Question de Mme BEAUDEAU Marie-Claude (Val-d'Oise - CRC) publiée le 15/10/1998

Mme Marie-Claude Beaudeau attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les écarts du prix de l'eau dans notre pays, variant de 10 francs à 37 francs le mètre cube. Elle lui fait remarquer que des causes diverses expliquent ces différences historiques, techniques, de modernisation des systèmes de distribution, modes de gestion... Elle lui demande de lui faire connaître son analyse sur cette question, les mesures qu'il envisage de prendre pour tendre vers un abaissement et une uniformisation des prix pratiqués. Elle lui demande s'il n'estime pas nécessaire de procéder à la nationalisation des grands groupes qui gèrent 80 % des réseaux et portent pour une large part la responsabilité de la situation évoquée.

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Transmise au ministère : Aménagement du territoire


Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 11/03/1999

Réponse. - Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie a transmis à la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement votre question concernant le prix de l'eau et la gestion des services d'eau et d'assainissement. Les engagements internationaux souscrits par la France, et notamment les directives européennes relatives à la qualité des eaux de consommation et au traitement des eaux résiduaires urbaines, impliquent des investissements importants pour certaines communes dont les installations ne sont pas encore conformes. Les travaux nécessaires étant financés par le prix de l'eau, des hausses inévitables apparaissent dans les communes ayant accumulé des retards. Le prix de l'eau a ainsi augmenté en moyenne de 8 % par an entre 1993 et 1997. Il est actuellement d'environ 16,50 francs le mètre cuble en moyenne. Une enquête réalisée par les services du ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement a mis en évidence que la hausse actuelle du prix de l'eau n'est plus que de 4 % par an en moyenne et en francs courants et que le rythme de cette augmentation continuera de se modérer. Cela s'explique notamment par la stabilisation des travaux aidés et du montant des redevances perçues par les agences de l'eau au cours de leur VIIe programme (1997-2001). La même enquête a par ailleurs mis en évidence que les prix des services en gestion déléguée sont en moyenne supérieurs de 22 % par rapport à ceux des services en régie. Cette différence de prix peut en partie s'expliquer par une plus grande complexité de gestion des installations déléguées. En effet, lorsqu'une collectivité choisit de déléguer le service de l'eau, c'est souvent parce qu'elle se trouve confrontée à de lourds mais nécessaires investissements dont elle ne peut assurer le financement. Dans ce cas, la société exploitante assure le plus souvent le préfinancement des ouvrages en se rémunérant par la suite par des augmentations régulières du prix de l'eau. Les régies ne disposent pas d'une telle souplesse de financement. Pour améliorer la transparence du prix de l'eau distribuée aux consommateurs et du coût des services publics de l'eau et de l'assainissement, plusieurs dispositions ont été prises au cours des récentes années : chaque mairie est désormais tenue de mettre à la disposition du public un rapport annuel sur la qualité et le financement de son service d'eau et d'assainissement (décret du 6 mai 1995) ; l'arrêté du 10 juillet 1996 qui est déjà entré en vigueur pour les communes de plus de 30 000 habitants permet de normaliser, simplifier et clarifier la présentation des factures d'eau reçues par chaque abonné ; une commission consultative des services publics locaux a été créée par la loi du 6 février 1992 relative à l'aménagement du territoire. Cette commission, obligatoire dans les commune de plus de 3 500 habitants, permet d'associer les usagers à la gestion des services d'eau et d'assainissement ; la loi du 29 juillet 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques a créé un cadre légal pour les procédures de délégation (art. L. 141-1-1 à L. 141-1-18 du code général des collectivités territoriales). Consciente de la nécessité de compléter ces dispositions pour répondre à la demande sociale d'une parfaite transparence du fonctionnement des services publics d'eau et d'assainissement, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a présenté le 20 mai dernier en conseil des ministres les grands axes de réforme des instruments d'intervention publique dans le domaine de l'eau. La création d'un Haut Conseil du service public de l'eau et de l'assainissement a notamment été décidée. Le haut conseil sera placé auprès des ministres chargés de l'environnement, de l'économie et de la consommation. Il aura pour mission principale une meilleure transparence du secteur économique de l'eau et de l'assainissement. Dans cette optique, il rendra des avis : sur l'évolution du prix de l'eau et sur les effets respectifs de la régie et de la gestion déléguée ; sur les composantes de la facture d'eau et sur les pratiques parfois abusives de détermination de la part fixe de la facture ; sur les contrats de délégation de service public, à la demande des collectivités territoriales ou des associations nationales de consommateurs. Il proposera notamment toute mesure d'amélioration du contenu des rapports annuels présentés aux conseils municipaux sur la gestion des services de l'eau et de l'assainissement. Grâce à ses pouvoirs d'alerte des ministre concernés et des préfets, il permettra un renforcement des garanties des citoyens dans leurs relations avec les services de distribution d'eau. Compte tenu des situations particulières et singulières de chaque commune, la gestion des services d'eau et d'assainissement ne peut se faire que localement, contrairement à ce qui existe pour l'électricité ou le téléphone. En effet, la distribution de l'eau potable et l'assainissement des eaux usées sont avant tout des services de proximité qu'il convient d'adapter à chaque cas particulier, notamment à l'abondance de la ressource en eau, la sensibilité du cours d'eau et des nappes phréatiques. Aussi semble-t-il difficile de centraliser la gestion financière des services d'eau et d'assainissement pour uniformiser le prix de l'eau sur le territoire national. Il convient par contre de porter une attention particulière à l'accès à l'alimentation en eau potable des personnes en difficulté, notamment en application de l'article 72 de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions. La charte Solidarité-Eau est actuellement mise en uvre par les préfets sur la base de négociations contractuelles avec les services d'eau. Une première évaluation en a été faite par l'UNIOPSS (Union nationale interfédérale des uvres et organismes privés sanitaires et sociaux). Complémentairement à cette évaluation, la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement proposera un renforcement du dispositif pour garantir la satisfaction des besoins essentiels en eau des usagers indépendamment de leur niveau de ressources tout en préservant l'équilibre financier du service. Dans ce but, ses services étudient la révision de l'article 13 de la loi sur l'eau de 1992, qui porte sur la tarification de l'eau. Il faut signaler enfin que des mécanismes de solidarité et de péréquation existent déjà au niveau national (le FNDAE), au niveau des bassins (les agences de l'eau), au niveau départemental (les conseils généraux) et au niveau des communes (syndicats intercommunaux de péréquation) : ils doivent être encouragés afin que les communes les moins favorisées puissent disposer de financements suffisants pour affronter les enjeux de la politique de l'eau.

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