Question de M. DEMILLY Fernand (Somme - RDSE) publiée le 28/03/2001

M. Fernand Demilly attire l'attention de M. le ministre délégué à la santé sur la question des effets de seuil de la couverture maladie universelle (CMU). Ainsi, le plafond des ressources arrêté par les pouvoirs publics, soit 3 600 francs, pour bénéficier de la CMU complémentaire, entraîne des cas d'exclusion : bénéficiaires de l'allocation adultes handicapés, minimum vieillesse entre autres. L'Etat, par l'intermédiaire des caisses primaires d'assurance maladie, demande aux départements de s'associer à une action d'incitation et de soutien envers ces personnes dont le revenu est compris entre 3 600 et 3 800 francs (seuil de pauvreté) et qui n'adhèrent pas à un organisme complémentaire. Les crédits consacrés par le département à la prise en charge de l'aide médicale des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et du minimum vieillesse ont été prélevés sur la dotation globale de fonctionnement et restitués à l'Etat. Or, aujourd'hui, on sollicite les départements pour qu'ils consacrent de nouveaux crédits dans une aide facultative destinée à pallier les effets de seuil introduits par la loi. De surcroît, ceci aurait pour conséquence de contredire le caractère universel de la CMU et introduirait une nouvelle aide individuelle donnée après appréciation de la situation particulière des intéressés et donc différente selon chaque département. Il lui demande donc de lui préciser les intentions du Gouvernement pour ne pas solliciter, encore une fois, les deniers des collectivités pour un programme centralisé.

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Réponse du ministère : Économie solidaire publiée le 04/04/2001

Réponse apportée en séance publique le 03/04/2001

M. Fernand Demilly. Monsieur le président, madame le secrétaire d'Etat, monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la
santé et concerne les effets de seuil de la couverture maladie universelle, la CMU.
Le plafond des ressources arrêté par les pouvoirs publics à 3 600 francs pour bénéficier de la
CMU complémentaire entraîne des cas d'exclusion, notamment celle des bénéficiaires de
l'allocation aux adultes handicapés et de ceux du minimum vieillesse.
Les caisses primaires d'assurance maladie demandent aux départements de s'associer à une
action d'incitation et de soutien envers ces personnes, dont le revenu est compris entre 3 600
francs et 3 800 francs, ce qui correspond au seuil de pauvreté, et qui n'adhèrent pas à un
organisme complémentaire.
Les crédits consacrés par le département à la prise en charge de l'aide médicale au profit des
bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapés et du minimum vieillesse ont été prélevés
sur la dotation globale de fonctionnement et restitués à l'Etat. Or, aujourd'hui, les départements
sont sollicités pour consacrer de nouveaux crédits à l'aide facultative destinée à pallier les effets
de seuil induits par la loi.
Une telle mesure viendrait contredire le caractère universel de la CMU et aurait pour
conséquence d'introduire une nouvelle aide individuelle attribuée après appréciation de la
situation particulière des intéressés et variant selon les départements.
Je demande donc au Gouvernement quelles mesures il compte prendre pour ne pas solliciter
une fois encore les deniers des collectivités pour un programme centralisé.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Monsieur le sénateur, à la fin de
janvier 2001, près de 5,1 millions de personnes bénéficiaient de la CMU. Cela représente une
augmentation de 50 % par rapport aux 3,4 millions de personnes qui percevaient, avant le 1er
janvier 2000, l'aide médicale gratuite des départements. Sous ce seul aspect quantitatif, en
ayant permis d'accorder un droit à la couverture complémentaire maladie à plus de 1,7 million
de personnes supplémentaires, la loi du 27 juillet 1999, qui a institué la CMU, est un grand
succès.
Sur le plan qualitatif, il faut noter que, bien souvent, l'aide médicale gratuite des départements
permettait l'accès à un panier de soins moins complet que celui qui est offert par la CMU ; en
outre, une partie des bénéficiaires de l'aide médicale gratuite y étaient admis partiellement,
moyennant une participation financière.
Ces améliorations quantitatives et qualitatives sont la conséquence de la décision prise par le
Gouvernement, au début de l'année 2000, de faire de la CMU un dispositif national, dont les
prestations doivent être les mêmes sur l'ensemble du territoire. C'est donc très logiquement que
l'Etat a repris la compétence d'aide médicale obligatoire qui incombait auparavant aux
départements, ainsi que les crédits correspondants, au moyen d'une diminution, à proportion de
ces crédits, des dotations globales de fonctionnement.
Mais la CMU est un dispositif jeune. Nous devons veiller à ce qu'il grandisse sans heurts. Une
évaluation en est d'ailleurs prévue pour la fin de cette année.
L'une des interrogations les plus fréquentes porte sur le seuil de ressources qui a été retenu
pour l'ouverture du droit à la CMU, soit 3 600 francs par mois pour une personne seule. Il est
difficile pour une personne d'admettre que, pour un dépassement de quelques francs de ce
seuil, elle soit privée de tout droit à la couverture complémentaire maladie.
Certes, la loi a prévu que tous les bénéficiaires de l'aide médicale gratuite avant le 1er janvier
2000 obtiendraient automatiquement à cette date le droit à la CMU. Ce droit a ensuite été
prolongé à deux reprises et, dernièrement, jusqu'au 30 juin 2001. Mais à prolonger encore ce
droit, on prendrait le risque de laisser se créer une inégalité entre personnes de revenu
identique selon qu'elles ont été ou non bénéficiaires de l'aide médicale gratuite avant le 1er
janvier 2000. Il faut donc trouver une solution générale à ce problème de l'effet de seuil de la
CMU.
D'ores et déjà, le Gouvernement a décidé d'affecter 400 millions de francs aux fonds d'action
sanitaire et sociale des caisses primaires d'assurance maladie pour la prise en charge des
personnes dont les revenus dépassent le plafond de ressources fixé pour l'ouverture du droit à
la CMU complémentaire. Il entre dans les compétences des caisses primaires de rechercher
les moyens de réaliser une coordination de leur intervention avec celles d'autres partenaires,
comme les organismes dispensateurs de couvertures maladie complémentaires ou les
départements.
S'agissant des départements, il y a lieu de souligner qu'ils conservent une compétence
générale en matière d'aide sociale facultative, laquelle trouve parfaitement à s'exercer dans le
domaine de l'aide au maintien de la couverture maladie des personnes qui sortent de la CMU.
Certains département, comme l'Essonne ou le Val-de-Marne, mais aussi l'Ille-et-Vilaine, ont
d'ores et déjà noué des partenariats locaux avec les caisses primaires d'assurance maladie, et
je ne vois que des avantages à ce qu'une partie des difficultés inhérentes à l'effet de seuil de la
CMU puisse être résolue au niveau local.
Toutefois, l'ampleur du problème qui se posera le 30 juin prochain avec l'arrivée à son terme du
droit automatique à la CMU des anciens bénéficiaires de l'aide médicale gratuite - plusieurs
centaines de milliers de personnes -, engage directement la responsabilité de l'Etat.
Le Gouvernement annoncera prochainement des mesures importantes qui garantiront que toute
personne dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU se verra proposer
le maintien d'une couverture maladie de qualité à un prix supportable par elle.
M. Fernand Demilly. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Demilly.
M. Fernand Demilly. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de m'avoir apporté la
réponse de M. le ministre délégué à la santé. Mais cette réponse n'est guère satisfaisante.
En effet, malgré les effets bénéfiques de la loi, que vous avez rappelés, demeure le problème de
l'inégal accès aux soins des plus démunis.
Parmi les prestations sociales, cinq minima sociaux ont été revalorisés de 2,2 % au 1er janvier
2001.
Le revenu minimum d'insertion atteint maintenant 2 608,50 francs, l'allocation de solidarité
spécifique, 2 613 francs et l'allocation d'insertion, 1 840 francs.
Il n'y a donc pas de problème pour ces trois minima.
En revanche, le montant de l'allocation aux adultes handicapés et celui du minimum vieillesse
s'élèvent désormais à 3 654,50 francs.
Il y a donc un problème pour 54,50 francs, problème qui n'existait pas avant la revalorisation du
1er janvier dernier.
Il conviendrait donc, pour maintenir le caractère universel de la CMU accordée « aux plus
modestes » et ne pas introduire une nouvelle aide individuelle différenciée selon les situations
particulières et les départements, que les conditions d'accès soient simplement relevées au
niveau du seuil de pauvreté, soit 3 800 francs par mois, ce qui règlerait le problème des
personnes dont le revenu est compris entre 3 600 francs et 3 800 francs, et qui n'adhèrent pas
à un organisme complémentaire.
Au demeurant, on ne peut pas solliciter à nouveau les départements, car les crédits qu'ils
consacraient à la prise en charge de l'aide médicale des bénéficiaires de l'AAH et du FNS ont
été prélevés sur la dotation globale de fonctionnement et restitués à l'Etat.
Obliger les départements à affecter de nouveaux crédits à une aide facultative destinée à pallier
les effets de seuil introduits par la loi reviendrait, en fait, à faire payer les départements deux
fois, ce qui n'est pas convenable.
J'ai bien noté, monsieur le secrétaire d'Etat, que le Gouvernement entendait prendre des
mesures prochainement. J'en attends l'annonce avec beaucoup d'intérêt.

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