Question de M. PLASAIT Bernard (Paris - RI) publiée le 10/09/1998

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les modalités de la réforme du statut juridique du groupe Caisse d'épargne. S'il reconnaît le bien-fondé de l'adoption du statut coopératif qui aidera le groupe à poursuivre sa mutation, il s'inquiète du montant envisagé pour la constitution du capital social initial. En effet, la transformation des caisses d'épargne actuelles en caisses d'épargne coopératives nécessite la fixation, par la loi, du montant global des parts sociales du réseau des caisses d'épargne qui seraient vendues aux sociétaires. Pour constituer ainsi leur capital, les caisses d'épargne vont, dans les années à venir, devoir mener une vaste action d'information et de sensibilisation pour vendre massivement des parts sociales au plus grand nombre possible de clients sociétaires. Si nul ne conteste que les sommes collectées soient réservées à l'Etat qui les utilisera selon des modalités encore à définir, il apparaît néanmoins que la fixation du capital statutaire de l'ensemble des caisses d'épargne au-delà de 12,5 milliards de francs mettrait les caisses d'épargne devant des contraintes financières considérables et de sérieuses difficultés. Le groupe serait ainsi désavantagé par rapport aux autres groupes mutualistes dont le niveau de capital statutaire est nettement inférieur, d'autant que la moyenne observée est que le capital représente 25 % des fonds propres du groupe caisses d'épargne après provisionnement du passif social. De plus, la vente de 12,5 milliards de parts sociales serait très difficile à réaliser. Or le chiffre envisagé actuellement est de 23 milliards. Si le groupe ne peut placer que 12,5 milliards, il devrait procéder à une ponction de plus de 10 milliards sur ses fonds propres pour répondre aux attentes de l'Etat. Enfin, la rémunération des parts au-delà de 12,5 milliards pèserait en tout état de cause gravement sur les résultats futurs du groupe. Dans ces conditions, il lui demande de bien vouloir lui préciser ses intentions sur ce point.

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Réponse du ministère : Économie publiée le 04/02/1999

Réponse. - Les caisses d'épargne occupent une place originale et précieuse dans le paysage bancaire français. Elles constituent un grand réseau de l'économie sociale, enraciné dans la nation et cher aux Français qui sont près de trente millions à être devenus leurs clients. Fortes de leur histoire, les caisses d'épargne ont su se développer et jouer un rôle essentiel dans la protection de l'épargne populaire et le financement du logement social, au service de l'intérêt général. Elles se trouvent aujourd'hui à un tournant de leur histoire. L'enjeu, c'est de leur permettre de jouer tout leur rôle dans un secteur bancaire en pleine évolution. Dans ce cadre, les caisses d'épargne possèdent d'ores et déjà de nombreux atouts (dynamisme commercial, capacité de distribution, densité du réseau, etc.). Pour tirer pleinement parti des évolutions à venir, elles doivent néanmoins s'adapter et clarifier leur statut. Les handicaps auxquels elles se trouvent confrontés, et notamment leur isolement statutaire, entravent en effet leur développement et les empêchent de remplir pleinement leur rôle d'intérêt général. C'est pourquoi le conseil des ministres a adopté le 2 décembre dernier un projet de loi de modernisation des caisses d'épargne. Ce projet a fait l'objet d'une très large concertation : mission de six mois menée par M. Raymond Douyère, député de la Sarthe, de novembre 1997 à avril 1998 (près de trois cents personnes de tous horizons rencontrés : salariés et dirigeants des caisses d'épargne, organisations syndicales, élus locaux, personnalités qualifiées, etc.) ; concertation avec l'ensemble des acteurs du réseau de mai à novembre 1998. Ce projet de loi reconnaît et définit, pour la première fois de leur histoire, les missions d'intérêt général des caisses d'épargne : le Gouvernement se refuse à toute banalisation du livret A ; une partie de leur résultat sera affectée à des dépenses d'intérêt local et social ; le produit de cession du capital social sera affecté au fonds de réserve pour les retraites qui, par la constitution d'une réserve financière, participe à l'équilibre à long terme et à la sauvegarde des régimes de retraite par répartition. Il dote les caisses d'épargne d'un statut coopératif, porteur des valeurs de solidarité et de participation, qui permet de concilier responsabilité individuelle et solidarité collective et qui leur permet de préserver leur spécificité. Il garantit leur solidité financière, qui restera très largement supérieure à celle des autres banques françaises : le ratio de solvabilité du groupe sera, à l'issue de la réforme, supérieur d'environ 50 % à celui de la moyenne des banques françaises. Il ne comporte enfin aucune disposition sur leur système de retraite, dont l'évolution relève de la négociation entre les partenaires sociaux. Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie veillera toutefois à ce que la négociation en cours assure le respect des droits des salariés. Au total, ce projet de loi permet de donner aux caisses d'épargne une légitimité nouvelle fondée sur un vaste sociétariat, de réaffirmer leur vocation d'établissement de proximité et de trouver un nouvel élan au bénéfice de la solidarité.

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