Question de M. DUFAUT Alain (Vaucluse - RPR) publiée le 16/12/1999

Au regard des nombreuses affaires liées aux réseaux nationaux et internationaux de vente de voitures volées M. Alain Dufaut attire l'attention de Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le vide juridique existant pour la prise en compte des intérêts légitimes des propriétaires ayant acquis, en toute légalité et de bonne foi, ce type de véhicules par l'intermédiaire d'un professionnel habilité. La justice se préoccupe, en effet, de réparer le tort causé au propriétaire d'origine, victime du vol, ou à sa compagnie d'assurance, mais néglige totalement de régler les problèmes du nouveau propriétaire, lorsqu'il y a eu revente du véhicule volé. Ces propriétaires sont, en effet, dans l'incapacité juridique de se porter partie civile car ils ne sont pas directement victimes des agissements du voleur et ne peuvent, le plus souvent, se voir confier la restitution provisoire de leur véhicule jusqu'à la date du jugement puisqu'il s'agit d'un " véhicule maquillé ". Il est anormal que le système judiciaire français fasse si peu de cas des " propriétaires intermédiaires ", possesseurs pourtant d'une carte grise établie par les services préfectoraux. Il semblerait nécessaire de pallier ce manque, en créant un fonds de compensation des grandes compagnies d'assurance, qui devrait permettre une indemnisation rapide, dans l'attente des dénouements judiciaires parfois très longs. Les compagnies se retourneraient ensuite, dans cette hypothèse, vers les assureurs du garagiste vendeur, pour récupérer leur contribution. Il souhaiterait donc connaître les dispositions qu'elle envisage de mettre en oeuvre pour corriger ces situations désormais de plus en plus fréquentes.

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Réponse du ministère : Justice publiée le 25/05/2000

Réponse. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que les dispositions du code civil régissant la revendication des meubles volés ne négligent pas les intérêts des acquéreurs de bonne foi. Alors que le propriétaire d'une chose perdue ou volée peut normalement exercer une action en revendication pendant trente ans à l'encontre du voleur ou du possesseur de mauvaise foi, l'article 2279 alinéa 2 du code civil enferme cette action dans un délai beaucoup plus court de trois ans lorsqu'elle est dirigée contre un acquéreur de bonne foi. L'article 2280 du même code oblige de surcroît le propriétaire, pour pouvoir reprendre son bien, à rembourser à l'acquéreur le prix que la chose lui a coûté, chaque fois que celle-ci a été achetée dans une vente publique, une foire ou un marché, ou chez un " marchand vendant des choses pareilles ". L'acquéreur peut enfin exercer une action en garantie d'éviction à l'encontre de son vendeur, qui lui permet d'être remboursé du prix qu'il a payé, s'il ne l'a pas été déjà par le revendiquant, et d'obtenir des dommages-intérêts réparant le préjudice qu'il a subi. Ainsi, loin de désavantager les acquéreurs de biens volés, le droit actuel réalise-t-il un équilibre entre leurs intérêts et ceux des propriétaires originaires. Le Gouvernement n'entend pas dans ces conditions donner suite à la proposition de création d'un fonds de compensation présentée par l'honorable parlementaire, d'autant que le mécanisme suggéré repose sur la faculté pour le fonds de recourir contre l'assureur du vendeur, qui se révélera souvent illusoire en l'absence d'assurance obligatoire.

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