Question de M. PLASAIT Bernard (Paris - RI) publiée le 26/07/2001

M. Bernard Plasait attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur la nécessité de supprimer l'avoir fiscal. L'avoir fiscal et son corollaire, le précompte, ont été créés en 1965 pour éviter la double-imposition de l'entreprise et de son actionnaire. Aujourd'hui, trente-six ans après, il faut bien constater que le système actuel est " moribond ". Pire, en ne se réformant pas, la France s'éloigne de ses principaux concurrents, puisque, avec l'Italie, elle est le seul grand pays à vouloir éviter la double-imposition du groupe et de son actionnaire, personne physique. L'avoir fiscal ne correspond plus à sa vocation première, qui était d'annuler la double-imposition du dividende : le précompte qui, à l'origine, ne devait être qu'un gage de l'avoir fiscal, pénalise aujourd'hui lourdement les sociétés. De plus, des taux multiples sont apparus : pour satisfaire une partie de sa majorité, le Gouvernement actuel a progressivement baissé le taux de l'avoir fiscal pour les associés, personnes morales, qui devrait atteindre 15 % en 2002. Enfin, le système est emblématique de la fiscalité française : il est complexe et variable avec les taux différenciés selon les personnes et selon les années et il est coûteux pour l'Etat avec une dépense importante à mettre en rapport avec les quelque 11 milliards de francs de recettes du précompte attendus pour 2001. Dans ces conditions, il est temps de réfléchir à un nouveau système, dans la mesure où, à cette complexité, ne correspond aucun intérêt économique. Le système n'est en aucune façon incitatif à l'investissement dans les sociétés françaises, ni pour les Français ni pour les étrangers, pour lesquels il est erronné de dire que cet avoir fiscal octroyé en numéraires les incite à acheter des titres de groupes français. Aussi, la suppression de l'avoir fiscal devrait être mise à l'étude dans les meilleurs délais, ainsi que son remplacement par un nouveau système, qui pourrait notamment s'inspirer de la nouvelle législation fiscale allemande. Celle-ci évite en effet les double impositions chez la société distributrice et impose les dividendes à un taux raisonnable pour l'actionnaire, personne physique. Ce dernier ne paierait l'impôt qu'au taux du barème et que sur 50 % des dividendes perçus. Par conséquent, il lui demande de bien vouloir lui indiquer l'état de ses réflexions et ses intentions en la matière.

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Réponse du ministère : Économie publiée le 13/12/2001

Les distributions effectuées dans les conditions prévues aux articles 158 bis et suivants du code général des impôts sont assorties d'un crédit d'impôt dénommé avoir fiscal. Cet avoir fiscal est reçu en paiement de l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés dû par les bénéficiaires des distributions. Il peut également faire l'objet, dans certaines hypothèses, d'une restitution. En application de l'article 223 sexies du code général des impôts, ces distributions donnent lieu à un précompte égal au montant de l'avoir fiscal lorsqu'elles s'imputent sur des sommes à raison desquelles la société distributrice n'a pas été soumise au taux normal de l'impôt sur les sociétés ou sur des résultats d'exercices clos depuis plus de cinq ans. L'augmentation constante et substantielle du précompte constatée depuis quelques années résulte de la conjonction de deux phénomènes. L'internationalisation des grands groupes conduit à accroître la part de leurs bénéfices réalisés à l'étranger. Ces bénéfices ne faisant pas l'objet d'une imposition à l'impôt, sur les sociétés en France, leur distribution assortie de l'avoir fiscal entraîne donc l'exigibilité du précompte. En outre, la pression des investisseurs en faveur de montants plus élevés de distributions conduit les sociétés, notamment celles qui sont cotées, à épuiser rapidement leurs capacités de distribution en franchise de précompte. Du fait de son augmentation et bien qu'il constitue en réalité une modalité de paiement du dividende, le précompte est mal ressenti par certaines sociétés distributrices. Dans ces conditions, une réflexion a été engagée avec les représentants des organisations professionnelles concernées sur les différentes solutions envisageables. La plupart de ces solutions ont soulevé des problèmes conceptuels importants qui n'ont pas pu être réglés. La solution consistant à permettre la redistribution sans avoir fiscal et donc sans précompte des produits de participations reçus dans le cadre du régime des sociétés mères a notamment fait l'objet d'un examen concerté et approfondi. A l'issue de cet examen, il a été constaté que cette solution accroîtrait très sensiblement la complexité des règles fiscales des distributions dans la mesure où elle ajouterait à l'infrastructure actuelle de gestion du précompte des règles particulières relatives au transfert des crédits d'impôt conventionnels et au calcul du taux de l'avoir fiscal qui fluctuerait à chaque distribution. La tâche des sociétés, notamment au niveau de la communication financière, des établissements payeurs et de l'administration en serait ainsi significativement alourdie. Le mécanisme serait moins lisible pour les actionnaires qui perdraient ainsi leurs repères. En outre, cette solution entraînerait un coût budgétaire important au titre de la première année d'application du nouveau dispositif. En tout état de cause, elle ne rencontre en définitive plus l'adhésion des représentants des entreprises concernées. Enfin, la solution préconisée par l'auteur de la question consistant à compenser la suppression du précompte et de l'avoir fiscal par un abattement sur le montant des dividendes imposable entre les mains des actionnaires personnes physiques pose d'autres difficultés. En particulier, un tel abattement pénaliserait lourdement les contribuables personnes physiques non imposables à l'impôt sur le revenu qui actuellement tirent avantage de l'avoir fiscal, sous forme d'imputation ou de restitution, alors même que les dividendes correspondants ne sont pas effectivement soumis à l'impôt sur le revenu en raison de l'abattement de 8 000 francs ou 1 200 euros (contribuables célibataires, veufs ou divorcés) et de 16 000 francs ou 2 400 euros (contribuables mariés soumis à une imposition commune) qui, sous certaines conditions, s'applique aux dividendes d'actions et aux produits des parts sociales. Compte tenu de ces difficultés, la présentation à court terme d'une réforme du précompte et de l'avoir fiscal au Parlement paraît difficilement envisageable.

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