Question de M. MAMAN André (Français établis hors de France - UC-R) publiée le 02/11/2000

M. André Maman appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les chiffres, récemment parus, concernant la production industrielle de notre pays. En effet, il constate que l'économie française aurait perdu cinq millions d'heures de travail hebdomadaires depuis le début de l'année. Il relève que cette situation est totalement atypique en période de forte demande. Il considère que les entreprises n'ont pas compensé, par des embauches nouvelles, les heures perdues à la suite du passage aux 35 heures, soit parce qu'elles ont accentué leur effort de productivité, soit parce qu'elles n'ont pas trouvé le personnel nécessaire sur le marché du travail. En conséquence, il lui demande de lui indiquer quelle est la position de son ministère sur ce point, et quelles mesures il entend prendre, au regard de ces résultats.

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Réponse du ministère : Économie publiée le 23/08/2001

La montée en charge des 35 heures se traduit certes par une diminution sensible de la durée du travail. Cette baisse est néanmoins nettement inférieure à 2 % en glissement annuel. Compte tenu de la vigueur des créations d'emplois (3,2 %), le nombre d'heures travaillées dans l'économie française a sensiblement augmenté. Chaque trimestre, les services du ministère de l'emploi et de la solidarité publient l'évolution de la durée du travail, sur la base d'une enquête réalisée auprès des entreprises. Selon cette enquête, la durée du travail par salarié se serait réduite de 2,2 % au premier trimestre, de 0,7 % au deuxième et de 0,3 % au troisième trimestre, ce qui porterait la réduction à 4,1 % sur un an. Le passage aux 35 heures s'est notamment accéléré à l'hiver, avec la fin du dispositif incitatif Aubry I pour les entreprises de plus de vingt salariés. En tenant compte d'une croissance de l'emploi salarié estimée à 3,2 % en glissement annuel au deuxième trimestre, certains observateurs (Rexecode, la Banque de France) en concluent que le nombre d'heures travaillées a diminué au cours de l'année écoulée. L'exploitation de cette enquête, telle quelle, conduit toutefois à majorer considérablement l'ampleur de la baisse de la durée du travail par rapport à son évolution effective dans l'ensemble du secteur marchand, et ce, pour trois raisons : l'enquête ne couvre que les établissements de plus de dix salariés (soit un champ de 10 millions de salariés), ce qui conduit à surreprésenter les entreprises de plus de vingt salariés, pour lesquelles la baisse de la durée légale a eu lieu au 1er janvier 2001 (1) ; elle ne prend pas en compte l'évolution de la durée du travail des salariés à temps partiel, qui ne réduisent généralement pas leur durée du travail avec le passage aux 35 heures de leur entreprise. Au contraire, la mise en oeuvre de la RTT s'accompagnerait d'un effet d'éviction au détriment du temps partiel, qui serait amplifié par la suppression de l'abattement de cotisations sociales employeur spécifique (de 30 %) à partir de cette année, la progression récente du temps partiel serait ainsi stoppée et cesserait donc de contribuer à la réduction de la durée effective du travail ; dans les entreprises qui ne bénéficient pas de l'aide incitative, la baisse observée de la durée effective du travail est parfois moindre que ce que les entreprises indiquent dans leur réponse à l'enquête (2). En prenant en compte l'ensemble de ces biais, la baisse de la durée du travail dans le secteur marchand ne serait que de 1,9 % en glissement annuel au second semestre, au lieu de 4,3 %. Le volume d'heures travaillées progresserait par conséquent de 1,3 % sur la même période. Le nombre total d'heures travaillées continuerait de progresser en 2000 et 2001, en raison de la vigueur particulière de l'emploi. La durée effective du travail par salarié dans le secteur marchand ne serait réduite que de 1,6 % en moyenne annuelle en 2000 et 0,6 % en 2001, après 0,5 % l'année passée (tableau 1, graphique 1). Ainsi, le nombre de salariés concernés par la RTT s'inscrirait à 4,6 millions en fin d'année et à 6,8 millions à la fin 2001. Avec des créations d'emplois d'environ 460 000 en 2000 et 330 000 en 2001 - dont un total sur les deux années de 165 000 dus à la RTT (net des effets d'éviction défavorables au temps partiel) - l'emploi salarié dans le secteur marchand progresserait de 3,2 % et 2,5 % en moyenne annuelle en 2000 et 2001. Pour l'année 2000, les créations d'emplois atteignent d'ores et déjà 400 000 au troisième trimestre. Le nombre d'heures travaillées dans le secteur marchand augmenterait ainsi de 1,6 % en 2000 et 1,9 % en 2001, une progression du même ordre que celle enregistrée au cours des dernières années. La progression resterait donc relativement forte au regard des évolutions de longue période, et notamment de la légère diminution enregistrée sur la première moitié des années 90 (graphique 2).Tableau 1 : Durée du travail et nombre d'heures travaillées (1)<!DEBTAB><div align="center"><center><table border="1"><tr><th> </th><th> </th><th> </th><th colspan="2">PROJECTIONS (2)</th></tr><tr><th></th><th>1998</th><th>1999</th><th>2000</th><th>2001<br>Taux de croissance annuel, en %</th></tr><tr><td align="center">a) Durée du travail par salarié</td><td align="center">- 0,3</td><td align="center">- 0,5</td><td align="center">- 1,6</td><td align="center">- 0,6</td></tr><tr><td align="center">b) Emploi salarié</td><td align="center">2,0</td><td align="center">2,3</td><td align="center">3,2</td><td align="center">2,5</td></tr><tr><td align="center">c) Nombre d'heures travaillées</td><td align="center">1,7</td><td align="center">1,8</td><td align="center">1,6</td><td align="center">1,9</td></tr><tr><td align="center">Pour mémoire :<br>Durée du travail dans l'enquête ACEMO 3)</td><td align="center"> </td><td align="center">- 1,0</td><td align="center">- 3,9</td><td align="center">- 1,4</td></tr><tr><td align="center">Différence entre les 2 durées (a-c)</td><td align="center"> </td><td align="center">0,5</td><td align="center">2,3</td><td align="center">0,8</td></tr><tr><td align="center">- dont effet du champ</td><td align="center"> </td><td align="center">0,3</td><td align="center">1,1</td><td align="center">0,4</td></tr><tr><td align="center">- dont effet temps partiel</td><td align="center"> </td><td align="center">0,1</td><td align="center">0,3</td><td align="center">0,1</td></tr><tr><td align="center">- dont passage de la durée affichée à la durée effective</td><td align="center"> </td><td align="center">0,1</td><td align="center">0,6</td><td align="center">0,3<br>Sources : DP<br>(1) Secteur essentiellement marchand (EB-EP).<br>(2) Projections des budgets économiques d'été.<br>(3) L'enquête ACEMO porte sur les entreprises de plus de dix salariés du secteur marchand.</td></tr></table></center></div><!FINTAB> (1) Les entreprises de moins de vingt salariés ne sont tenues de passer aux 35 heures qu'à partir de janvier 2002. (2) D'après les informations du service statistique du ministère de l'emploi, à partir de l'analyse détaillée des accords eux-mêmes.

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