Question de M. DUPONT Ambroise (Calvados - RI) publiée le 28/03/2001

M. Ambroise Dupont appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la récente décision de retirer du port de Ouistreham les dix-huit personnes de la police de l'air et des frontières (PAF) qui y travaillent. Cette décision est très préoccupante ; non seulement, il paraît fort improbable que la douane et la gendarmerie puissent assurer le travail de la PAF, comme il nous l'a été dit. Deux entités ayant déjà leur propre travail et responsabilité peuvent-elles remplacer dix-huit personnes dont les moyens sont plus importants ? D'autre part, la douane n'a pas de compétences judiciaires pour interpeller les clandestins. Et que se passera-t-il si la gendarmerie dépasse, pour arriver sur les lieux d'appréhension des passagers clandestins, le délai de garde à vue récemment réduit à une heure ? Le port de Ouistreham accueille des cargos en provenance de tous les continents, et notamment d'Afrique. Il enregistre un transit de plus de 1 million de passagers et 100 000 camions. Un nouveau car-ferry sera bientôt mis en service entre Ouistreham et Portsmouth. Le développement du transport de passagers et marchandises qui devrait s'ensuivre risque fort d'être nul car les transporteurs routiers vont hésiter, voire renoncer à passer par Ouistreham s'il n'y a plus de police de l'air et des frontières. Les transporteurs britanniques doivent payer de fortes amendes si des passagers clandestins sont découverts dans leur véhicule. Pour toutes ces raisons et dans un contexte d'augmentation continue du nombre de passagers clandestins, c'est moins le moment que jamais de relâcher le contrôle. C'est pourquoi, il insiste avec la plus grande vigueur pour que le personnel de la PAF soit maintenu sur le port de Ouistreham.

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Réponse du ministère : Anciens combattants publiée le 25/04/2001

Réponse apportée en séance publique le 24/04/2001

M. Ambroise Dupont. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la récente décision de retirer du port de Ouistreham les dix-huit membres de la police de l'air et des frontières - la PAF - qui y travaillent actuellement. Cette décision nous préoccupe beaucoup et risque de porter un coup très dur au développement du trafic transmanche. Elle semble aussi incohérente puisque la PAF est maintenue au Havre, à Cherbourg ou à Saint-Malo et que seul le port de Ouistreham est touché.
Bien que nous ayons confiance en leurs qualités, il nous paraît fort improbable que les personnels de la douane et de la gendarmerie puissent, comme il nous l'a été dit, assurer le travail de la PAF. Deux entités ayant déjà leur propre travail et leurs responsabilités spécifiques à assumer peuvent-elles remplacer dix-huit personnes disposant de moyens plus importants ?
De plus, la douane n'a pas de compétences judiciaires pour interpeller les clandestins, dont le nombre, je le rappelle, est en augmentation constante : soixante ont été appréhendés en 1999, cent vingt-neuf en 2000 et cent vingt-quatre pour les trois premiers mois de 2001. Jeudi dernier, dix clandestins kosovars ont encore été arrêtés, dont quatre mineurs âgés de treize à quinze ans.
Et que se passera-t-il si la gendarmerie dépasse, pour arriver sur les lieux où auront été appréhendés des passagers clandestins, le délai de garde à vue, récemment réduit à une heure ?
Le port de Ouistreham accueille des cargos en provenance de tous les continents, notamment d'Afrique. Il enregistre un transit de plus d'un million de passagers et de 100 000 camions, et un nouveau car-ferry sera bientôt mis en service entre Ouistreham et Porstmouth.
Mais le développement du transport de passagers et de marchandises qui devrait s'ensuivre risque fort d'être empêché car les transporteurs routiers vont hésiter, voire renoncer, à passer par Ouistreham si la police de l'air et des frontières n'est plus présente. En effet, on le sait, les transporteurs britanniques doivent payer de fortes amendes si des passagers clandestins sont découverts dans leurs véhicules. Or, les contrôles se renforcent dans les autres ports de la Manche.
Pour toutes ces raisons, et dans un contexte d'augmentation continue du nombre de passagers clandestins, c'est, nous semble-t-il, moins que jamais le moment de relâcher le contrôle. C'est pourquoi je demande que tout soit fait pour maintenir le personnel de la police de l'air et des frontières actuellement affecté au port de Ouistreham.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat à la défense chargé des anciens combattants. Monsieur le sénateur, permettez-moi tout d'abord de vous présenter les excuses de M. le ministre de l'intérieur, qui est en déplacement, ce matin, au côté de M. le Premier ministre.
Il m'a prié de vous communiquer les éléments de réponse suivants.
Le conseil de sécurité intérieure du 6 décembre 1999 a pris la décision de procéder à une nouvelle répartition des tâches entre la direction centrale de la police aux frontières et la direction générale des douanes et des droits indirects, afin de permettre aux effectifs de police de se consacrer aux missions de sécurité et de proximité.
En conséquence, une impulsion nouvelle a été donnée au développement de la complémentarité entre les deux administrations, ce qui est une bonne chose. Ainsi, la mission de contrôle transfrontière sur quarante et un points de passage autorisés aériens, maritimes et terrestres, choisis en raison de la faiblesse des flux « hors Schengen » qu'ils connaissent, a été transférée de la police aux douanes.
Dans le Calvados, compte tenu de l'absence de bassin d'immigration irrégulière dans l'aire urbaine de Caen, le service départemental de la police aux frontières sera supprimé après la reprise de la mission de contrôle aux frontières par les douaniers. Cette prise en charge par la douane devrait intervenir à la fin du premier semestre de 2001.
En effet, les données statistiques relatives à l'activité de ce service confirment qu'il n'existe pas, dans le secteur de Caen-Ouistreham, de pression migratoire irrégulière en provenance ou à destination du Royaume-Uni.
De fait, s'agissant des contrôles transfrontière, il apparaît que le nombre des étrangers non admis par les fonctionnaires de la police aux frontières n'a cessé de diminuer depuis 1998. La tendance est identique pour le nombre de clandestins maritimes découverts : dix en 1998, huit en 1999 et cinq en 2000. A cet égard, aucun placement en zone d'attente n'a été effectué depuis 1998 et aucune demande d'asile n'a été présentée à la frontière.
Dans le domaine de la lutte contre l'immigration irrégulière, le nombre des procédures judiciaires diligentées par les fonctionnaires du service départemental de la police aux frontières du Calvados pour entrée ou séjour irrégulier a décru en 1998 et en 1999.
L'augmentation notée en 2000, et que vous avez soulignée, monsieur le sénateur, s'explique, d'une part, par la vigilance accrue des chauffeurs de camion, qui alertent les forces de l'ordre dès qu'ils soupçonnent la présence de clandestins dans leur attelage - cette vigilance étant elle-même liée à la mise en place de pénalités financières par les autorités britanniques en cas de découvertes d'immigrants irréguliers - et, d'autre part, par la mise en oeuvre des accords de complémentarité conduisant la sécurité publique et la gendarmerie du Calvados à remettre au service départemental de la PAF les étrangers en situation irrégulière interpellés, afin que ce dernier établisse les procédures judiciaires et administratives.
Ainsi, une grande partie de ces interpellations ne se produisent pas à la frontière, mais sont réalisées en amont, notamment par les services de gendarmerie et de sécurité publique compétents.
S'agissant du traitement des procédures judiciaires, les missions de sécurité et de paix publiques dans les ports ne sont pas, à de rares exceptions près, du ressort de la police aux frontières, mais relèvent du service de sécurité publique ou de gendarmerie territorialement compétent. A Caen-Ouistreham, cette mission était, est et restera dévolue à la brigade territoriale de la gendarmerie nationale.
En ce qui concerne la question du placement en zone d'attente d'un étranger non admis à la suite du contrôle opéré par la douane, il est exact qu'il ne peut être effectué que par un officier désigné par le chef de la police aux frontières territorialement compétent, en vertu des dispositions de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
Aussi, afin non seulement de mettre en oeuvre ces mesures, mais également de gérer les escortes consécutives et de traiter le cas des clandestins maritimes, un service référent de la police aux frontières a-t-il été désigné. Pour le point de passage autorisé de Caen-Ouistreham, il s'agit de la direction départementale de la police aux frontières de la Seine-Maritime, sise au Havre.
En aucune façon le transfert à la douane des missions de contrôle transfrontière ne représente un désengagement de l'Etat de sa mission sur les frontières, puisqu'elle sera assurée, sans rupture de continuité, par cette administration. Cette meilleure complémentarité des services, décidée par le conseil de sécurité intérieure, permettra à la police aux frontières de renforcer la lutte contre l'immigration irrégulière et l'emploi dissimulé sur les aires urbaines et les aéroports où la pression migratoire est importante.
En conclusion, rien dans la situation actuelle de Caen-Ouistreham, ni même du département du Calvados, ne justifie le maintien d'un service de la police aux frontières. Toutefois, si la pression migratoire devait évoluer de façon significative, il y serait répondu par un mode d'organisation dynamique, performant et adapté.
Telle est, monsieur le sénateur, la réponse que M. Daniel Vaillant souhaitait apporter à vos interrogations.
M. Ambroise Dupont. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Ambroise Dupont.
M. Ambroise Dupont. La fin de la réponse transmise par M. le secrétaire d'Etat est plus encourageante que son début !
En effet, nous avons des doutes à propos des bases sur lesquelles s'est fondé le conseil de sécurité intérieure : il s'agissait de chiffres datant de 1998, que vous avez rappelés, monsieur le secrétaire d'Etat, mais on constate une aggravation pour l'année 2000, que vous avez bien voulu reconnaître.
Nous ne voudrions pas qu'une faiblesse dans le dispositif général, à l'échelon du port de Caen-Ouistreham, vienne justifier, à l'avenir, la prise de dispositions nouvelles.
Je demande donc au Gouvernement d'être attentif à cette question, qui inquiète tout le monde dans notre région, qu'il s'agisse de la chambre de commerce, des élus ou des transporteurs.

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