Question de M. RENAR Ivan (Nord - CRC) publiée le 21/10/1998

M. Ivan Renar attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur les modalités restrictives de reclassement qui s'appliquent à certains maîtres auxiliaires qui deviennent titulaires. En effet, selon les textes en vigueur, des maîtres auxiliaires recrutés MA III, puis accédant au cours de leur service au grade de MA II, Ma I, sont pénalisés dans leur reclassement d'accès à la titularisation, étant moins bien classés que s'ils étaient restés MA III. Cette situation, qui pénalise l'effort et le travail, est vécue par les intéressés comme une réelle injustice. En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'il compte prendre pour y remédier.

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Réponse du ministère : Éducation publiée le 16/12/1998

Réponse apportée en séance publique le 15/12/1998

M. Ivan Renar. Monsieur le ministre, je veux vous interroger aujourd'hui sur les conditions restrictives de reclassement
qui s'appliquent à certains maîtres auxiliaires accédant à un corps de personnels titulaires de l'éducation nationale.
En effet, les maîtres auxiliaires recrutés au grade de maître auxiliaire troisième catégorie, MA III, et qui accèdent, au
cours de leur service, au grade de maître auxiliaire deuxième catégorie, MA II, ou à celui de maître auxiliaire première
catégorie, MA I, sont pénalisés dans leur reclassement d'accès à la titularisation.
La mise en oeuvre du reclassement est régie par un décret du 5 décembre 1951.
Sans entrer dans les détails techniques et très précis contenus dans ce texte, il apparaît que les modes de prise en
compte de l'ancienneté des maîtres auxiliaires et de leurs services effectués ont été modifiés au fil des années. Il en
résulte une reconstitution de carrière qui ignore la totalité des services effectués par le maître auxiliaire.
Concrètement, cela se traduit, pour un maître auxiliaire en catégorie III, par exemple, par un reclassement moins
avantageux lors de son accès à un corps de fonctionnaires titulaires s'il accède en même temps à la catégorie II, que
s'il était resté dans sa catégorie d'origine. Ce qui est une promotion, justifiée par l'obtention d'un nouveau titre
universitaire, devient donc un désavantage. Les maîtres auxiliaires qui, en plus de leur service, ont travaillé pour obtenir
de nouveaux diplômes, sont sanctionnés, étant moins bien reclassés que s'ils étaient restés dans leur catégorie
d'origine.
Je citerai l'exemple d'un maître auxiliaire de deuxième catégorie reçu certifié à la session de 1997. A la date de son
reclassement, il a accumulé dix ans de services antérieurs, neuf ans en catégorie III et un an en catégorie II. Il sera
reclassé au deuxième échelon de professeur certifié avec un reliquat d'ancienneté de sept mois et sept jours !
Admettons tout de même le paradoxe et l'injustice de cette situation !
Les protestations et revendications des maîtres auxiliaires et de leurs représentants syndicaux n'ont pu jusqu'à présent
déboucher sur une modification des règles appliquées.
Si chacun reconnaît le caractère anormal de ces reclassements et le bien-fondé des demandes des maîtres auxiliaires,
rien n'évolue, les réponses apportées n'évoquant que « l'impossibilité de trouver une solution réglementaire pour lever les
difficultés ».
Ne faut-il pas voir derrière cette formule une difficulté financière qui empêcherait de rétablir des règles justes ? Il serait
d'ailleurs intéressant, monsieur le ministre, de savoir précisément le nombre de maîtres auxiliaires concernés par ce
reclassement.
Je me fais donc ici l'interprète des maîtres auxiliaires qui souhaitent voir enfin prises les mesures de justice leur
garantissant un reclassement prenant en compte toute leur ancienneté et les efforts accomplis pour progresser dans
leur profession.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Vous avez raison, monsieur
le sénateur, d'attirer l'attention sur ce problème des maîtres auxiliaires, lesquels ont constitué pendant des années la
variable d'ajustement au sein de l'éducation nationale : leur recrutement et leur renvoi s'effectuaient en effet au gré des
adaptations à opérer dans tel ou tel endroit.
La politique a radicalement changé depuis notre arrivée au Gouvernement. En effet, les 10 000 maîtres auxiliaires qui
devaient être mis à la porte par M. Bayrou, alors ministre de l'éducation nationale, ont été réembauchés, et ils sont
intégrés régulièrement - 4 000 l'ont été cette année - selon les règles en vigueur dans la fonction publique, c'est-à-dire
par des concours spécifiques.
Il n'en demeure pas moins que le point que vous dénoncez, dans cette intégration, présente un caractère tout à fait
anormal.
L'article 8 du décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951 modifié précise que les agents sont nommés dans leur nouveau
grade avec une ancienneté égale à celle qu'ils avaient acquise dans leur précédent grade, multipliée par le rapport des
coefficients caractéristiques de ce grade au coefficient caractéristique du nouveau grade. C'est donc l'ancienneté dans
le dernier grade et non l'ancienneté totale de service qui est prise en compte.
Cette position, très anormale, a toutefois été récemment confirmée par la cour administrative d'appel de Nantes, dans
l'arrêt Laroze du 2 octobre 1997. L'application stricte de cet article peut conduire à reclasser moins avantageusement
un maître auxiliaire de catégorie II qui aurait auparavant accompli des services en tant que maître auxiliaire de catégorie
III mais qui ne serait que depuis peu de temps en catégorie II, par rapport à un maître auxiliaire ayant accompli la même
durée de service dans la seule catégorie III.
Cette situation ne nous a pas échappé. Jusqu'à présent, malgré une étude approfondie, et pour des raisons qui ne sont
pas financières, aucune solution réglementaire satisfaisante n'a pu être trouvée.
Comme vous, monsieur le sénateur, je suis assez étonné, pour ne pas dire plus, de cet état de fait, et je considère moi
aussi qu'il s'agit là d'une profonde anomalie. Nous essayons de faire modifier cette disposition, mais cette dernière, qui
s'applique lors de la titularisation de fonctionnaires appartenant à nombre de catégories, relève essentiellement de la
compétence de mon collègue en charge de la fonction publique.
M. Ivan Renar. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre coup de chapeau aux maîtres auxiliaires comme de
votre appel passionné publié hier dans un grand journal du soir, appel qui, j'espère, nourrira la réflexion de tous ceux
qui, dans ce pays, gravitent autour de l'éducation nationale.
Je vous remercie également de votre réponse, même si cette dernière ne me donne pas entièrement satisfaction. En
effet, perdure une situation totalement injuste qui pénalise les efforts, le travail accompli et les diplômes d'un certain
nombre de personnes travaillant dans l'éducation nationale.
Ce système que vous déplorez, comme moi-même, est un encouragement à l'immobilisme et donne des armes à ceux
qui montrent du doigt le métier d'enseignant.
Ne pourrait-on trouver une solution similaire à celle qui a été mise en oeuvre pour les instituteurs et les professeurs
d'école, à la suite de la négociation que vous avez conduite voilà quelque temps, et qui permettrait aux maîtres
auxiliaires de changer complètement de catégorie ? Il faudrait en effet trouver des règles de classement harmonisées
pour tous les maîtres auxiliaires, à la fois pour les futurs reclassés mais aussi pour tous les autres qui doivent retrouver,
selon moi, toute leur ancienneté.
En tout cas, monsieur le ministre, je vous remercie de vos efforts et de ceux de votre collègue en charge de la fonction
publique.

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