Question de M. MÉLENCHON Jean-Luc (Essonne - SOC) publiée le 14/10/1999

M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie sur la décision prise le 2 août 1999 d'abandonner le projet de synchrotron Soleil et de se rallier au projet britannique Diamond. La volonté de développer un pôle de recherche européen s'avère être, dans un contexte de concurrence mondiale croissante, un projet ambitieux et cohérent dans le cadre de l'Union européenne. Les évaluations menées à de multiples reprises par des comités d'experts nationaux et internationaux ainsi que la collaboration du Centre national de la recherche scientifique - Commissariat à l'énergie atomique (CNRS-CEA) et la mobilisation d'une large communauté scientifique et technique ont conclu cependant à la nécessité de construire un nouveau synchrotron en France. Les deux très grands équipements que possède la France dans ce domaine apparaissent en effet saturés. En moyenne, l'European Synchrotron Radiation Facility (ESFR), installé à Grenoble, ne peut actuellement accepter que 40 % des projets scientifiques. Le LURE, basé à Orsay, ne peut accepter quant à lui que 65 % des projets qui lui sont soumis. En outre, sur les quarante stations expérimentales du LURE, les plus performantes (une douzaine) sont contraintes de refuser faute de temps disponible deux tiers à trois quarts des demandes. Or seule la construction des deux projets Diamond et Soleil pourrait permettre d'accroître ce nombre de lignes très performantes (sur section droite). Diamond a en effet trois ans de retard sur le projet Soleil et l'installation commune ne pourra couvrir les besoins des deux pays, même au niveau où ils sont constatés aujourd'hui et alors que ce secteur attend encore une croissance pour les prochaines années en raison notamment du fort développement de la biologie. Les progrès accomplis dans le domaine des synchrotrons permettent actuellement de réaliser des sources polyvalentes de très hautes performances dont le coût est parfaitement compatible avec le niveau national, comme l'ont compris notamment l'Allemagne (qui en possède trois), la Suède, la Suisse, le Canada, Taïwan, la Corée, l'Italie, le Japon et les Etats-Unis, et qui sont devenus des outils indispensables dans un très grand nombre de secteurs de la recherche. Il lui demande quelle solution il envisage pour permettre aux équipes françaises de biologistes, chimistes, physiciens (de l'atome au solide), géo-et astrophysiciens ainsi qu'aux chercheurs et ingénieurs des industries pétrolière, chimique et pharmaceutique de continuer à travailler dans des conditions optimales pour les avancées de la recherche française.

- page 3360


Réponse du ministère : Éducation publiée le 20/01/2000

Réponse. - La politique conduite par le Gouvernement dans le domaine de la recherche publique poursuit deux objectifs fondamentaux : redonner à la recherche française une place de premier plan et faire de ce secteur un moteur de l'essor de l'économie et de la lutte contre le chômage. Ce double objectif ne peut être atteint qu'en favorisant l'émergence de disciplines nouvelles et en faisant une plus grande place aux jeunes. Ces nouvelles orientations justifient une réorganisation de la structure interne du budget civil de la recherche développement (BCRD). Cette mesure se traduit principalement par la réduction de l'aide directe apportée par l'Etat aux grandes entreprises et par la maîtrise des financements prévus pour les très grands équipements, au profit d'un déploiement des crédits pour le fonctionnement et l'équipement des laboratoires, ainsi que pour l'aide aux PME innovantes. Cette année encore, les gros équipements absorbent environ 50 % de l'augmentation du BCRD. Pour corriger cette situation le Gouvernement a décidé, après les réunions du CIRST en juillet 1998 et juin 1999, de ne plus construire ces équipements autrement que dans un cadre multinational européen. Cette décision doit permettre non seulement de dégager des crédits pour la mise en uvre des priorités retenues, mais également de favoriser la structuration d'une communauté scientifique européenne, dont l'activité autour des grands équipements est l'un des vecteurs. Après de nombreux contacts pris dès décembre 1998 avec les ministères des pays concernés par le rayonnement synchrotron de 3e génération, notamment la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et la Suisse, et après une réflexion conduite par les directions de la technologie et de la recherche, il est apparu que la construction de deux machines très semblables, telles que " Diamond " et " Soleil ", ne serait pas pertinente. C'est pour l'ensemble de ces raisons que le gouvernement français a décidé de coopérer avec le gouvernement britannique et la fondation Wellcome Trust pour la construction du synchrotron " Diamond ". La communauté scientifique française ne devrait pas être lésée par cette décision. D'une part, les équipements de cette nature en France ( l'ESRF à Grenoble et le LURE à Orsay) sont déjà importants et, d'autre part, cette communauté aura un accès au nouvel équipement, égal à celui des chercheur britanniques. Enfin il a été décidé, d'un commun accord avec les ministres britannique, allemand et italien, de mettre en place un consortium européen des gros équipements qui devrait permettre d'optimiser l'utilisation des installations européennes existantes et de développer les moyens futurs. S'il s'avérait dans ce cadre que la communauté scientifique européenne a besoin d'un nouveau synchrotron, sa construction pourra alors être envisagée en coopération avec l'ensemble des partenaires de la France.

- page 213

Page mise à jour le