Question de M. HURIET Claude (Meurthe-et-Moselle - UC) publiée le 30/04/1998

M. Claude Huriet appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la contestation de la matérialité des " avancées " chinoises en fait de droits de l'homme. Dans sa réponse à la question écrite no 5967 sur les suites à donner au rapport de la Commission internationale des juristes (CIJ) sur le Tibet (Journal officiel, Débats parlementaires Sénat, du 23 avril 1998), il spécifie en effet que les recommandations de la CIJ comme la nomination d'un coordinateur spécial sur le Tibet " ne favoriserait pas les démarches en cours dans le cadre des dialogues que la Chine a ouvert avec plusieurs pays occidentaux ". Il cite, comme apports de ces dialogues, la signature (en octobre 1997) du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, l'annonce (en mars 1998) de la signature du pacte relatif aux droits civils et politiques, la mission de personnalités religieuses américaines en février 1998, etc. Dans une réponse antérieure (question no 3630, Journal officiel, Débats parlementaires Sénat, du 5 février 1998), il soulignait également à ce titre la mise en liberté du dissident Wei Jingheng. Or la sincérité de ces " avancées " est largement contestée par des experts, des organisations non gouvernementales (ONG) et les intéressés eux-mêmes. Parmi cet " habile exercice diplomatique ", il est intéressant de relever qu'aucune date n'a été fixée pour la signature du pacte des Nations Unies sur les droits civils et politiques ; que la Commission des trois religieux américains n'a pas été libre de ses investigations sur la liberté religieuse en Chine et qu'en conséquence elle a refusé, par exemple, de rencontrer le Panchen Lama mis en place par le gouvernement de Pékin ; que M. Wei Jingsheng a souligné que la libération du dissident Wang Dan " ne signifiait rien ", que celui-ci n'avait " pas été autorisé à être libre dans son propre pays " et que lui-même, expulsé également pour " raisons médicales ", était toujours considéré en Chine comme un prisonnier dont la condamnation courait toujours. C'est pourquoi, pour répondre à ces contestations, il le prie de vouloir bien lui faire connaître si le pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels a été ratifié par la Chine et s'il est possible également de tracer un bilan de l'application des Convention internationales dont ce pays est déjà signataire en matière de protection des droits fondamentaux de la personne humaine. Il lui demande aussi quelles conséquences politiques et juridiques la France tire de déclaration du rapport de la CIJ selon laquelle les Tibétains sont " un "peuple sous domination étrangère", et, en tant que tel, peuvent se prévaloir du droit à l'autodétermination prévu en droit international ". Enfin, il souhaiterait connaître quel mandat et quels moyens seront donnés aux ambassadeurs européens en poste en Chine lors de leur prochain déplacement au Tibet afin qu'ils puissent être assurés du caractère complet et fiable des constatations qu'ils pourront faire.

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Réponse du ministère : Affaires étrangères publiée le 09/07/1998

Réponse. - L'honorable parlementaire a bien voulu attirer l'attention du ministre sur le problème du respect par la Chine de conventions internationales relatives aux droits de l'homme, sur les conséquences que le gouvernement français tire de la déclaration du rapport de la CIJ portant sur la situation du Tibet et sur les conditions de déroulement du voyage des ambassadeurs européens dans cette région. Sur le premier point, la Chine a signé en octobre 1997 le pacte des Nations Unies relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. La France espère que, comme elle s'y est engagée, la Chine procédera à la ratification parlementaire d'ici la fin de l'année, lui donnant ainsi une valeur contraignante. La Chine avait également annoncé, en février 1998, son intention de signer le pacte des Nations unies relatif aux droits civils et politiques. Le gouvernement français suit attentivement cette question et à déjà exprimé son souhait de voir cette signature intervenir d'ici la fin de l'année. La Chine a également ratifié la convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, signée en 1984 et entrée en vigueur en 1987, celle sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, en vigueur depuis 1981 et celle relative aux droits de l'enfant, entrée en vigueur depuis 1990. Le gouvernement français, comme ses partenaires de l'Union européenne, estime que ces mesures législatives témoignent d'une volonté certaine de la Chine d'améliorer la situation des droits de l'homme. La France et l'Union européenne ne manquent pas, par ailleurs, d'intervenir pour que des gestes supplémentaires soient accomplis et prêtent toute l'attention qu'il convient aux violations des droits de l'hommes sur le territoire chinois. Concernant le rapport de la CIJ concernant la situation du Tibet, la France a déjà pris position, par le passé, sur ce sujet. Le gouvernement français avait en son temps, pris note de l'adoption par l'assemblée générale de l'ONU en 1959, 1961 et 1965, de résolutions condamnant les violations des droits fondamentaux du peuple tibétain par les autorités chinoise. Lors de la reconnaissance du gouvernement de la République populaire de Chine, en 1964, dans ses frontières actuelles, la France comme la totalité des états ayant depuis engagé des relations diplomatiques avec la République populaire de Chine, a reconnu que le Tibet faisait partie de la Chine. L'assemblée générale des Nations Unies n'a pas contesté l'intégrité territoriale de la Chine en admettant ce pays en 1971 à l'ONU. De ce fait, la question d'un référendum sur l'autodétermination n'est pas posée. Enfin, concernant la visite des ambassadeurs européens au Tibet, la France se félicite de ce que les autorités chinoises aient tout mis en uvre pour en favoriser le bon déroulement. Les trois ambassadeurs ont pu avoir des contacts directs et des discussions sur tous les points sensibles avec les autorités locales et des habitants de cette région. Les trois ambassadeurs ont pu s'entretenir avec des représentants de la commission pour la restructuration de l'économie et du commerce, de la chambre de commerce, des bureaux judiciaires, de la sécurité publique, des affaires culturelles, de la Haute cour et de la commission des affaires nationales et religieuses, et visiter des monastères (Tashilhunpo, Drepung et Nechung). Pour faciliter ces contacts, les ambassadeurs ont été, pour la première fois, autorisés à recourir aux services d'un interprète européen de tibétain, M. Peter Roberts. Par ailleurs, les autorités chinoises ont réitéré l'invitaion qu'elles ont adressée à plusieurs assemblées parlementaires des états membres pour effectuer une visite au Tibet.

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