Question de M. MAHÉAS Jacques (Seine-Saint-Denis - SOC) publiée le 02/07/1998

M. Jacques Mahéas attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le défi violent des hooligans lors de manifestations sportives de nature internationale. Les événements récents en témoignent. La surveillance des supporters de football constitue un réel problème. Répartis en plusieurs groupes aux alentours ou dans les stades, munis de surcroît d'armes blanches et de téléphones portables, les hooligans, dont certains sont plus politisés et mieux organisés que d'autres, se livrent à des démonstrations de violence sans précédent et n'hésitent pas à harceler les forces de l'ordre avant de les attaquer. Or les procureurs de la République ont souvent des difficultés pour identifier les suspects, faute d'informations suffisantes. En conséquence, il la remercie de bien vouloir lui préciser quelles mesures elle envisage de prendre pour se prémunir contre le hooliganisme afin que ce phénomène social ne compromette pas à l'avenir le football.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 22/10/1998

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la lutte contre la violence commise à l'occasion des manifestations sportives est aujourd'hui au c ur des préoccupations des pouvoirs publics et en particulier de l'autorité judiciaire. Le dispositif juridique et judiciaire mis en place lors de la coupe du monde de football qui s'est déroulée du 10 juin au 12 juillet 1998 constitue la plus parfaite illustration du rôle assumé par la justice à l'occasion d'incidents ou de débordements constitutifs d'infractions pénales. Ce dispositif local et national a permis d'assurer une bonne coordination de l'action des autorités judiciaires et administratives en favorisant la mise en uvre de la législation pénale relative à la sécurité des manifestations sportives dans le cadre d'une réponse judiciaire rapide et adpatée. Les résultats obtenus et les enseignements tirés de cette expérience exceptionnelle sont de nature à renforcer l'efficacité de l'action de l'autorité judiciaire lors du déroulement des rencontres de football du championnat de la coupe de France, et bientôt, à l'occasion des matches des coupes d'Europe. Les procureurs de la République disposent dorénavant des moyens appropriés destinés à répondre aux agissements répréhensibles des groupes dits de " hooligan ". Des infractions et des peines spécifiques ont été créées comme par exemple : la pénétration par force ou par ruse, en état d'ivresse, dans une enceinte sportive lors du déroulement ou de la retransmission en public d'une manifestation sportive ; la provocation par quelque moyen que ce soit des spectateurs à la haine ou à la violence à l'égard de l'arbitre, d'un juge sportif, d'un joueur et de toute autre personne ou groupe de personnes ; l'introduction, le port ou l'exhibition d'insignes, de signes ou de symboles rappelant une idéologie raciste ou xénophobe ; l'introduction de fusées ou artifices de toute nature ainsi que l'introduction sans motif légitime de tous objets susceptibles de constituer une arme au sens de l'article 132-75 du code pénal ; le jet d'un projectile présentant un danger pour la sécurité des personnes ; le fait de troubler le déroulement de la compétition ou de porter atteinte à la sécurité des personnes et des biens en pénétrant sur l'aire de compétition d'une enceinte sportive. Et en ce qui concerne le peines : l'interdiction pour une durée maximum de cinq ans d'accéder à une ou plusieurs enceintes où se déroule une manifestation sportive, ou encore l'interdiction du territoire français pour une durée limitée à deux ans, si la personne condamnée n'est pas de nationalité française. Si cette législation spécifique s'est avérée particulièrement adaptée au " phénomène hooligan " en raison de son caractère tant préventif que répressif, il est toutefois apparu que son champ d'application restait trop limité, dans la mesure où elle ne concernait que des infractions commises à l'intérieur d'une enceinte sportive. Or, les principaux débordements survenus au cours de ces dernières années, à l'occasion de rencontres de football, se sont le plus souvent déroulés à l'extérieur des stades, dans un laps de temps qui précédait ou suivait la manifestation. Aussi, la loi nº 98-146 du 6 mars 1998 a modifié le champ d'application des textes antérieurs en rendant les peines complémentaires applicables à certaines infractions du code pénal, commises à l'extérieur d'une enceinte sportive, à la condition qu'une " relation directe " ait été établie entre ces infractions et la manifestation sportive. Le traitement judiciaire du " hooliganisme " relève de la responsabilité de chacun des parquets concernés. Aussi, les procureurs de la République s'attachent dans le cadre de leur mission de direction de la police judiciaire à donner toutes les intructions indispensables à la recherche et à la constatation des infractions, à organiser des contrôles judiciaires préalables réalisés à proximité ou au sein des enceintes sportives, à veiller à l'efficacité des moyens spécifiques de police judiciaire mis en place à l'occasion des matches de football, à être informés immédiatement de tous les incidents survenus à l'occasion de la rencontre sportive et à assurer une présence effective du parquet sur le site afin de permettre à l'institution judiciaire d'apporter une réponse systématique et immédiate aux infractions pénales établies. La généralisation du traitement en temps réel des infractions pénales, mode d'organisation et de fonctionnnement d'ores et déjà adopté par la grande majorité des parquets, permet de répondre à l'objectif de célérité. Par ailleurs, s'agissant des supporters étrangers, le développement de la coopération internationale permet aux services enquêteurs de disposer d'éléments de personnalité concernant les personnes mises en cause, éléments pouvant être versés dans le dossier de la procédure et débattus contradictoirement devant les juridictions de jugement. En conséquence, le ministère de la justice a élaboré un dispositif judiciaire et juridique destiné à éviter que des débordements ou incidents violents suscités par une minorité ne viennent ternir des rencontres de football qui doivent rester des événements sportifs et festifs.

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Erratum : JO du 19/11/1998 p.3725

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