Question de M. LECLERC Dominique (Indre-et-Loire - RPR) publiée le 04/03/1999

M. Dominique Leclerc appelle l'attention de Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité sur le budget des hôpitaux publics et, en particulier, sur l'évolution de la dotation budgétaire des hôpitaux de la région centre pour 1999. La circulaire ministérielle du 26 novembre 1998 fixant l'évolution des dotations des hôpitaux pour 1999 annonce une orientation générale inscrivant la campagne budgétaire dans le cadre de la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire et un objectif prioritaire visant à concentrer l'effort de réduction des inégalités sur les régions qui en ont le plus besoin. Le SROS implique, outre une planification à moyen terme, la redéfinition des missions et objectifs des établissements dans le cadre de contrats négociés avec l'agence régionale et une recherche de complémentarité dans le cadre de contrats inter-établissements. Or, en raison de l'insuffisance de la dotation budgétaire régionale pour 1999, il s'avère que la reconduction seule des moyens courants et dépenses imposées par les normes sécuritaires consommera la totalité de l'enveloppe et enlèvera toute possibilité de mener des actions planifiées et contractualisées. C'est pourquoi, il lui demande quels moyens le Gouvernement entend mettre en oeuvre afin de donner aux hôpitaux de la région Centre la possibilité d'appliquer les orientations fixées par circulaire ministérielle.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 19/05/1999

Réponse apportée en séance publique le 18/05/1999

M. Dominique Leclerc. Monsieur le secrétaire d'Etat, je souhaite attirer votre attention sur les moyens octroyés aux
hôpitaux de la région Centre au regard de la campagne budgétaire 1999 des établissements sanitaires.
En effet, pour cette campagne, une circulaire du 26 novembre 1998 a arrêté non seulement une orientation générale - la
campagne doit s'inscrire dans le cadre de la révision des schémas régionaux d'organisation sanitaire, les SROS - mais
aussi un objectif prioritaire : concentrer l'effort de réduction des inégalités sur les régions qui en ont le plus besoin.
Pour atteindre cet objectif, cette fameuse circulaire a fixé le taux d'évolution de la région Centre à 2,28 %, ce qui peut
effectivement paraître assez favorable puisque le taux national est de 2,04 %. Toutefois, ce taux, établi à partir de
différents critères, dont deux semblent inadéquats ou plus ou moins inéquitables, ne tient pas compte de la réalité qui
est la nôtre.
Conséquemment, la dotation allouée à notre région semble insuffisante pour permettre à ses établissements de
respecter l'orientation générale de la circulaire.
Les deux premiers critères, à savoir les dépenses hospitalières par habitant hospitalisable dans le secteur public et
l'efficience économique mesurée en coût du point ISA, sont pertinents. Ils expriment bien les besoins de la population
en matière de soins et l'efficience économique des professionnels pour répondre à ces besoins.
En revanche, tenir compte du coût des patients traités hors de leur région d'habitation, d'une part, et de l'indice
comparatif de mortalité générale, d'autre part, semble plus critiquable.
En effet, prendre en considération le coût des patients traités hors de leur région d'habitation est, en premier lieu,
totalement inéquitable. Cela conduit à doter une deuxième fois l'établissement qui reçoit le malade pour sa prestation.
Est-ce bien normal ?
En second lieu, ce critère n'et pas porteur de changement du tissu hospitalier. Il entérine la fuite des patients pour se
faire soigner et interdit ainsi toute politique d'aménagement du territoire en matière d'offre de soins.
Par ailleurs, que dire de l'indice comparatif de mortalité générale, si ce n'est que ce critère de répartition est inadéquat
pour doter les établissements ? En effet, les sommes versées au titre de ce dernier critère ne modifient en rien
l'évolution de son niveau.
Vous l'aurez compris, mon sentiment à l'égard de ces deux nouveaux critères qui ont présidé à la dernière répartition
interrégionale est négatif, car ils ne permettent pas d'évaluer correctement la réalité du terrain, et plus spécialement
celle de notre région.
Alors que notre région est sous-dotée si l'on tient compte des deux premiers critères, elle se rapproche de la moyenne
nationale si l'on prend en considération les deux derniers.
C'est pourquoi il est, à mon sens, urgent de mettre un terme aux disparités entre régions - nous nous rejoignons - et de
mettre en place un outil d'évaluation suffisamment performant et fiable qui couvrirait l'ensemble des structures et
permettrait d'apprécier et de comparer la performance globale des dispositifs régionaux d'offre de soins.
Ma question est donc la suivante, monsieur le secrétaire d'Etat : êtes-vous prêt à mesurer et à prendre en compte
l'efficience des structures d'offre ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat, pour répondre à cette importante question.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale. Monsieur le président, je réponds à cette
importante question devant des orfèvres !
Monsieur le sénateur, à Poitiers, où j'étais hier, le centre hospitalier universitaire de la région Poitou-Charentes, qui
n'est pas très éloignée de la vôtre, présente des caractéristiques qui ne sont pas très éloignées de celles de la région
Centre.
Par le passé, les régions étaient pratiquement considérées de la même manière ; or il fallait bien réduire certaines
inégalités. Nous essayons donc d'affiner la situation. C'est sans doute imparfait, j'en suis le premier convaincu, et votre
président de séance sans doute aussi.
Je n'accepte pas de reconnaître l'importance que devraient avoir les deux critères que sont l'indice de mortalité et le flux
de personnes extérieures à la région considérée, car ils sont encore trop approximatifs, alors que nous devons
rechercher une plus juste répartition.
Avant de répondre précisément à votre question, je dirai qu'avoir retenu le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie, le
Poitou-Charentes et l'Alsace comme étant des régions souffrant d'un manque de financement par rapport à d'autres me
paraît légitime. En tout cas, c'est l'argument qu'hier, au CHU de Poitiers, on a très bien accepté parce qu'il est vrai que
nous avons doté très légèrement plus la région Poitou-Charentes, et ce nécessairement aux dépens des autres
régions.
Vous avez raison, monsieur le sénateur, de noter qu'en 1999 la dotation régionale de dépenses hospitalières de la
région Centre a progressé de 2,28 % par rapport à une moyenne nationale de 2,04 %. Mais la progression a toujours
été supérieure à la moyenne nationale, je connais les problèmes spécifiques de votre région. Nous avons, en effet, pris
en compte, d'une part, le flux des patients habitant hors région - c'est un des arguments avancés par les grosses
concentrations hospitalières - et, d'autre part, l'indice comparatif de mortalité.
Quels ont été les choix de l'agence régionale de l'hospitalisation de votre région pour la répartition de la dotation
généralisée pour 1999 ?
C'est, d'abord, la création d'une enveloppe de 50 millions de francs pour le financement de mesures nouvelles prévues
dans le cadre de contrats d'objectifs et de moyens ou justifiées par la mise en oeuvre des priorités ministérielles : avant
tout l'amélioration de la sécurité des soins, les schémas des « urgences » et de la « psychiatrie ». Je serai très attentif
- et je le suis déjà - à ce que la psychiatrie, qui est une spécialité qui s'interroge elle-même et qui ne trouve pas sa
place dans l'ouverture vers l'hôpital général, ne soit pas sous-dotée.
C'est, ensuite, l'actualisation des dépenses de personnel ou des dépenses médicales et pharmaceutiques en fonction
de la valeur du point d'indice synthétique d'activité, le fameux point ISA, qui, lui aussi, est imparfait mais qui correspond
tout de même à ce que nous avons trouvé pour le moment de plus juste.
C'est, enfin, la poursuite de la correction des inégalités entre établissements surdotés et sous-dotés à l'intérieur même
de la région, avec le souci de favoriser des complémentarités, voire des rapprochements.
Des dossiers d'investissement pour des établissements hospitaliers de la région ont été également constitués dans le
cadre de la programmation du Fonds d'investissement et de modernisation des hôpitaux pour 1999, pour 500 millions
de francs, monsieur le sénateur. Martine Aubry et moi-même examinerons ces demandes avec la plus grande attention
pour tenir compte de l'ancienneté du patrimoine hospitalier de la région et de la nécessaire politique d'ajustement dans
votre région Centre.
Par ailleurs, je vous rappelle, monsieur le sénateur, qu'un effort financier d'environ 20 millions de francs a été consenti
par le Gouvernement en fin d'année 1998 et au début de cette année pour permettre à l'Agence régionale de
l'hospitalisation un accroissement des activités, notamment pour les établissements dits référents. Je pense, par
exemple, au CHU de Tours et au centre hospitalier régional d'Orléans qui est le plus grand centre hospitalier non-CHU
de France.
Croyez bien, monsieur le sénateur, que nous continuons à suivre de près la politique hospitalière menée dans la région
Centre, et ce pour une raison très précise. En effet, les efforts de rapprochement - la complémentarité doit exister dans
ce domaine - entre les établissements publics et les établissements privés ont débouché sur des progrès
considérables, que nous tenons à soutenir.
Je me suis rendu à plusieurs reprises dans cette région et je le ferai à nouveau volontiers.
M. Dominique Leclerc. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'Etat, de votre réponse. Corriger au moyen de
critères que l'on peut discuter les inégalités entre régions est, il est vrai, chose difficile. Il faut par ailleurs - vous l'avez
fait - souligner le travail énorme qu'a accompli notre agence régionale sous la houlette de M. Marrot.
Au-delà des critères de péréquation, il faudra entreprendre une réforme du mode de financement des hôpitaux afin de
garantir le service public et la qualité des soins tout en accélérant cette recomposition du tissu hospitalier.
Cette réforme - vaste problème - ne doit cependant pas entraîner une régulation plus ou moins arbitraire et draconienne
du système hospitalier qui viderait l'hôpital public d'une part importante de ses ressources humaines, au détriment de la
qualité des soins et de la sécurité.
C'est pourquoi, pour répondre à ces attentes, il faudrait évoluer vers un système de financement fondé sur l'application
d'un double mécanisme : d'une part, une dotation destinée à financer l'ensemble des missions de service public et
sociales d'autre part, un système tarifaire fondé sur l'activité en fonction des pathologies des établissements en
considération de leurs seules performances.
Telles sont les raisons pour lesquelles, monsieur le secrétaire d'Etat, je voulais poser cette question ce matin.

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