Question de M. ROUVIÈRE André (Gard - SOC) publiée le 03/10/2000

M. André Rouvière appelle l'attention de M. le ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés que rencontre la police nationale ou la gendarmerie lors de l'interpellation de certaines personnes qui circulent à bord de véhicules automobiles qui sont des épaves circulant sans permis, sans assurance et dont certains auraient dû être détruits. Récemment, la brigade de Besseges, dans le Gard, a interpellé un tel conducteur. Pour l'instant, le véhicule est immobilisé sans qu'il soit possible, semble-t-il, de le détruire alors qu'il est officiellement " détruit ". Dans le cas cité, le conducteur étant sans ressources officielles, les sanctions financières apparaissent vite comme utopiques. La législation ne paraît pas avoir prévu de telles situations, qui malheureusement sont de moins en moins exceptionnelles. Il lui demande quelle solution pourraît être apportée à une telle situation qui est particulièrement surprenante pour les automobilistes qui ont le souci de respecter la réglementation.

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Réponse du ministère : Santé publiée le 20/12/2000

Réponse apportée en séance publique le 19/12/2000

M. André Rouvière. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur la circulation, hélas
fréquente, du moins dans ma région, les Cévennes, de « voitures-épaves ».
Récemment, la gendarmerie de ma commune a arrêté une voiture que j'appellerai « fantôme
». En effet, elle avait été officiellement détruite, mais elle servait encore à un chauffeur sans
permis, sans assurance et, évidemment, sans carte grise.
Madame le secrétaire d'Etat, cette pratique, non exceptionnelle, me conduit à soulever trois
types de problèmes et à vous poser deux questions.
Premièrement, l'absence d'indemnisation en cas d'accident, particulièrement lorsque la
responsabilité de la voiture-épave est engagée, engendre des situations dramatiques qui
frappent les conducteurs sérieux, c'est-à-dire les personnes respectueuses de la
réglementation.
Deuxièmement, la sanction financière est utopique, car ces chauffeurs sont notoirement
insolvables. Ils n'acquittent jamais les amendes, ce qui les encourage à récidiver avec une
autre épave.
Troisièmement, une inégalité se développe entre la plupart des conducteurs et cette catégorie
qui, au titre de sa marginalité, se place au-dessus des lois.
Il en résulte un profond sentiment d'injustice et d'impuissance.
En conclusion, je poserai deux questions.
En premier lieu, ces voitures-épaves qui, je le rappelle, ont été officiellement détruites, ne
pourraient-elles pas, dès que leur conducteur est arrêté par la gendarmerie ou par la police,
être immédiatement détruites sans qu'il soit nécessaire de solliciter une autorisation de
l'autorité judiciaire ? En effet, pendant la durée des démarches - cela peut paraître
invraissemblable, mais c'est la réalité - ces chauffeurs d'épaves viennent souvent récupérer
des pièces détachées voire l'épave elle-même.
En second lieu, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour éradiquer ces
comportements dangereux et scandaleux ?
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et aux handicapés. Je vous prie de bien
vouloir excuser Mme Marylise Lebranchu, qui est retenue en comité technique paritaire et qui
m'a demandé de bien vouloir la remplacer ce matin. Je vais donc vous donner connaissance
de la réponse que ses services ont préparée à votre intention, monsieur le sénateur.
Les dispositions du code de la route relatives au contrôle administratif des véhicules semblent
répondre aux interrogations que vous formulez, monsieur le sénateur.
En effet, l'article R. 278 du code de la route autorise un service de police ou de gendarmerie à
immobiliser un véhicule, notamment lorsque son mauvais état crée un danger important pour
les autres usagers de la route.
En application de l'article R. 285-2 du code de la route, la mise en fourrière de ce véhicule
peut-être prescrite par un officier de police judiciaire.
L'administration peut demander à un expert de se prononcer sur la capacité du véhicule à
circuler dans des conditions normales de sécurité, aux termes de l'alinéa 2 de l'article R.
290-1 du code de la route.
Si l'expert désigné par l'administration estime la valeur marchande du véhicule inférieure à un
montant fixé par arrêté interministériel et déclare que le véhicule est hors d'état de circuler
dans des conditions normales de sécurité, ce véhicule sera livré à la destruction,
conformément à l'article L. 25-3 du code de la route.
En conséquence, toutes ces dispositions permettent de mettre hors circulation un véhicule à
l'état d'épave.
En fait, la difficulté rencontrée par le service de gendarmerie en charge de l'affaire à laquelle
vous avez fait allusion, monsieur le sénateur, pourrait provenir de l'absence d'une fourrière sur
le ressort de la brigade territoriale de gendarmerie compétente. Nous savons que des déficits
existent sur l'ensemble du territoire empêchant l'application correcte de la réglementation.
J'ajoute que le conducteur d'un véhicule à l'état d'épave mais circulant sur une voie ouverte à
la circulation publique peut, selon les circonstances, commettre de nombreuses infractions
non seulement au code de la route, mais également au code pénal, s'agissant notamment
des risques causés à autrui, délit visé à l'article 223-1 du code pénal.
Il peut donc, à ce titre, être poursuivi devant les tribunaux répressifs. En conclusion, il me
semble que l'on ne doit se priver d'aucune des procédures existantes pour éviter des
circulations dangereuses et sanctionner les conducteurs qui manifesteraient de tels
comportements.
M. André Rouvière. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Rouvière.
M. André Rouvière. Madame le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse.
J'avoue que le problème sur le terrain est parfois très complexe. Dans les Cévennes, les
fourrières sont peu nombreuses. Le véhicule est donc souvent immobilisé au bord de la route,
raison pour laquelle le chauffeur ou, plutôt, le chauffard peut venir récupérer des pièces et
parfois l'épave. On ne peut mettre un gendarme pour garder jour et nuit le véhicule concerné.
Je souligne que, dans la plupart des cas, les amendes ne sont pas payées.
Lorsqu'il n'y a pas eu d'accident, souvent l'interpellé n'est pas présenté devant la justice. Il
semble se situer au-dessus des lois, ce qui crée un véritable malaise dans des petites
communes où chacun sait ce qui se passe. La législation actuelle ne permet pas, me
semble-t-il, de résoudre ce problème. Il y a donc là une véritable interrogation. En effet, de
tels comportements ne sont pas exceptionnels, ils ont tendance à se généraliser dans
certains secteurs, notamment dans le mien, ce qui devient véritablement préoccupant. Aussi,
je me permet d'insister pour que ce problème soit réexaminé à la lumière des réalités du
terrain, madame le secrétaire d'Etat.

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