Question de M. DÉSIRÉ Rodolphe (Martinique - RDSE) publiée le 05/02/1998

M. Rodolphe Désiré fait part de sa stupéfaction devant la teneur des propos tenus par un commissaire européen à la concurrence, à l'occasion d'un débat animé par un journaliste dans le cadre du colloque du Nouvel Observateur sur le rôle des hommes politiques, colloque intitulé " A quoi servent les hommes politiques ? " et qui a fait l'objet d'une édition en 1997 par Maisonneuve et Larose. On citera pour mémoire le passage incriminé. A une question du journaliste sur la difficulté pour la commission à accepter la pérennisation de disparités fiscales au niveau européen parce que relevant, selon elle, d'un " inacceptable dumping fiscal ", le commissaire européen a eu la réponse suivante : " Nous sommes en train de nous occuper de ce problème. Je donnerai un exemple qui créé beaucoup de turbulences. Les îles Canaries, membres de l'Union européenne, sollicitent un statut fiscal particulier. L'histoire leur avait certes déjà conféré certains privilèges dans ce domaine, privilèges qu'elles souhaitent voir se développer davantage. Le Gouvernement espagnol, dépendant du soutien de certaines forces politiques régionalistes, a milité en faveur de l'adoption de clauses en faveur des régions ultrapériphériques dans le traité d'Amsterdam. Et la France a soutenu ces clauses ". Et devant l'étonnement du journaliste, le commissaire de répondre en ces termes : " Ce qui est réellement étonnant, c'est que le Gouvernement français m'a par la suite fait connaître son désaccord avec l'attribution d'un tel statut aux îles Canaries. D'un côté, on inclut une disposition dans le traité et, de l'autre, on attend de la Commission qu'elle s'y oppose ! Je viens d'ailleurs d'apprendre que le ministre espagnol souhaitait me voir évoquer ce dossier ! Le problème est plus général. Plusieurs pays accordent des régimes spéciaux. Il va falloir examiner tout cela afin de s'entendre sur un certain niveau de cohérence. Il est possible d'accepter certaines spécificités. Nous les avons acceptées pour la Corse. Nous les avons cantonnées à ce territoire pour éviter les dérapages. " Sic. Il demande par conséquent à M. le ministre délégué aux affaires européennes de bien vouloir préciser s'il s'agit bien là de la position actuelle du Gouvernement français, laquelle serait semble-t-il opposé à la mise en place d'un statut fiscal spécifique pour les régions ultra-périphériques telle qu'entérinée pourtant de manière implicite via la modification de l'article 227-2 du traité précité. Si cela est exact, ce serait donc aller à l'encontre des revendications de la majorité des forces économiques et politiques représentatives des DOM.

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Transmise au ministère : Économie


Réponse du ministère : Économie publiée le 07/05/1998

Réponse. - Dans le cadre de la Conférence intergouvernementale qui s'est clôturée lors du Conseil européen d'Amsterdam des 16 et 17 juin 1997, l'article 227 du traité CEE (champ d'application territorial) a été modifié pour permettre au Conseil d'adopter à la majorité qualifiée des mesures spécifiques en faveur des régions ultrapériphériques économiquement et socialement défavorisées. La France est favorable à l'application de mesures spécifiques à des régions ultrapériphériques qui, en compensant des handicaps régionaux réels, contribuent à favoriser leur développement. C'est en ce sens qu'elle a soutenu la modification de l'article 227 précité. Sur un plan fiscal, de telles mesures doivent cependant être compatibles avec les engagements pris par les Etats lors de l'adoption, par le conseil des ministres ECOFIN du 1er décembre 1997, d'un code de conduite en matière de fiscalité des entreprises, applicable sur l'ensemble du territoire de la Communauté européenne. A ce titre, elles doivent respecter notamment le fait que les avantages fiscaux doivent être applicables indifféremment aux résidents et non-résidents et que ces avantages sont liés à la réalisation d'une activité économique réelle et à une présence économique substantielle sur le territoire de l'Etat dispensateur de l'avantage. La reconnaissance d'un statut fiscal spécifique à certaines régions ultrapériphériques ne doit donc pas conduire à mettre en place des régimes fiscaux susceptibles d'être considérés comme vecteurs de compétition fiscale au regard des principes destinés à favoriser l'implantation d'activité offshore dans le secteur financier : celles-ci en effet, en l'absence d'installation réelle sur le plan local, ne participent pas de manière satisfaisante au soutien de l'économie locale. De tels régimes ne sont pas non plus justifiés par l'existence de handicaps régionaux réels (éloignement nécessitant l'engagement de frais de transport importants) lesquels ne peuvent être invoqués pour des activités financières. Il ne répond pas en conséquence aux objectifs recherchés sur le plan communautaire. Pour autant, le code de conduite ne devrait pas aboutir à la remise en cause des avantages fiscaux accordés aux DOM, dans la mesure où ces avantages ne visent pas les activités les plus mobiles sur le plan international.

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