Question de M. DEMUYNCK Christian (Seine-Saint-Denis - RPR) publiée le 08/05/1998

M. Christian Demuynck attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement sur les conséquences que pourrait avoir le dysfonctionnement de la société Eco-Emballages chargées d'aider les collectivités locales à développer la collecte sélective des emballages ménagers. La presse a fait état d'un jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre, selon lequel le décret qui a créé Eco-Emballages serait non conforme à une directive européenne. Le logo présentant un rond et une flèche, qui figure sur tous les emballages, aurait dû être notifié à la Commission européenne avant d'être généralisé. Les collectivités locales qui ont Eco-Emballages pour partenaire, sont inquiètes de cette information parue dans la presse. Il lui demande si ce jugement risquerait de remettre en cause le bon fonctionnement de cette société agréée par l'Etat et chargée d'une mission de service public.

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Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 03/06/1998

Réponse apportée en séance publique le 02/06/1998

M. le président. La parole est à M. Demuynck, auteur de la question n° 268, adressée à Mme le ministre de
l'aménagement du territoire et de l'environnement.
M. Christian Demuynck. Madame le ministre, depuis quelques années, on parle beaucoup de collecte sélective. En
effet, la loi du 13 juillet 1992 prévoit qu'en 2002 les décharges devront être exclusivement réservées aux résidus ultimes,
c'est-à-dire non valorisables. Les communes françaises, responsables de la collecte et du traitement des déchets
qu'elles génèrent, doivent donc mettre en place un système de collecte permettant le tri en vue du recyclage.
Afin d'aider financièrement les villes, la société Eco-Emballages, qui gère un fonds financier alimenté par les
contributions des entreprises, a également été créée en 1992. A ce titre, elle a reçu un agrément conjoint de plusieurs
ministères qui a d'ailleurs été renouvelé en 1996.
Mais de nombreux maires qui se lancent dans ce type de collecte, ou qui vont prochainement le faire, ont été surpris
d'apprendre que l'existence même d'Eco-Emballages pourrait se révéler illégale. En effet, la presse a fait état d'un
jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre selon lequel le décret du 1er avril 1992, qui est à l'origine
d'Eco-Emballages, ne serait pas conforme à la directive européenne qu'il est censé appliquer.
La raison essentielle tient au fait que la règle technique de l'obligation de marquage des emballages faite aux
producteurs de déchets et qui est prévue dans ce décret n'a pas été notifiée à la Commission européenne, comme le
prévoit pourtant la réglementation communautaire. La Commission, qui n'a pas été informée des dispositions du décret
du 1er avril 1992, n'a donc pas pu procéder aux vérifications qui lui incombent, notamment en matière de libre
circulation des marchandises.
Les collectivités locales qui ont Eco-Emballages comme partenaire sont inquiètes de cette information, d'autant plus
que la presse a également déclaré qu'une société a engagé une procédure pour contester la légalité de la taxe payée
par les entreprises sur les emballages, taxe qui a été instituée par décret et non par un vote législatif.
Malgré ces difficultés, Eco-Emballages affiche sa volonté de remplir au mieux ses missions. Il semble d'ailleurs que des
modifications récentes dans le fonctionnement interne de cette société aient permis, ces dernières semaines, une
meilleure efficacité de ses services. Mais il n'en reste pas moins que le doute subsiste sur son avenir.
Madame le ministre, pouvez-vous aujourd'hui nous rassurer et nous préciser si cette situation risque, oui ou non, de
remettre en cause le bon fonctionnement de cette société agréée par l'Etat et chargée d'une mission deservice public ?
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le sénateur,
l'élimination des déchets d'emballages ménagers est soumise aux dispositions du décret du 1er avril 1992, qui impose
à tout producteur et à tout importateur ou, si le producteur ou l'importateur ne peuvent être identifiés, à la personne
responsable de la première mise sur le marché des produits commercialisés dans des emballages soit de pourvoir
elle-même à l'élimination des déchets résultant de l'abandon des emballages, soit de recourir à une entreprise ou un
organisme agréé.
Dans ce dernier cas, les personnes précitées, l'entreprise ou l'organisme agréé passent un contrat précisant la nature
de l'identification des emballages. Cette identification est destinée à permettre le contrôle des emballages mis sur le
marché. Elle peut être opérée de différentes manières, soit par l'apposition du numéro du code emballeur imposé par
des réglementations relatives à la sécurité des consommateurs, soit par la marque du produit. Ne nécessitant pas de
marquage ou de logo spécifique, elle ne saurait être assimilée à une norme ou une réglementation technique et ne
relève donc pas des dispositions de la directive 83/189 du 28 mai 1983, qui impose que le projet de texte,
préalablement à sa publication, fasse l'objet d'une notification préalable à la Commission.
En l'espèce, le décret du 1er avril 1992 a été notifié à la Commission postérieurement à sa publication, le 26 octobre
1993, sur le fondement de la directive-cadre du 15 juillet 1975 modifiée.
Ce décret du 1er avril 1992 a fait l'objet de quelques contestations devant les juridictions pénales françaises.
Dans un jugement récent du 26 février 1998, le tribunal de grande instance d'Auxerre a estimé que le décret précité
aurait dû être notifié à l'état de projet en application de la directive 83/189 du 28 mai 1983, compte tenu de l'obligation
imposée aux producteurs d'identifier les emballages qu'ils font prendre en charge par un organisme agréé. Ne l'ayant
pas été, le tribunal a jugé que le décret n'était pas conforme à la réglementation communautaire. En conséquence,
selon lui, il ne pouvait pas servir de base à des poursuites pénales.
La cour d'appel de Paris a été amenée récemment à statuer dans une affaire comparable dans laquelle les parties
avaient soulevé l'illégalité du décret du 1er avril 1992, au motif qu'il n'avait pas été notifié sur le fondement de la directive
83/189. La cour a rejeté dans un arrêt du 28 janvier 1998 cette exception d'illégalité.
Sur la base de la jurisprudence de la cour d'appel de Paris, le jugement du tribunal de grande instance d'Auxerre du 26
février 1998 n'est pas de nature à remettre en cause les missions, les objectifs ou le fonctionnement d'Eco-Emballages,
objectifs et fonctionnement que nous avons l'ambition d'améliorer puisque, vous le savez, nous sommes en train de
procéder à la refonte des barèmes de cette société.
M. Christian Demuynck. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck. Je vous remercie de ces informations. Nous voilà rassurés, madame la ministre. Les maires
qui travaillaient avec Eco-Emballages, ou ceux qui se préparent à le faire, seront satisfaits d'apprendre que cette
société respecte les normes et les règles en vigueur.

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