Question de M. LECLERC Dominique (Indre-et-Loire - RPR) publiée le 06/03/1998

Question posée en séance publique le 05/03/1998

M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'intérieur.
A la suite du tragique assassinat du préfet Erignac, qui a suscité de vives réactions, nombreux sont ceux qui citent la Corse
comme une zone de « non-droit ».
S'il est exact que l'autorité de l'Etat est bafouée en Corse depuis des décennies, ces départements ne sont
malheureusement pas les seuls concernés par ce problème.
En tant qu'élu d'Indre-et-Loire, j'ai dû faire face à des poussées de violence qui sont vécues par l'ensemble de nos
administrés, notamment les commerçants, comme de véritables violations de leurs droits de citoyen.
Cependant, face à ces situations explosives, et toujours latentes, jusqu'à ce jour, aucune solution susceptible de leur
apporter une amélioration n'a été proposée.
Or, chaque fois que des atteintes aux personnes et aux biens restent impunies, chaque fois que les forces de l'ordre ne
peuvent pénétrer dans un quartier - ce qui arrive - chaque fois que règnent la loi du plus fort, l'insécurité, la violence, c'est
l'autorité de l'Etat qui se trouve mise en cause. Et c'est d'autant plus difficile à comprendre que notre pays est doté d'une
législation tout à fait appropriée pour lutter contre ces dérives.
En un mot, il suffirait que la loi soit appliquée.
Mais, faute de moyens dans certains cas ou par manque de volonté politique dans d'autres, les Français ont l'impression
d'être abandonnés à leur sort, sans que la puissance publique remplisse les missions qui sont les siennes.
C'est en partie pour ces raisons que nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à exprimer non seulement leur
amertume mais aussi leurs inquiétudes par un désintérêt pour la vie publique et une réserve vis-à-vis de la classe politique.
En conséquence, monsieur le ministre, ne semble-t-il pas urgent que le Gouvernement prenne des dispositions afin que
l'Etat républicain soit respecté sur l'ensemble du territoire et que le non-droit ne puisse continuer à s'installer impunément
en certains endroits de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du ministère : Relations avec le Parlement publiée le 06/03/1998

Réponse apportée en séance publique le 05/03/1998

M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, la détermination du
Gouvernement à lutter contre la criminalité et la délinquance, en Corse comme sur l'ensemble du territoire français, ne
saurait être mise en doute.
Cependant, le problème de la Corse n'est pas comparable à celui des banlieues. La Corse ne connaît pas les problèmes
sociaux que rencontrent certaines banlieues du continent, et la délinquance financière ou le non-respect d'obligations
légales en matière d'impôt ou de code de la construction sont des phénomènes qui lui sont propres.
Je vous rappelle à ce sujet que, en Corse, le Gouvernement a soutenu l'idée de la création d'une commission d'enquête
parlementaire, qui approfondira le travail effectué précédemment par la commission conduite par M. Cuq, député. Dans
les documents publiés par cette commission, vous pourrez trouver, monsieur le sénateur, des éléments d'information sur la
spécificité de la criminalité en Corse.
L'application rigoureuse de la loi en matière de sécurité publique à l'encontre de ceux qui s'affranchissent du pacte
républicain est l'une des conditions de l'application, ou de la restauration de la règle de droit, en Corse comme ailleurs.
Néanmoins, elle n'est pas suffisante, à elle seule, pour faire reculer l'insécurité dans une société confrontée, comme bien
d'autres sociétés modernes, à une crise sociale, morale et économique qui met à mal repères, valeurs et exemplarité des
comportements.
Lors du colloque de Villepinte, le ministre de l'intérieur ainsi que le Premier ministre ont réaffirmé l'importance du rappel
des valeurs républicaines à tous les niveaux de la société, l'importance du rôle des parents vis-à-vis des mineurs,
l'importance du rôle des élus vis-à-vis de tous nos compatriotes.
Le projet de loi d'orientation, de prévention et de lutte contre les exclusions, qui vient d'être présenté au conseil des
ministres par Mme Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, représente l'un des éléments de la réponse.
En ce qui concerne la sécurité, des moyens supplémentaires sont mis en oeuvre par le Gouvernement. Les redéploiements
de crédits interviendront en faveur des zones dans lesquelles les problèmes se posent avec le plus d'acuité, tant il est vrai
que, si la sécurité est indispensable pour tous et partout, il ne faut cependant pas que les moyens soient répartis de
manière égalitaire, au risque, sinon, de susciter, pour nos concitoyens, de nouvelles inégalités en ce qui concerne la
sécurité.
Ainsi, 8 250 adjoints de sécurité seront présents dans les quartiers d'ici à la fin de l'année. Déjà plus de mille d'entre eux
sont en fonction sur le terrain. Les agents locaux de médiation sociale participent également à cette action.
Au total, ce sont 35 000 postes qui seront créés en deux ans.
Dans les villes et dans les agglomérations, sont conclus des contrats locaux de sécurité qui fédèrent les énergies après un
diagnostic exhaustif. Vingt-cinq de ces contrats sont aujourd'hui signés, et trois cent quatre-vingt-neuf sont en cours
d'élaboration.
Enfin, il convient de le rappeler, l'ensemble des ministères sont totalement impliqués dans cette lutte contre l'insécurité et
pour la défense du pacte républicain. Ce combat est une priorité affirmée par M. le Premier ministre et trouve son
application, au quotidien, sur le terrain.
J'ajoute que M. le Premier ministre a créé un Conseil de sécurité intérieure regroupant tous les ministères concernés, afin
qu'il y ait une véritable reconquête pour la sécurité et la tranquillité de nos concitoyens.
M. Emmanuel Hamel. N'abandonnez pas les zones rurales !
M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement. Le Conseil de sécurité intérieure se réunira le 9 mars
prochain et sera conduit à traiter de nouveau de l'ensemble de ces questions.
Monsieur le sénateur, voilà l'expression de cette volonté politique à laquelle vous faisiez référence et qui se traduit par des
mesures concrètes au service de nos compatriotes. Fort de cette volonté, ce gouvernement engagera les moyens
nécessaires afin qu'effectivement l'insécurité recule et que la sécurité progresse. (Applaudissements sur les travées
socialistes.)

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