Question de Mme PRINTZ Gisèle (Moselle - SOC) publiée le 10/12/1998

Mme Gisèle Printz appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le problème des élus agriculteurs, maires, adjoints ou conseillers municipaux, exploitants de biens communaux risquant d'être sanctionnés par le code pénal pour prise illégale d'intérêts. Selon les textes actuels, ils n'ont apparemment d'autre alternative que de renoncer soit au renouvellement de leur bail en cours de mandat, soit à leur mandat. A l'heure où de nombreux élus locaux expriment un profond malaise, elle pense qu'il n'est pas nécessaire de leur imposer, en plus, ce dilemme cornélien. Des textes de loi ont déjà vu le jour, notamment au Sénat, mais n'ont pas abouti à ce jour. Elle lui demande donc s'il entend faire le point sur les textes législatifs en cours d'examen sur ce sujet, afin que ces agriculteurs puissent combiner activité professionnelle et engagement au service de la collectivité.

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Réponse du ministère : Intérieur publiée le 10/06/1999

Réponse. - L'article 432-12 du code pénal qui réprime le délit de prise illégale d'intérêts, fait interdiction à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public, de contracter avec la collectivité qu'elle administre. Toutefois l'article 432-12 précité prévoit des dérogations limitativement énumérées, à l'interdiction de contracter, en faveur des maires, adjoints ou conseillers municipaux délégués ou agissant en remplacement du maire des communes de 3 500 habitants au plus. Ces dérogations sont d'interprétation stricte et ne peuvent s'appliquer à des opérations qui ne sont pas expressément visées par la loi. Il en résulte que les élus des communes de 3 500 habitants au plus ne peuvent conclure durant leur mandat des baux ruraux. Le fait pour l'élu de s'abstenir de toute participation à la préparation et au vote de la délibération autorisant la conclusion d'un bail rural ne saurait d'ailleurs écarter le risque de prise illégale d'intérêts. En effet, la cour de cassation a estimé que la surveillance au sens de l'article 432-12 du code pénal peut se réduire à " de simples pouvoirs de préparation ou de proposition de décisions prises par d'autres ", (cass. crim., 7 octobre 1976). En revanche, le renouvellement, même tacite, d'un bail rural au profit d'un élu qui n'a pas cette qualité au moment de la conclusion du bail, ne peut être assimilé à la conclusion d'un bail entièrement nouveau par un élu au cours de l'exercice de son mandat. Il en résulte que le titulaire du bail devenu élu bénéficie d'un droit au renouvellement automatique acquis du fait d'un contrat souscrit antérieurement à son accession aux fonctions municipales, et donc à un moment où n'existait aucun conflit d'intérêts justifiant l'application de la loi pénale. Par ailleurs, le caractère très fortement encadré du statut du bail rural permet de considérer que la place laissée à la manifestation de volonté des parties est limitée, singulièrement dans l'hypothèse d'un renouvellement par tacite reconduction. Sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, il peut donc être soutenu que le délit de prise ou de conservation illégales d'intérêts n'est pas caractérisé dans cette hypothèse, et ce d'autant plus que les clauses et conditions du nouveau contrat sont les mêmes que celles du contrat précédent. Compte tenu de ces éléments, une modification de la loi, dans la perspective d'autoriser le renouvellement des baux ruraux dont bénéficient les élus locaux et portant sur des biens communaux, ne semble pas nécessaire.

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