Question de M. LAFFITTE Pierre (Alpes-Maritimes - RDSE) publiée le 02/10/1999

M. Pierre Laffitte attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la libéralisation de la cryptologie, qui facilite le commerce électronique mais qui n'est que partielle. Le projet de loi sur la signature électronique, pourtant fondamental et urgent d'après les informations données, n'est pas inscrit dans les priorités du débat parlementaire. Ne conviendrait-il pas de l'inscrire avant les débats budgétaires notamment au Sénat. Les pouvoirs publics enfin, devraient donner l'exemple. Ainsi, tous les appels d'offre de l'Etat, des services publics et des collectivités locales ainsi que les réponses devraient se faire par voie de messagerie électronique (sécurisée pour les réponses). C'est le sens d'une proposition de loi déposée au Sénat assortie de la mise en place d'un corpus de logiciels libres avec code source public. Le Premier ministre a affirmé à plusieurs reprises que ces questions étaient prioritaires. La dynamisation de l'économie française, la diminution des dépenses budgétaires pour les services publics et les collectivités locales et le rattrapage du retard français en matière de commerce électronique par rapport à certains pays ne méritent-ils pas que le ministère appuie fortement ces diverses mesures ?

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Réponse du ministère : Anciens combattants publiée le 03/11/1999

Réponse apportée en séance publique le 02/11/1999

M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma question a pour objet
d'attirer l'attention du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - mais cela concerne l'ensemble du
Gouvernement - sur la libéralisation de la cryptologie, qui facilite le développement du commerce électronique.
Le projet de loi relatif à la signature électronique présenté par Mme Guigou est fondamental et urgent. Or il n'est
toujours pas inscrit à l'ordre du jour prioritaire du Sénat. Cette incertitude concernant les priorités affichées par le
Gouvernement en matière de nouvelles technologies de l'information et de la communication est préoccupante.
Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d'Etat, obtenir des précisions quant à la date à laquelle nous pourrons débattre
de ce projet de loi, auquel le Sénat a l'intention d'adjoindre, sous la forme d'un amendement, une proposition de loi qui a
été déposée par mes collègues René Trégouët et Guy Cabanel et par moi-même.
Ce texte tend à préciser qu'il appartient à l'administration de développer la messagerie électronique. Ainsi, tous les
appels d'offres de l'Etat, des services publics et des collectivités locales devraient être lancés par voie de messagerie
électronique.
Il vise également à mettre en place un corpus de logiciels libres, afin de favoriser la démocratisation des relations entre
l'administration et la population. Ces logiciels libres sont, en effet, à la fois plus sûrs, moins chers et d'une dynamique
qui permettra de développer, en France et en Europe, une véritable industrie du logiciel libre.
Un forum de discussion a été ouvert au Sénat sur ce point et il connaît un succès extraordinaire auprès des internautes
: il a déjà donné lieu à près de huit cents réponses.
La communication est effectivement importante sur le plan non seulement français, mais également mondial. Nous
saluons cette initiative, qui permet, notamment, d'éviter le monopole de fait de certaines grandes sociétés.
Le Gouvernement est-il prêt à soutenir cette proposition de loi et à inscrire rapidement à l'ordre du jour du Sénat le
projet de loi de Mme Guigou ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur,
Christian Pierret aurait souhaité vous répondre lui-même ; mais il est retenu en province sur un site industriel. Cette
question intéresse toutefois l'ensemble de la société et tous les membres du Gouvernement.
Vous connaissez bien ce sujet, sur lequel vous oeuvrez depuis longtemps et sur lequel vous avez incité le Sénat à
beaucoup travailler, et ce à juste titre. Il s'agit, en effet, d'une question fondamentale, puisque la société de l'information
annonce l'avènement d'une nouvelle civilisation.
Vous avez voulu attirer l'attention sur un certain nombre de points liés au développement et à la sécurisation du
commerce électronique.
Tout d'abord, le projet de loi portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relatif à la
signature électronique lève des obstacles juridiques importants au développement des échanges dématérialisés : il
reconnaît explicitement la valeur probante du document numérique et la signature électronique. Le Gouvernement
présentera très prochainement ce texte au Parlement.
Par ailleurs, une réforme du code des marchés publics est en cours. Cette réforme prendra notamment en compte la
nécessité de permettre la publication et la gestion par voie électronique des appels d'offres de l'Etat, des services
publics et des collectivités locales.
Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie est conscient du rôle que jouent les logiciels libres dans le
développement d'Internet et du commerce électronique. Nous suivons avec attention les opportunités croissantes
d'utilisation de ces outils par les acteurs tant publics que privés.
Enfin, vous évoquez la question importante de l'évolution de la réglementation de la cryptologie. Sur un réseau ouvert
comme Internet, la confidentialité des échanges est effectivement un enjeu essentiel. Les entreprises sont de plus en
plus nombreuses à utiliser des réseaux privés virtuels pour améliorer leur efficacité et leur compétitivité ; cette utilisation
doit se faire dans des conditions optimales de sécurité.
Par ailleurs, il est indispensable de sécuriser les moyens de paiement sur Internet pour conforter la confiance de
l'ensemble des acteurs, notamment les consommateurs, dans le commerce électronique. Les citoyens et les
entreprises ont donc besoin de pouvoir utiliser facilement des outils de cryptologie.
Le Gouvernement a décidé, lors du comité interministériel pour la société de l'information du 19 janvier 1999, de mettre
en oeuvre la liberté totale dans l'utilisation de la cryptologie en France. D'ores et déjà, en mars 1999, le seuil de la
cryptologie dont l'utilisation est libre a été relevé, par décret, de 40 bits à 128 bits, niveau considéré par les experts
comme assurant durablement une très grande sécurité.
Une seconde étape, d'ordre législatif, étendra cette liberté d'utilisation, en supprimant toute limitation tenant à la taille
des clés employées, ainsi que les contraintes qui pèsent actuellement sur la gestion de ces clés par un « tiers de
séquestre ». Les citoyens et les entreprises auront ainsi librement accès aux moyens de cryptologie disponibles sur le
marché et pourront choisir la manière dont ils utilisent ces moyens.
Cette seconde étape sera réalisée avec la loi sur la société de l'information que le Premier ministre a demandé de
préparer et qui sera présentée au Parlement l'an prochain. Ce texte constituera un grand rendez-vous entre le
Gouvernement et le Parlement pour adapter l'ensemble de notre cadre législatif au développement de la société de
l'information. Cette loi visera à la fois à clarifier la responsabilité des acteurs d'Internet, à assurer une plus large diffusion
des infrastructures d'accès à Internet et à permettre la sécurité et la loyauté des transactions en ligne.
Un document d'orientation a été rendu public le 5 octobre 1999. Il est soumis à consultation publique, notamment au
travers d'un forum de discussion ouvert sur le site Internet du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Cette procédure permettra à chacun de commenter et d'enrichir les propositions formulées par le Gouvernement.
Telles sont les quelques indications que je peux vous fournir en réponse à votre question, monsieur le sénateur.
M. Pierre Laffitte. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de cette réponse détaillée en ce qui concerne les
propositions du Gouvernement, à la réserve près qu'aucune date précise n'a été donnée quant à l'inscription à l'ordre du
jour du Sénat du projet de loi relatif à la signature électronique, ce que je regrette.
Vous savez comme moi, monsieur le secrétaire d'Etat, que les temps de réaction dans le domaine de l'informatique
sont très importants compte tenu de la rapidité nécessaire en matière de prise de décision sur le marché mondial.
Nos développeurs, nombreux et compétents, seront sans doute très satisfaits des propos que vous venez de tenir en ce
qui concerne, notamment, l'usage de la cryptologie, mais ils le seront plus encore, me semble-t-il, si les dispositions
annoncées sont mises en oeuvre le plus rapidement possible.
Des études sont en cours au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie comme au ministère de
l'équipement, des transports et du logement, pour déterminer les conséquences pratiques d'une utilisation d'Internet et
de la messagerie électronique en matière de marchés publics. On sait d'ores et déjà que, au ministère de l'équipement,
des transports et du logement, et pour les seules dépenses de l'Etat, il s'agit de plusieurs milliards de francs
d'économies. Les économies devraient être aussi importantes pour l'industrie. Il faut aussi compter avec la rapidité
croissante qu'une modification du code des marchés publics pourrait introduire. Au surplus, si l'on ajoute tous les
contrats passés par les collectivités locales, le chiffre des économies possibles peut facilement être doublé.
Au total, si l'on additionne les différents départements ministériels, y compris le secrétariat d'Etat aux anciens
combattants, monsieur le secrétaire d'Etat, nous pouvons nous attendre à des économies potentielles d'une dizaine de
milliards de francs. Dans ces conditions, monsieur le secrétaire d'Etat, autant mettre en oeuvre ces mesures le plus tôt
possible !

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