Question de M. DUFAUT Alain (Vaucluse - RPR) publiée le 15/10/1998

M. Alain Dufaut attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences négatives de l'application d'usages locaux souvent très anciens et jamais abrogés contre des dispositions légales. Ainsi, par exemple, en matière de distances de plantation des limites séparatives de propriété, le positionnement de haies est réglementé dans le département de Vaucluse par l'article 671 du code civil depuis des décennies. Or un récent jugement s'est appuyé sur un recueil des usages locaux datant de 1917 pour condamner plusieurs propriétaires à l'arrachage de leurs haies, alors que le recueil susvisé s'appliquait à une division administrative et à une réalité physique du terrain complètement différente depuis cette date. Aussi il lui demande quelle est sa réaction face à cette situation et s'il ne serait pas opportun de prendre de nouvelles dispositions pour qu'en l'absence d'usages locaux fermement établis, le recours au code civil soit systématique.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 10/12/1998

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, al'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que l'article 671 du code civil renvoie aux règlements existants ou aux usages constants et reconnus pour déterminer la distance entre les plantations et la ligne séparative de deux fonds et, à défaut, fixe cette distance. Le recours aux usages permet une adaptation de la norme, non seulement dans l'espace, car les usages sont locaux, mais aussi dans le temps, les usages, bien que constitués par une pratique généralisée et prolongée, pouvant évoluer. Leur mode de preuve permet la prise en compte d'une éventuelle évolution. En effet, ils peuvent être établis par tous moyens : recueils publics ou privés, mais aussi témoignages, avis d'experts, attestations ou certificats de personnes ou organismes, sans que l'un de ces modes n'ait juridiquement une autorité supérieure aux autres, et leur existence est appréciée souverainement par les juges du fond, au vu des éléments de preuve produits contradictoirement discutés. La reconnaissance judiciaire de l'extension en Ile-de-France, au fur et à mesure de l'urbanisation, de l'usage parisien d'absence de distance illustre cette possibilité de changement. Ainsi apparaît-il qu'en exigeant des usages qu'ils soient constants et reconnus, sans paralyser la prise en compte de leur évolution, les règles actuellement en vigueur répondent à la préoccupation de l'honorable parlementaire. Au surplus, les critiques divergentes dont font parfois l'objet les distances subsidiairement prévues par le texte précité confirment l'opportunité du renvoi aux usages.

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