite pas pour autant d'engager trop loin les finances publiques, sur lesquelles vous veillez
avec un soin jaloux, dans la continuité de l'action entreprise, comme vous avez bien voulu me le rappeler.
« Délocalisation » est un mot qui fait peur, même quand elle a pour cadre la France. C'est toujours un mauvais exemple
donné aux entreprises, qui sont souvent tentées, dans le climat économique actuel, de délocaliser à l'étranger. Les fleurons
de notre aviation, en particulier le centre d'essais en vol de Brétigny-sur-Orge, risquent de connaître un sort similaire.
Je transmettrai à mes amis du centre d'essais en vol le programme que vous venez de nous présenter et votre engagement
que les décisions seront prises après la plus large concertation avec les différents acteurs intéressés.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le sénateur, je compléterai mon propos pour vous indiquer qu'en
effet cette préoccupation de la relation avec le tissu économique local compte beaucoup pour moi.
Je voudrais par ailleurs souligner, au cas où cela vous aurait échappé, que le climat économique actuel se caractérise par
175 milliards de francs d'excédent commercial au cours de l'année 1997, par un nombre de créations d'emplois très
significatif au cours du second semestre et, actuellement, par une tendance à la croissance de 3,5 % par an.

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