Question de M. PLASAIT Bernard (Paris - RI) publiée le 23/03/2000

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les conséquences d'une productivité élevée en termes d'une part de poids des charges sociales et des réglementations et d'autre part le chômage. En effet, la main-d' oeuvre est un atout majeur pour les entreprises qui décident d'investir en France. Elles apprécient, notamment, la productivité des salariés français, pratiquement la plus élevée d'Europe derrière la Belgique. Elle est effectivement le résultat d'une compétence professionnelle reconnue, quels que soient les métiers et les niveaux. Mais en contrepartie, la productivité élevée est le résultat de charges sociales plus lourdes et de réglementations plus contraignantes qu'ailleurs, qui conduisent les entreprises à une gestion plus restrictive notamment en matière d'emploi. Le chômage est ainsi à coup sûr le tribut le plus cher payé à l'adaptation des entreprises depuis quinze ans : c'est ce que certains ont appelé la " préférence française pour le chômage ". Aussi, le remercie-t-il de bien vouloir lui indiquer s'il a l'intention, plutôt que de sacrifier le chômage sur l'autel de la productivité, de concilier au contraire compétitivité, productivité du travail et emploi, en procédant à temps aux inévitables réformes de la sphère publique et sociale.

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Réponse du ministère : Économie publiée le 23/08/2001

La volonté de garantir un salaire décent aux travailleurs les moins qualifiés a conduit à maintenir le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) à un niveau relativement élevé : depuis le début des années 1980, le SMIC brut s'est stabilisé à environ 60 % du salaire brut moyen alors que ce pourcentage d'échelonne entre 35 % et 55 % dans la plupart des pays de l'organisation pour la coopération de développement économique (OCDE). Tant que les cotisations sociales ont été calculées selon un principe de stricte proportionnalité au salaire brut, cette politique a induit un coût du travail relatif des peu qualifiés plus élevé que chez nos principaux partenaires. La contrepartie de ce coût élevé a été une substitution croissante du capital et du travail qualifié au travail peu qualifié, impliquant une productivité globale du travail élevée mais aussi un chômage élevé des travailleurs peu qualifiés. La réduction des charges sociales sur les bas salaires est apparue comme un moyen privilégié de stimuler la demande de travail peu qualifié sans réduire la rémunération nette des personnes concernées : en dehors même de toutes considérations de justice sociale, une politique qui réduirait cette rémunération nette aurait un impact négatif en déprimant l'offre de travail peu qualifié et en favorisant donc la persistance de trappes à inactivité. Cette stratégie, connue sous les termes " enrichissement de la croissance en emploi ", repose sur d'autres mesures que la seule réduction des charges sociales ciblée sur les bas salaires : l'abattement de 30 % sur le temps partiel, la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle (qui avantage les secteurs d'activité à forte intensité en main-d'oeuvre) ont également concouru à enrichir le contenu en emploi de la croissance : aujourd'hui, le seuil de croissance à partir duquel l'économie crée des emplois dans le secteur privé est inférieur à 1,5 % alors qu'il était supérieur à 2 % dans les années 1980. On peut estimer qu'une grande partie des emplois marchands crées depuis 1997 sont imputables à cet abaissement significatif du seuil de créations d'emploi. La loi relative à la réduction négociée du temps de travail (RTT) prend également en compte cette exigence de maîtrise du coût du travail en particulier pour les peu qualifiés. Par ailleurs, les aides publiques ciblées sur les bas salaires réduisent le risque d'un renchérissement du coût horaire du travail des peu qualifiés dans les entreprises passées au 35 heures, qui serait préjudiciable à l'emploi. Ainsi, l'aide forfaitaire de 4 000 francs par salarié (dont l'impact relatif décroît avec le niveau de salaire) et la ristourne dégressive, étendue à 1,8 SMIC pour les entreprises passant à 35 heures (avec pour corollaire la suppression progressive de l'abattement de 30 % sur le temps partiel), s'inscrivent pleinement dans cette démarche d'enrichissement de la croissance en emploi.

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