Question de M. HUGOT Jean-Paul (Maine-et-Loire - RPR) publiée le 09/12/1999

M. Jean-Paul Hugot attire l'attention de Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement au sujet des inquiétudes exprimées par les professionnels des carrières quant aux risques d'une éventuelle taxation supplémentaire de leur activité. Il souhaite connaître précisément les intentions du Gouvernement et savoir dans quelle mesure il entend dégager un réel et cohérent équilibre entre les caractéristiques de ce secteur d'activité indispensable en matière d'équipement (routes, ouvrages d'art, logements) et les exigences de la politique environnementale. Etant entendu que de trop fortes contraintes sur les professionnels des carrières auraient pour fâcheuses et concomitantes conséquences d'une part de dramatiques pertes d'emplois liées à d'inévitables fermetures d'exploitations et d'autre part l'obligation de l'importation avec des coûts tant financiers qu'écologiques (augmentation du trafic de poids lourds ayant pour corollaires engorgement des réseaux et augmentation de la pollution atmosphérique) incontestables.

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Réponse du ministère : Aménagement du territoire publiée le 10/02/2000

Réponse. - La ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative aux inquiétudes que soulève chez les professionnels des carrières l'extension de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) aux granulats. La taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) n'est pas un impôt supplémentaire. C'est un instrument de modernisation, de simplification et de plus grande efficacité de la fiscalité écologique, à prélèvements globaux constants. A cet effet, la TGAP a une vocation universelle vis-à-vis de l'ensemble des activités polluantes ; elle est le cadre naturel d'accueil de la future écotaxe, actuellement en discussion sur le plan communautaire. En effet, jusqu'à présent, la fiscalité de l'environnement reposait sur un très grand nombre de taxes affectées, au rendement inégal et dont la fonction était de procurer les ressources nécessaires à la réparation des dommages occasionnés à l'environnement par les activités polluantes. Cette fonction permettait donc de réparer les dommages, dans les limites des ressources collectées ; elle n'incitait en revanche qu'insuffisamment à la limitation des activités polluantes et à l'adoption de comportements vertueux et plus respectueux de la préservation d'un environnement de qualité. A cet égard, la fiscalité de l'environnement traditionnelle, faute d'adresser un signal-prix au niveau nécessaire, ne permettait pas d'appliquer dans sa plénitude le principe pollueur-payeur. Il s'agit aujourd'hui de mieux pouvoir prévenir afin, demain, de moins réparer. La TGAP, en déconnectant le rendement de l'instrument fiscal du montant des ressources nécessaires à la réparation des dommages - qu'il faut, sans aucun doute, poursuivre - permettra d'adresser un signal-prix approprié. A titre d'exemple, l'augmentation de 50 % de la taxe sur la mise en décharge votée en 1998 par le Parlement dans le cadre de la TGAP a été combinée avec la réduction de 20,6 % à 5,5 % du taux de TVA appliquée aux activités de collecte sélective, de tri et de valorisation matière. A travers ces deux mesures, le Gouvernement, conformément à la communication de la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement du 28 août 1998 au Conseil des ministres, a clairement indiqué aux acteurs concernés qu'il souhaitait privilégier, dans les différents modes de traitement des déchets ménagers, la collecte séparative sur la mise en décharge et sur le recours à l'incinération, pour lequel le taux applicable de TVA demeure inchangé. Les pollutions de l'eau avaient vocation à être parties prenantes de la TGAP. Mais, le système français de gestion de l'eau, fondé sur une gestion par bassin versant et sur le principe de " l'eau paie l'eau ", est un système qui, malgré quelques imperfections auxquelles il convient de remédier, a fait preuve d'efficacité depuis plus de trente ans ; ce système fait d'ailleurs largement école tant sur le plan communautaire qu'au-delà. La ministre a donc souhaité préserver, valoriser et améliorer le système français de l'eau, ainsi qu'elle l'avait indiqué lors de la communication effectuée sur ce sujet, en Conseil des ministres, le 20 mai 1998. Les conditions dans lesquelles l'eau serait partie prenante de la TGAP n'ont donc été décidées qu'après la concertation la plus large et la plus approfondie possible et ont été validées par la conférence des présidents de comité de bassin. Cette concertation a, en effet, permis de dégager des principes d'application de la fiscalité environnementale au secteur de l'eau qui permettent une meilleure application du principe " pollueur-payeur ", garantissant ce qui fait la force du système français de l'eau. Ainsi, le système des redevances sera intégralement préservé pour financer les actions d'intérêt commun dans chaque bassin, telles qu'elles sont définies dans la loi sur l'eau de 1964. Leur système sera rendu constitutionnel par le vote d'une loi de programmation quinquennale qui fixera les assiettes des redevances et en encadrera le taux. Ces redevances seront réformées en profondeur pour les rendre davantage conformes au principe " pollueur-payeur ". Les concertations en cours concernent notamment la redevance sur la pollution domestique, qui est pour l'heure à la fois peu compréhensible et peu équitable, et sans lien direct avec la pollution rejetée. La TGAP elle-même ne s'appliquera pas aux redevances mais regroupera des prélèvements sur des produits polluants non concernés par le système des agences de l'eau. Ont été ainsi décidées pour 2000 la taxation des produits polluants dans les lessives, dont les phosphates, celle des produits phytosanitaires et celle des granulats. La taxe sur les granulats s'applique, comme le souhaitait d'ailleurs la profession des carriers, à l'ensemble de ces matériaux, quelle que soit leur provenance. Elle est motivée par l'importance de l'impact de ces extractions sur les milieux naturels, les paysages, la ressource en eau et, quant elle s'exerce dans les vallées alluviales, le fonctionnement des écosystèmes alluviaux. Elle vise à inciter à l'utilisation préférentielle de matériaux de recyclage, tels que les produits de démolition. Compte tenu de son taux modique (0,60 francs/tonne), elle représente moins de 2 % du prix de ces matériaux ; il semble donc peu vraisemblable qu'elle puisse mettre en péril l'équilibre des exploitations concernées. La loi de financement de la sécurité sociale a instauré la taxation des produits polluants mentionnés. La réforme des redevances des agences de l'eau fera l'objet, quant à elle, d'une loi de programmation sur l'eau que le Gouvernement projette de déposer sur le bureau du Parlement au plus tard au début de l'année 2001.

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