Question de Mme PRINTZ Gisèle (Moselle - SOC) publiée le 28/03/2001

Mme Gisèle Printz appelle l'attention de Mme le ministre de la culture et de la communication sur les conséquences de l'implantation des multiplexes cinématographiques en périphérie pour le cinéma de proximité. En effet, beaucoup de salles situées au c ur des villes, des villages et des quartiers ont dû fermer alors qu'elles constituaient souvent l'unique forme de sortie culturelle et d'animation sociale de la commune. Les " survivants ", exploitants privés, associatifs ou publics sont aujourd'hui très inquiets quant à leur avenir au même titre que les élus et les citoyens. Si l'heure n'est plus aujourd'hui de remettre en cause l'existence même des multiplexes, il semblerait opportun de contrôler leur prolifération. Elle cite l'exemple de son département où deux complexes étaient implantés à 30 km l'un de l'autre, un troisième a ouvert entre les deux et un quatrième a récemment obtenu l'autorisation de construire. Elle comprend donc les craintes des petits exploitants, dont l'imagination, les initiatives ne pourront bientôt plus rien faire, face à des adversaires aux armes démesurées et de plus en plus nombreux. Lui rappelant son attachement à la culture de proximité accessible à tous, à une diversité de programmes, à une animation des centres-villes en partenariat avec les associations ainsi qu'à un développement des actions culturelles au c ur des villages et des quartiers elle en appelle à sa vigilance et lui propose des pistes de réflexion en vue de la survie des cinémas de quartiers, et pour que soit maintenue l'égalité d'accès à l'offre cinématographique sur l'ensemble du territoire. Celles-ci tiennent tout d'abord en la création d'un fonds public pour le maintien et la modernisation des salles de proximité ainsi que pour l'encouragement à la diffusion des films d'arts et d'essai. Elles tiennent ensuite à une réforme des commissions départementales d'équipement commerciales, responsables, semble-t-il, de l'implantation abusive des multiplexes ; enfin, elles plaident pour la tenue d'assises régionales du cinéma, afin que tous les acteurs concernés se rencontrent et conviennent ensemble de solutions pour préserver l'avenir du cinéma de proximité. Elle lui demande de bien vouloir lui faire savoir si le Gouvernement entend agir vers l'une ou l'autre de ces alternatives ou s'il entend prendre d'autres mesures favorisant la survie des salles obscures de proximité.

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Réponse du ministère : Patrimoine publiée le 25/04/2001

Réponse apportée en séance publique le 24/04/2001

Mme Gisèle Printz. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, si les multiplexes font aujourd'hui partie intégrante du paysage cinématographique et s'il est indéniable que leur arrivée a créé une dynamique rejaillissant sur l'ensemble du cinéma français, il ne faut pas oublier que leur implantation en périphérie des grandes villes a eu aussi, et pourra encore avoir,des conséquences fâcheuses pour nombre de petits exploitants.
En effet, bien des salles de proximité ont dû fermer, alors qu'elles étaient parfois le seul équipement culturel et constituaient l'unique pôle de sortie et d'animation sociale de la commune. Nombre d'exploitants privés, publics ou associatifs sont aujourd'hui très inquiets quant à leur avenir, au même titre que les élus et les citoyens des petites communes et des communes rurales, car, chaque fois qu'un cinéma ferme, c'est une page d'histoire, de souvenirs et d'émotions diverses qui se tourne dans la cité.
Il n'est, bien entendu, plus question de remettre en cause l'existence même des multiplexes, car nous connaissons toutes et tous le confort et la qualité de service qu'ils offrent aux spectateurs. Leur prolifération est toutefois inquiétante.
Dans mon département, par exemple, deux multiplexes se situaient à trente kilomètres l'un de l'autre. Un troisième a ouvert en juin dernier à mi-distance entre eux et un quatrième a récemment obtenu l'autorisation de construire.
A ce rythme, je comprends tout à fait les craintes des petits exploitants, dont l'imagination, les initiatives et les différents projets déployés pour attirer les spectateurs - souvent avec le soutien des municipalités - ne pourront bientôt plus rien face à des adversaires de plus en plus nombreux et aux armes disproportionnées.
Je ne souhaite pas - je sais, monsieur le secrétaire d'Etat, que vous ne le souhaitez pas non plus - que d'ici à quelques années le mot cinéma n'évoque plus que « multiplexe » et « programmation commerciale ».
Je connais votre attachement au septième art et je profite de l'occasion qui m'est offerte pour vous féliciter du plan « éducation à l'image » que vous avez voulu mettre en oeuvre avec votre homologue de l'éducation nationale et qui donnera la priorité à l'image cinématographique.
Connaissant également votre attachement à une culture de proximité accessible à tous et respectueuse de la diversité des goûts du public, à l'animation des centres-villes en partenariat avec les associations, ainsi qu'au développement d'actions culturelles au coeur des quartiers et des villages, j'en appelle à votre vigilance, car le cinéma de proximité répond à ces différents enjeux.
Des avancées importantes, que vous nous rappellerez sans doute, figurent dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques. Elles concernent notamment les commissions départementales d'équipements cinématographiques responsables, semble-t-il, de l'implantation abusive des multiplexes, sujet qui relève également de l'aménagement du territoire.
Par ailleurs, des pistes de réflexion m'ont été communiquées. Elles paraissent très intéressantes pour garantir la survie de nos cinémas de quartier et pour maintenir l'égalité d'accès à l'offre cinématographique sur l'ensemble du territoire.
Ces pistes consistent, tout d'abord, à recommander la création d'un fonds public pour maintenir et moderniser les salles de proximité.
Elles visent, ensuite, à encourager la diffusion des films d'art et d'essai au-delà des salles situées dans les grandes agglomérations, salles auxquelles vont, pour l'essentiel, les fonds de soutien.
Elles préconisent, enfin, la tenue d'assises régionales du cinéma, afin que tous les acteurs concernés se rencontrent et conviennent ensemble de solutions pour l'avenir.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous me dire si le Gouvernement entend retenir l'une de ces alternatives ou s'il envisage d'autres mesures pour favoriser la survie des salles obscures, dont l'implantation en nombre a été favorisée par les pouvoirs publics depuis l'après-guerre et auxquelles nous restons aujourd'hui très attachés ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Michel Duffour, secrétaire d'Etat au patrimoine et à la décentralisation culturelle. Madame la sénatrice, le parc cinématographique connaît une profonde transformation avec le développement des multiplexes.
Si la création de ces nouveaux équipements se traduit par une augmentation de la fréquentation, il est toutefois indispensable de veiller au maintien des autres formes d'exploitation cinématographique, et je partage, madame la sénatrice, votre point de vue.
A cet égard, je tiens à vous assurer que nous sommes, Mme Catherine Tasca et moi-même, très attentifs aux préoccupations des exploitants des salles de proximité.
Nous considérons, nous aussi, le maintien d'un parc de salles diversifié comme un enjeu primordial pour l'aménagement du territoire, la sauvegarde d'un tissu urbain vivant et l'équilibre de l'ensemble de l'industrie cinématographique. Le rôle des salles de cinéma de proximité, qui contribuent à la diversité de l'offre, doit en effet être préservé.
Des mesures de régulation des multiplexes ont été prises, vous l'avez souligné. Mme Catherine Tasca a fait adopter, dans le projet de loi sur les nouvelles régulations économiques, des dispositions destinées à renforcer la procédure d'autorisation des multiplexes.
En outre, les engagements de programmation souscrits en décembre 2000 par les principales entreprises du secteur de l'exploitation permettront de garantir la diversité de l'offre de films et de mieux préserver l'accès des salles indépendantes aux films.
La réforme du soutien automatique à l'exploitation a permis, en 1999, d'accentuer le caractère redistributif du soutien en faveur des exploitations de taille moyenne.
En outre, d'importants moyens financiers sont mis en oeuvre par le Centre national de la cinématographie, le CNC, pour soutenir les salles indépendantes et les salles consacrées à « l'art et essai », qui comptent parmi elles de nombreuses salles de proximité. C'est ainsi que 49 millions de francs de subvention ont été accordés en 2000 aux salles d'art et d'essai et que 70 millions de francs sont prévus dans le budget 2001 du CNC pour la création et la modernisation des salles dans les zones insuffisamment équipées.
Enfin, une réforme du soutien sélectif à l'exploitation a été entreprise pour simplifier les règles d'attribution des aides accordées aux salles d'art et d'essai et pour accroître l'efficacité des aides destinées à la modernisation et à la création des salles de cinéma indépendantes.
Mme Gisèle Printz. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. Je vous remercie de vos explications, monsieur le secrétaire d'Etat. J'aurais toutefois bien aimé savoir si des assises régionales du cinéma pouvaient se tenir sous la présidence du préfet. Vous ne m'avez pas répondu sur ce point.

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