Question de M. DREYFUS-SCHMIDT Michel (Territoire de Belfort - SOC) publiée le 29/06/2000

Par question écrite du 22 octobre 1998 (nº 11534), réitérée le 21 octobre 1999 (nº 19661), M. Michel Dreyfus-Schmidt interrogeait Mme le secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés sur les graves dangers que ferait courir à la santé publique une consommation excessive en sel. Dans sa réponse du 11 novembre 1999, le ministère de la santé avançait une série d'arguments sur lesquels la présente question écrite revient. Il semble que des chercheurs de l'INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et de l'INRA (Institut national de la recherche agronomique) relayés en cela par l'AFSSA (Agence française de sécurité sanitaire des aliments) aient constaté l'absence d'étude clinique de grande envergure en France sur le sujet, contrairement à d'autres pays comme la Grande-Bretage, où le ministère de la santé a pu établir une consommation moyenne d'environ 12 g de sel par jour et par habitant (trois grammes étant la quantité quotidienne au-delà de laquelle les scientifiques conviennent que l'on s'expose à des problèmes de santé). Quant à l'enquête SU.VI.MAX mentionnée par le ministère de la santé dans sa réponse du 11 novembre 1999 et qui avance le chiffre de 3 grammes par jour, il paraîtrait qu'elle ne porte que sur le sel ajouté - ne correspondant qu'au cinquième de la consommation quotidienne totale - et reposerait sur des questionnaires individuels et par conséquent subjectifs. Le ministère de la santé britannique estimerait pour sa part que le nombre de morts dû à une consommation excessive en sel correspondrait à la mortalité tabagique, soit environ 50 000 décès par an. Considérant ce phénomène comme un problème de santé publique majeur à l'instar des Etats-Unis, de l'Australie ou de la Finlande, le gouvernement britannique a organisé le 10 février 2000 une journée nationale de lutte contre le sel, avec force couverture médiatique, ayant entraîné de la part des cinq plus grandes chaînes anglaises de supermarché et de l'ensemble des boulangers l'engagement d'une réduction significative de 10 à 40 % du chlorure de sodium contenu dans les aliments dit " préparés ". Il n'est pas douteux, comme la réponse ministérielle du 11 novembre 1999 le souligne, que le tabac ou l'alcool sont des problèmes de santé prioritaires. Reste que ces derniers font l'objet d'une large communication sur leur dangerosité respective, ce qui n'est pas le cas pour le chlorure de sodium. Compte tenu du fait qu'outre les quinze millions d'hypertendus et obèses directement concernés, plus d'un million de Français souffrant d'insuffisances cardiaques et rénales seraient fortement exposés à l'hypersalinité des aliments qu'ils consomment, il lui demande si, conformément au principe de précaution, il n'y aurait pas lieu d'entreprendre une campagne de sensibilisation nationale sur les dangers liés à la consommation excessive de sel. A tout le moins, aimerait-il connaître les mesures qu'elle entend mettre en place pour un étiquetage systématique indiquant la quantité de chlorure de sodium présente dans les aliments " préparés ". Etant entendu que si, comme le rappelait madame la secrétaire d'Etat dans sa réponse précitée, les règles européennes rendent optionnel un tel étiquetage (directive CE 90-946 du 24 septembre 1990), le principe de subsidiarité devrait permettre de le rendre obligatoire en France.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 30/11/2000

Réponse. - Depuis la réponse aux questions écrites nºs 11534 et 19661 traitant du même sujet, différentes instances scientifiques ont travaillé sur le thème de l'impact de la consommation de sel sur la santé publique. Le haut comité de la santé publique aborde le thème dans son rapport de juin 2000 intitulé " Pour une politique nutritionnelle de santé publique en France : enjeux et propositions ". Les groupes d'experts du conseil supérieur d'hygiène publique de France et de la commission interministérielle d'étude des produits destinés à une alimentation particulière (CEDAP) rendront prochainement un avis. De plus, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) coordonne une actualisation des apports nutritionnels conseillés pour la population française, incluant le sel, qui sera rendue publique prochainement. De ces travaux, il ressort que la moyenne de consommation réelle de sel recommandée pour la population, devrait se situer entre 6 et 8 grammes par jour. Plusieurs mesures vont être étudiées dans le proche avenir au sein des instances scientifiques compétentes visant à améliorer les tables de composition des aliments pour mieux estimer les apports sodés, disposer d'estimations fiables des apports sodés réels sur un échantillon représentatif de la population française, mettre en place un mécanisme de suivi régulier pour appréhender l'évolution des habitudes alimentaires, de l'état nutritionnel et de la morbimortalité cardio-vasculaire, y compris dans leurs relations avec le sel. Un groupe de travail va être réuni par l'AFSSA, associant les industriels, afin d'évaluer la faisabilité d'une réduction progressive du contenu en sel des aliments transformés, la plus grande partie du sodium consommé provenant non pas du sel ajouté par le consommateur mais des produits transformés. La question de l'étiquetage est régie par des réglementations communautaires. Une initiative française, sur ce sujet nécessiterait une clarification, entre experts, de la demande sur le type d'information souhaitée. En l'état actuel, il n'y a pas d'argument tendant à prouver que la situation en France est suffisamment différente de celle des pays voisins pour justifier de rendre l'étiquetage obligatoire et de recourir au principe de subsidiarité. Compte tenu de l'avis des comités d'experts, de la controverse sur le rôle exact des apports en sel dans la génèse de l'hypertension artérielle et des pathologies cardio-vasculaires au niveau de la population, il n'apparaît pas opportun de lancer une campagne publique sur un sujet où persistent des zones d'incertitude, qui risque de focaliser l'attention sur un élément de la nutrition quand l'ensemble du régime doit être pris en compte pour l'amélioration de l'état de santé et la réduction de la mortalité.

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